(Une allumette est craquée dans la pénombre. On ne voit que sa flamme s'élever avec lenteur et lourdeur vers l'embout d'une cigarette. La combustion se fait avec toute la pesanteur que le poison impose au corps. La respiration est profonde ; avide de cette rencontre avec les vapeurs venimeuses.)
VERDEUVERDEUV – Putain.
(Prend une autre bouffée. Déballe l'arsenal chirurgical d'une mallette d'appoint sur une table de fortune. Rien autre que ces éléments ne sont visibles. Le noir à l'arrière et autour forme une présence palpable. VERDEUV déploie son équipement avec la lourde indifférence de son âme face à la mort.)
GAVE – Bordel, grouille-toi mec ; j'ai l'impression de voir mon temps se raccourcir à vue d'œil.
VERDEUV – Guère plus qu'avant ; le temps est une dimension par trop rigide pour qu'une crotte comme toi puisse le tordre. Reste tranquille.
GAVE –Raccourcis tes phrases et allonge tes gestes putain de salopard de merde !
VERDEUV – Chaque mot compte, bâtard. N'est-il pas étrange, pour autant, que les grands de ce monde d'enculés accordent une importance prépondérante aux locutions triviales tirées de l'obscurantisme du vulgaire de ces suceurs de queues ?
GAVE –Combien de patients tu as achevé juste en leur parlant déjà ? Putain, je suis en train de crever ! Active ton gros cul de poufiasse !
VERDEUV – La facilité induite par le fait de parler au tout-venant – elle n'est qu'apparente, sac de vomi ambulant. Il faut plus d'efforts qu'on se le figure pour préserver des formes simples.
GAVE –L'inverse est aussi vrai, sac à vin.
VERDEUV – Sale étron, tu as déjà mis les pieds dans des quartiers de rupins ? Putains de dieux, je le savais !
GAVE –Disons que j'ai vu quelques putains de films...
VERDEUV – Sans doute ceux d'un putain de rebelle alors ; pour en avoir une image pareille.
GAVE –C'était un peu plus qu'une pute pour amuser les foules.
VERDEUV – Et sais-tu à quelle bénédiction il doit cette paire de couilles ? A sa compréhension de l'absurdité des hasards ; ouais – cette putain d'absurdité de merde inhérente à tous les mondes dépourvus d'entours ; comme le sont nos putains d'imaginaires.
GAVE –Arrête de te branler la bite et recouds-moi putain de con de merde !
ACTE II
(VERDEUV est penché sur GAVE pour effectuer l'opération.)
VERDEUV – Continue à me parler de films ; ça te calmait pas mal tout à l'heure.
GAVE –C'est de la foutue culture générale, tu dois les connaitre aussi bien que moi !
VERDEUV – Le savoir est toujours élitiste petit con. Celui de la culture populaire ne fait pas exception. Qu'est-ce qui te plait tant là-dedans ?
GAVE –C'est les collègues, ces pédés – ha putain !
VERDEUV – Tu l'as mérité ; je te charcute ouvertement la prochaine fois que tu te la joues homophobe raclure de merde.
GAVE –Ca va, okay. Bref, c'est pas souvent qu'on a des films intéressants sur notre job. Alors quand on me les a fait découvrir, j'ai foncé comme un taureau en rut.
VERDEUV – Oui ; le putain de principe d'une criminalité est une des rares données qui perdure même dans les rêveries. Continue, tu te reconcentres sur la plaie.
GAVE –C'est l'âme de ce putain de gars qui m'as fasciné, tu vois ? On aurait dit qu'il pouvait comme... genre s'approprier les souffrances et les cauchemars d'inconnus pour, genre, les exorciser, tu vois ? Un peu comme... Merde, j'en sais rien moi, je suis pas un putain de baveur de salive !
VOUS LISEZ
Aux Entours Des Mondes.
Historical Fiction(Scripts pour série YT.) Épisode 1 : Épisode 2 : Épisode 3 : Épisode 4 : Épisode 5 : Épisode 6 : Épisode 7 : Épisode 8 :