Je ne sais pas vraiment à quel point je dois paraître soulagée. Enfin, jusqu'à ce mon regard croise celui, amusé, que me lance Clarisse, ce qui en dit donc long sur l'image que je dois renvoyer de moi-même en cet instant. Néanmoins — et heureusement pour moi ! –, je n'ai pas vraiment le temps de m'en préoccuper, car, venant subitement couper court à l'étrange malaise qui commence à s'installer entre nous, le téléphone portable d'Alexandra se met à émettre une série de petites vibrations dans l'air devenu affreusement lourd de la pièce et je remercie silencieusement les astres pour cette distraction bienvenue.
Attrapant son cellulaire d'un geste bien trop rapide et maladroit qui manque de le faire tomber à la renverse, la jeune femme s'empresse d'en déverrouiller l'écran avant de venir tapoter quelques instants sur le clavier digital, répondant visiblement à un message urgent.
— Vraiment désolé... J'avais espéré que l'on ait un peu plus de temps pour faire connaissance, mais [elle hausse les épaules en arborant une sorte de « moue d'excuses » :] ça ne sera visiblement pas le cas, nous sommes attendues.
Attendues ? Je sens mes épaules se crisper à nouveau tandis que je me raidis sur mon siège, ce qui ne semble pas inquiéter ma nouvelle responsable outre mesure. Cette dernière, loin de vraiment prêter attention à ce qui se déroule autour d'elle, se contente de glisser rapidement son téléphone dans l'une des immenses poches de sa blouse avant d'aviser l'ordinateur portable étiqueté à son nom sur la table pour s'en saisir.
— Prends tes affaires, on va monter en service. On est déjà un peu en retard pour la réunion du staff et le cardio en chef risque de me faire la remarque si l'on ne se présente pas. Récupère tout ce dont tu as besoin, on y va !
Je m'efforce d'afficher un large sourire jovial sur mon visage afin de l'éclairer un peu. Après tout, voilà qu'enfin un peu d'action se présente ! Alors, pourquoi s'en faire hein ?
Je fais la moue et me penche à mon tour en avant pour venir attraper mon bloc-notes, deux ou trois crayons au hasard, mon téléphone portable, le calepin de Clarisse contenant l'essentiel de l'externe et le plan du CHU et fourre le tout dans l'une de mes larges poches.
Alors ça y est... Enfin... Ma vraie première journée en tant qu'externe en pharmacie s'apprête à commencer... Je n'arrive pas à savoir qui de mon impatience ou de mon appréhension maladive résonne le plus fortement au fin fond de mes entrailles. Néanmoins, une fois mes affaires réunies, je constate que je suis plutôt heureuse de m'élancer en direction de la porte de la salle de repos pour emboîter le pas à ma nouvelle future responsable dans la succession de couloirs labyrinthiques de l'hôpital. Après toutes ces années de travail acharné, me voilà enfin prête à faire face à mon destin ! La seule chose que j'espère simplement à présent, c'est que tout se déroulera à la perfection...
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Après avoir emprunté un premier ascenseur presque vide nous ramenant au rez-de-chaussée de l'hôpital à présent bondé de monde, Alexandra nous entraîne d'un pas vif et assuré à travers un dédale de couloirs toujours plus biscornus les uns que les autres jusqu'à une petite foule de patients amassés devant l'entrée de deux nouveaux ascenseurs.
— Merde, marmonne la jeune femme en jetant un coup d'œil aux écrans digitaux au-dessus des portes en métal, on va prendre les escaliers, ça sera plus rapide, je crois.
Je peste intérieurement à l'idée de devoir à nouveau mettre mes faibles poumons à l'épreuve et, tout en m'efforçant de monter quatre à quatre les étroites marches en colimaçon de l'hôpital pour parvenir à suivre le rythme imposé par la pharmacienne, j'en viens à maudire ces foutues interminables cages d'escaliers.
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Galien vs Hippocrate [Tome 1]
Ficción General« Le médecin qui ne peut pas s'appuyer sur un pharmacien de premier ordre est un général qui va à la bataille sans artillerie », Louis Farigoule, dit Jules Romains Lorsque Laura Miller débute enfin son premier jour en tant qu'externe en pharmacie da...