Nous sommes à peine sortis de la salle de réunion que, après un bref hochement de tête entendu à l'intention de son interne, le dénommé « Fred » disparaît presque aussitôt à travers une large porte automatique à doubles battants munie de vitres quadrillées, se coulant ainsi d'une démarche rapide et assurée dans l'un des nombreux couloirs du service.
— Attends là.
Il me faut quelques secondes pour comprendre que l'ordre m'est directement adressé. Celui que je crois me souvenir s'appeler « Ethan » s'avance en direction de sa camarade — la fille aux cheveux noirs du secteur B il me semble —, péniblement occupée à réclamer le silence face à une dizaine de jeunes gamins en blouses blanches – pour la plupart d'ailleurs, beaucoup trop larges pour eux —. Tout en venant poser une main affectueuse sur son épaule, je le vois lui adresser un sourire bienveillant qui me noue l'estomac. Les deux internes conversent à voix basse quelques instants, échangeant visiblement une plaisanterie de bon goût, avant que la jeune femme ne vienne à nouveau frapper bruyamment des mains dans l'air lourd du hall d'accueil pour essayer une nouvelle fois d'attirer l'attention de ses « interlocuteurs ».
— S'il vous plaît les extés, on a besoin de votre attention maintenant merci !
Le ton autoritaire de la jeune femme porte loin et, cette fois-ci, un rapide silence entrecoupé de quelques rires et chuchotements enthousiastes s'installe autour de nous. Quelque part, et bien que nous soyons à peu près du même âge, je ne peux m'empêcher de rester assez impressionnée par le petit flot d'étudiants amassés devant la salle des internes, carnets de notes sous le bras. Ils me semblent tous si sérieux, si enthousiastes...
Tout en prenant le temps d'examiner avec attention la nouvelle « progéniture » sous ses yeux, reniflant inélégamment dans le silence instauré, Ethan vient nonchalamment s'accouder contre l'épaule de sa camarade. Ce simple geste suffit à ce que mon cœur se sert douloureusement au fond de ma poitrine, sans que je sache en cet instant trop pourquoi...
— Parfait, souffle l'interne, visiblement soulagée et ravie par le peu de calme retrouvé, le groupe un, vous irez avec moi ce matin.
Un concert de protestations déçues se fait entendre, rapidement stoppé par le regard ravageur de la jeune brune.
— Et si vous n'êtes pas contents, c'est exactement la même chose ! gronde-t-elle entre ses dents, le groupe deux vous suivrez Ethan. Allez, on se bouge ! On a du taff...
Et sans leur laisser le temps de protester à nouveau, la jeune femme s'engage à grands pas en direction du couloir opposé à la double porte empruntée par Fred. Je la regarde s'éloigner brièvement, avant de pivoter à nouveau sèchement sur ses talons.
— J'ai dit : on se bouge les extés !
La voix de l'interne ne souffre aucun refus et le petit groupe d'étudiants encore aggloméré au centre du petit hall de cardiologie se scinde donc rapidement en deux. Finalement, après quelques derniers signes de tête ou de mains amicaux et quelques encouragements, chacun emboîte le pas de son responsable.
— Et en silence ! aboie la jeune femme en prenant la tête de sa nouvelle « escouade » à travers les couloirs labyrinthiques du secteur.
Ethan sourit, comme amusé par la situation, avant de consulter la montre à son poignet.
— À nous ! annonce-t-il d'une voix grave, allez, suivez-moi. Et on se presse les jeunes !
Les six étudiants restés auprès de nous se mettent aussitôt en mouvement et je m'empresse moi aussi de me fondre dans la petite foule, espérant de tout cœur ne pas me faire remarquer dès le premier jour.
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Galien vs Hippocrate [Tome 1]
General Fiction« Le médecin qui ne peut pas s'appuyer sur un pharmacien de premier ordre est un général qui va à la bataille sans artillerie », Louis Farigoule, dit Jules Romains Lorsque Laura Miller débute enfin son premier jour en tant qu'externe en pharmacie da...