Chapitre 8

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« C'est une infirmité d'être incapable d'aimer »

Simone de Beauvoir, La force de l'âge.




– Tu as bien refermé la porte ?

– Oui!

La clé de la maison fourrée dans sa poche, Vanessa s'engouffra à l'arrière de la voiture.

Elle observa la maison s'éloigner, puis disparaître lorsque la voiture tourna pour s'engager sur les nombreuses routes de campagnes en direction de Malmö. Alice s'était endormie à l'avant après quelques minutes de route.

– Notre reine n'a pas beaucoup d'énergie. 

– La bataille de ce matin l'a assommé.

Par chance, Aaron avait pu leur prendre des billets pour le dernier vols, écourtant ainsi leur séjour en Suède. Et si tout le monde savait que ce retour était inévitable, cela n'empêcha pas une certaine mélancolie de les assaillir. La vie ces derniers temps n'avait pas été simple. Vitemölla leur avait offert un soupçon de vie normale... Secrètement, ils souhaitaient pouvoir revenir un jour.



17h30. Les bagages enregistrés, ils gagnèrent leur porte. La langue suédoise se mélangeait à la langue française. Vanessa se cacha le visage, prise d'une soudaine crise de fou rire dont Alice devina l'origine. Aaron observait sévèrement un enfant qui lui parlait en suédois, tendant vers lui des bonbons mâchouillés, sous le regard amusé de sa mère. Ne pouvait-elle pas récupérer son bambin avant qu'il ne ne le touche avec tout ce sucre ?

Le vol leur parut plus rapide qu'à l'aller, et bientôt, la Suède ne fut plus qu'un souvenir lointain.

Le soleil était bas lorsqu'ils atterrirent. Le taxis les déposa devant chez Alice. Retour à la réalité, pensa Vanessa en observant le taxis s'éloigner.

– Bien, nous voilà à la maison.

Annonça Alice, rompant le silence par ces quelques mots maladroits. Elle ignorait la marche à suivre, et l'air sombre des deux autres ne faisait qu'accroitre son malaise. Elle non plus ne voulait pas être là, elle non plus ne voulait pas se séparer d'eux.

- Vanessa, tu pourrais rester là cette nuit ? On ira au commissariat à la première heure.

- Vous ne voulez pas y aller maintenant ?

- Je suis fatiguée, Vanessa aussi. Ça a été éprouvant, ces derniers jours.

- Vous ne pouvez pas rester seules ici. Il sait peut être que tu vies ici.

- Tu n'as qu'à rester ici pour cette nuit ?

Vanessa lui jeta un rapide coup d'œil alors que le rouge s'étalait sur les joues d'Alice. Merde ! C'était si indécent ! Qu'allait-il penser ? Et puis non ! Ce n'est qu'une proposition parmi tant d'autres pour assurer leur protection. Aaron ne la quitta pas du regard. Elle avait envie de creuser un trou pour y plonger.

– Très bien.

Elle fit un signe de tête qui ne voulait sûrement rien dire. Ils montèrent dans l'appartement où son chat les accueillit avec beaucoup de ronronnement. Vanessa s'éclipsa bien vite dans le canapé avec celui -ci tandis qu'Alice vidait les sacs dans le petit cellier. Aaron resta un instant pantois. Que faisait-il là ? Que lui avait-il pris de dire oui ?

Alice prépara le dîner, et dans un silence meublé par une émission quelconque, ils mangèrent. Parfois les vieux sont si bêtes, pensa Vanessa en lavant les yeux au ciel. Ne pouvaient-ils pas se parler au lieu de s'éviter du regard ?

CorvusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant