Chapitre 2

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Je prends une grande inspiration, comme pour me donner de la force puis me dirige avec difficulté jusqu' à la cuisine.

J'ouvre le grand frigo de la cuisine et regarde à l'intérieur. L'odeur âcre de moisissure m'arrache un gémissement de dégoût. Je n'ose même pas regarder l'intérieur et referme le frigo.
Je commence à paniquer... Combien de temps ? Depuis combien de temps suis-je ici...?
Je cherche alors dans un placard, les mains tremblantes. Un paquet de biscuits, parfait. Je le tourne dans tous les sens afin de trouver la date de péremption. 14/10/2177.
2177... Le jour du marathon, je me souviens, c'était le dernier vendredi avant les vacances. Le 8 Octobre... 2177.
Je n'arrive plus à penser. Quel jour on est ... ?
Le marathon, ce n'était pas hier, non... C'était il y a un bon bout de temps maintenant.
...Combien de temps ?
Mon souffle est saccadé.

"Nan... Nan c'est pas possible... !"

J'arrache une photo de moi au panneau en liège de la cuisine, prise quelques jours avant le marathon. Je cours du mieux que je peux jusqu'à la salle de bain. J'enlève mes vêtements, me place face au miroir.
Je regarde la photo. Puis mon reflet, les mains tremblantes

Le miroir me montre des cheveux m'arrivent au bas du dos.
Non, impossible... J'ai les cheveux au carré. Ils sont au carré sur cette photo.
Il me montre aussi des côtes apparaissantes. Des jambes, fines comme des bâtons. Des seins, à peine voyants.
Des joues creuses.
Les tranchées sous mes yeux. Un teint blanchâtre, presque translucide.

Je suis maigre. Non, non je n'ai jamais été maigre !
...Combien de temps faut-il à des cheveux pour pousser autant, à un corps pour s'amaigrir de la sorte...? J'ai soudain très peur de le découvrir...

Je voudrai que mon père me prenne dans ses bras et me rassure comme il sait si bien le faire. Je voudrai voir ma mère, mes frères... Des larmes coulent à flot sur mes joues. Je me met à trembler, à hurler de frustration, tout cela n'a aucun sens !

Seulement, mon estomac criant famine me fait revenir à la réalité. J'ai toujours faim...J'essuie mes larmes.
Il faut que je trouve des conserves.

J'englouti 3 boîtes de raviolis froids, bien sûr le gaz ne marche pas et le froid s'est depuis longtemps emparé de la maison.
Heureusement, l'eau fonctionne toujours, on a une réserve et un système indépendant. Mais je ne sais pas s'il marchera longtemps...

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Je cours sous le ciel menaçant maintenant depuis le début de l'après-midi. J'ai réussi à trouver quelques aliments comestibles dans les magasins qui n'étaient pas totalement détruits.

Il faut que je rentre, ou la pluie va finir par me tremper de la tête aux pieds. Je repasse devant les cadavres, en les observant, et je remarque qu'une partie de leur système électronique leur a à tous été enlevé...Ça forme un trou peu profond de la taille d'un livre de poche.

Je m'approche lentement de l'un d'entre eux, et m'accroupis à côté du cadavre le plus proche. Je regarde de plus près et découvre que la partie manquante sur les autres est encore présente sur celui-ci. J'essaye de la décrocher, en utilisant une pierre qui se trouvait à côté de moi.

"Aah ! Fait chier..!"

Une grande entaille traverse ma main, ça saigne abondamment... L'objet gît à côté de moi. Je déchire un pan de mon vêtement et le presse négligemment contre ma blessure. Ça brûle. 

Jusqu'à ce qu'une ombre apparaisse dans mon champ de vision. Je me fige. Je retient ma respiration, tout en empoignant mon sac et l'objet électronique. Y-aurait-il quelqu'un d'autre ?!

Je me relève lentement, une flamme d'espoir brûlant ardemment dans tout mon être. Je me retourne. La personne est cachée dans l'ombre d'une ruelle, je ne vois que la moitié de son corps. Il me fixe. Je ne distingue pas bien son visage, il porte une large capuche et est habillé assez étrangement...

Il n'as pas l'air aussi étonné que moi.

La flamme s'éteint brusquement lorsqu'il brandit lentement une arme imposante dans ma direction. Son geste est saccadé, pas naturel.

Mon système cérébral tourne à toute vitesse, mais je reste figée sur place.

Je tremble à présent. Je me vois déjà au sol, une balle dans la tête, provocant une marre de sang autour de moi...

Pourquoi mes membres refusent-ils de faire le moindre effort ? Je voudrais crier, mais rien ne sort, sachant pertinemment que personne ne viendra à mon secours.
Au fond de moi, je ne sais même pas si j'ai réellement envie de fuir, peut être que ce cauchemar s'arrêtera si je meurs ?

Je déglutis difficilement et ferme les yeux. De toute façon, à quoi bon vivre, s'il n'y a personne..?

Soudain, une explosion retentit jusqu'à mes oreilles. J'entrouvre un œil et aperçois un éclair blanc à la place où se tenait mon bourreau quelques secondes plus tôt.

Je ne vais donc pas mourir aujourd'hui, c'est tout ce que je réussis à comprendre.

Je recule en titubant, ne voulant pas aller voir ce qui reste de cette étrange personne.

Combien sommes-nous, alors ?

"Qu-qui est là ...?!" dit-je d'une voix tremblante.

Rien...

Je m'enfuis alors avant que d'autres du même genre rappliquent.

Je cours dans la rue déserte quand de grosses gouttes d'eau me tombent dessus d'un coup. Le tonnerre gronde. La nuit va tomber. Il faut que je rentre... Mais je suis épuisée. Je cours, je cherche mon chemin mais la panique me fait aller dans la mauvaise direction. Où bien est ce la bonne ? La peur gonfle mon cœur et un frisson parcours mon corps. S'ils me retrouvaient, que feraient-ils de moi... ?

Il fait nuit noire. Je suis gelée. J'ai déjà vu cette maison non ? Oui je viens de passer devant... Je tourne dans une ruelle étroite, me retournant furtivement toutes les 2 minutes. J'arrive devant une rangée de très vielles maisons. Je ne connais pas cet endroit, c'est étrange...

Une des bâtisses attire mon attention. J'arrive à distinguer de longues tiges vertes qui sortent ça et là des fenêtres crasseuses, des feuilles d'un vert pétant malgré la pénombre envahissent le jardin et je peux distinguer de petites plantes sauvages qui essayent de s'échapper part tous les coins de la porte d'entrée. Il faut se rendre à l'évidence, je dormirai pas dans mon étrange maison vide cette nuit.

Je me précipite sur le palier, mon sac toujours sur le dos et l'objet toujours à la main. Je fait tourner la poignée rouillée et pousse la porte. Elle résiste. Je recule de quelques pas et fonce sans pitié sur la vielle porte en bois. Elle s'ouvre cette fois-ci avec quelques craquements, me laissant le passage dans un couloir sombre ou dansent quelques ombres d'arbres agités par le vent, projetées à travers les nombreuses fenêtres qui habillent les murs.

À cause du tonnerre, je ne perçois pas si quelque chose se passe à l'extérieur... Peut-être sont-ils là, à me chercher ou m'observer..? Cette pensée me fait frissonner et je me recroqueville dans un coin de la pièce centrale, sans faire attention à ce qui m'entoure. Ma main saigne de plus belle, et j'ai perdu le bout de tissu dans la tempête. De petites gouttes rouges carmin s'écrasent sur le vieux parquet avec un son régulier. Je suis trempée, la plaie ne risque pas de se refermer rapidement.
Je ne peux pas sortir maintenant, ce serait risqué... Du moins c'est que je veux croire car je commence à m'endormir, le froid pénétrant mes habits, la peur me faisant trembler légèrement, tombant néanmoins dans les bras de Morphée.

~Sunae~

Juste moi. Et les rayons du soleil.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant