Chapitre Deux

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CHAPITRE DEUX

- CV & LETTRE DE MOTIVATION -


Le lendemain, je passe ma journée à la bibliothèque, le nez penché sur mes feuilles, pour combler la soirée que je vais passer à la patinoire. Hier soir, Nills m'a surpris en me disant que je pouvais être absent à son match de ce soir et j'ai cru voir dans ses yeux quelque chose que je n'aime pas... De l'inquiétude. Preuve que mon état de stress est si fort qu'il dégouline de partout, dans maison, autour de moi. Et je refuse de renvoyer cette image de moi. Je refuse aussi de rater le moindre jeu de mon meilleur ami – même s'il n'est jamais trop sûr de monter sur la glace en tant que première année. Je tiens à être dans les gradins, à m'époumoner pour l'encourager, c'est tout.

Alors, je bosse ou plutôt je me bats contre ce putain de code de programmation que je dois faire fonctionne pour un projet. C'est à rendre dans plus d'une semaine mais je sais déjà que j'ai pris un grand retard. La perspective des prochaines nuits blanches ne m'enchante pas, je ferai quand même tout pour rendre un travail de qualité.

Parfois, mon acharnement me surprend encore moi-même. C'est ma petite fierté. Quoi qu'il arrive, mon mantra est de ne jamais cesser d'essayer pour mettre toutes les chances de mon côté. Mais, ces dernières années, je ne l'ai appliqué que dans mes études, le reste me paraissait impossible à affronter. Que ce soit dans ma vie ou dans celle de mes proches. J'ai été confronté à tant de souffrance, d'injustice, de noirceur... Il paraît que certains y trouvent les armes et la force d'y surmonter — c'était mon cas au début — tandis que d'autres préfèrent les rendre. Ce que j'ai fini par faire, non par peur mais par protection. Je me suis trop longtemps écorché. Maintenant, je préfère me contenter de vivre et être heureux. C'est déjà beaucoup, non ?

Lorsque je réalise que ma concentration n'est plus au rendez-vous, je m'octroie une pause. Il me reste deux petites heures avant de devoir rejoindre mes triplés. Je rallume mon téléphone et réponds à mes quelques messages non lus. Nora & Ayden m'ont d'ailleurs harcelé sur notre groupe en commun, enfin essentiellement elle qui s'inquiétait de ne pas avoir de nouvelles... depuis une heure. Il y a pire que d'avoir une mère angoissée, avoir une sœur angoissée ! Heureusement, je peux toujours compter sur mon frère pour calmer le jeu.

[NONO : Pourquoi tu réponds pas Lieth ?

Tout va bien ?

Appelle-nous dès que tu vois nos mess.]

[AYD' : TES messages.

Fous-lui la paix.]

[NONO : Mais pourquoi il répond pas ?]

[AYD' : Sûrement à la biblio.

Et s'il s'était fait kidnapper par un type qui lui a proposé des bonbons ?]

[NONO : du chocolat* ! Il suivrait jamais quelqu'un pour des simples bonbons.]

Je pouffe de rire en lisant leur conversation et m'empresse de soulager Nora. Tous les deux étudient à l'université de Washington, plus au sud de la ville, et si les centaines de mètres qui nous séparent me rassurent, ils ne suffisent pas à éteindre les états d'âme de ma sœur. Je crois que c'est même pire. Elle me laissait plus tranquille quand j'étais en Arizona ou peut-être que je ne captais pas assez bien.

— C'est comme ça que tu révises, constate une voix suave avec une pointe de jugement.

La chaise devant moi se tire. Le visage lumineux de Neevah apparaît, nos regards s'accrochent immédiatement. Je suis étonné de la voir là, de l'autre côté de la petite table ronde que j'occupe seul depuis ce matin. Volontairement. Elle qui ne m'a jamais adressé la parole de son plein gré, de toute l'année scolaire.

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