Chapitre 32

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Il était 7 h du matin et j'avais décidé d'aller courir de bonne heure avant qu'une chaude journée d'été commence. En Australie, j'avais l'habitude de faire du sport, principalement de la natation. J'allais souvent nager dans l'océan avant de commencer les cours où en fin d'après-midi, après avoir fini ma journée. Là-bas, la saison estivale durait beaucoup plus longtemps qu'en France et je pouvais profiter de la plage une grande partie de l'année. J'adorais nager dans la mer. Ça me procurait une sensation de liberté et de légèreté tout en ayant l'impression d'être en train de purifier mon corps par l'eau salée. Peut-être que ça pouvait paraître bizarre, mais je pense que c'était ce qui me manquait le plus en étant ici. Rien que pour ça, je regrettais d'être partie.

Cela expliquait pourquoi, depuis que j'étais arrivée à Paris, j'avais laissé tomber toute activité sportive. Avant d'habiter en Australie, je n'avais jamais été une grande fan de l'effort physique, mais aujourd'hui, ça me manquait. C'est pourquoi j'avais décidé de me bouger ce matin pour aller faire un jogging. J'avais besoin de me défouler avant de passer mon vendredi assise devant un manuscrit.

Au passage, je m'étais dit que ce serait l'occasion parfaite pour écouter l'album de Ken. Celui dont tout le monde parlait. Il m'avait assez fait comprendre qu'il était temps que je m'y mette. Pour l'instant, je dirais que ma préférée était Le Horla. J'aimais beaucoup les paroles et l'instru qu'il y avait derrière. C'était une chanson entraînante mais profonde. Je ne m'attendais pas à trouver des paroles aussi recherchées et des phrases aussi bien construites. Il était vraiment fort en métaphores et en jeux de mots. Il ne cessait de m'étonner. Sa voix participait aussi à l'ambiance de l'album. Elle était grave et il posait ses mots d'une façon lourde pour appuyer ses dires sans être pour autant très agressif. Son rap était tout simplement imposant. J'étais plutôt impressionnée. Il s'était vraiment amélioré depuis l'époque des battle au lycée. Je comprenais mieux l'engouement qu'il suscitait.

En lisant les titres des différents sons présents sur l'album, j'en avais vu un qui s'appelait Risibles Amours. Effectivement, il était vraiment fan de Kundera. J'étais contente d'avoir la référence, comme si ça me rapprochait de lui. C'était idiot.

Je regardais l'heure sur mon téléphone : ça faisait bientôt quarante minutes que je courais. J'étais plutôt fière de moi. Je n'avais pas perdu mon cardio. Sentant l'épuisement arriver, je décidais qu'il était temps de rentrer. Je rejoignis rapidement la rue de mon immeuble.

- T'es allée courir Juliette ? me demanda mon père alors que j'entrais dans la cuisine pour boire un grand verre d'eau.

Il paraissait étonné à chaque fois que je faisais quelque chose. Il fallait vraiment qu'il se fasse à l'idée que je n'étais plus une enfant et que je n'avais pas besoin de prévenir qui que ce soit quand je décidais d'aller quelque part. J'avais l'impression d'être en tort à chaque fois, comme si je faisais quelque chose de mal.

- Oui.

Je me servis de quoi étancher ma soif, lui tournant le dos.

- Bon, je vais aller travailler moi, m'annonça-t-il, voyant que je ne voulais pas vraiment faire la conversation.

- D'accord, bonne journée !

J'ouvris un placard pour attraper des céréales. Courir m'avait donné faim.

- Au fait, ça te dirait d'aller au restaurant samedi soir ? Ça fait longtemps qu'on n'a pas passé un moment tous les deux.

J'attendis quelques secondes avant de me retourner. Je n'avais pas envie qu'il voit que sa proposition ne m'enchantait pas. Ce n'était pas que je n'avais pas envie de passer du temps avec lui, mais je n'étais jamais à l'aise en sa présence. Ça se voyait qu'il essayait toujours d'en faire trop pour que nous nous rapprochions, mais ce n'était pas naturel. Moi, je n'arrivais pas à faire semblant.

- Hm... Désolée, je peux pas samedi, j'ai déjà prévu des choses avec des amis.

Ses traits s'affaissèrent. Mon cœur se serra, je ne voulais pas lui faire de la peine.

- Mais on pourrait manger ensemble le midi, si tu es disponible, proposais-je.

Son visage s'éclaira.

- Oui ! Bonne idée. Allez, on fait comme ça alors. À ce soir !

Il sortit de la pièce et j'entendis la porte d'entrée se fermer quelques secondes plus tard. Je crois que je n'avais plus le choix maintenant, j'allais à nouveau devoir me retrouver seule avec mon père. Cette perspective ne m'excitait pas vraiment.

Je pris mon bol de céréales et je le posais sur la table basse du salon. Je mangeais tranquillement en traînant sur les réseaux sociaux. J'aimais une photo de Mo, qui prenait la pose en survêtements en pleine séance studio. Je me fis la réflexion que les garçons avaient vraiment tendance à jouer un rôle devant les caméras ou dans leurs chansons. En réalité, c'étaient des mecs cool, drôles et un peu enfantins sur les bords.

Une fois mon petit-déjeuner terminé, je filais sous la douche avant de me mettre au travail. Je sentais que ça allait être une bonne journée.

Dernier Soupir | NekfeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant