18- Taehyung

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Mon corps me fait mal, mes simples inspirations sont un supplice et traversent ma gorge difficilement, raclant chaque partie sensible de ma trachée.

Je reviens à moi sans même savoir quand et comment je suis parti.

J'ouvre péniblement les yeux, la faible lumière extérieure m'agresse, tout est flou.

Je reprend conscience.

Non, ce n'est pas le moment, pas maintenant, je ne suis pas prêt...

Regarde toi, tu n'a pas changé.

Non, non pas encore, pas maintenant.

Ma tête me fait souffrir, la voix résonne dans l'entièreté de mon être.

Tu ne peux pas changer, c'est évident.

Non, tais toi.

Tu sera toujours cette même ordure, quoi que tu fasse.

Non...

Tu est malade, Taehyung.

Non !

Tu sais quoi, la vérité c'est que -

- Ta gueule FERME TA GUEULE !

J'ai l'impression d'avoir craché une lame tellement ma gorge me fait souffrir à ces mots.

Ma tête bouillonne, mon corps entier me brûle.

Mes mains s'enfoncent agressivement dans mon cuir chevelu tentant en vain de faire taire cette torture.

Pourquoi je me suis réveillé ? Il ne fallait pas, il ne fallait pas que je me réveille.

La voix fait écho dans ma tête, me faisant perdre la raison.

Taehyung ton traitement.

Tout se mélange mais je le sens, je le sais ; cette voix est différente, elle n'est pas juste dans ma tête.

Taehyung ton traitement !

Elle existe.

- Taehyung ton traitement !

Une main se pose sur mon épaule pour me secouer énergiquement, comme pour essayer de me reconnecter avec la réalité.

- Où tu l'a mis ?!

Mais la réalité ne veut pas de moi, jamais.

Toujours avec ce traitement ?

Non, non tais toi...

Ne voit-tu pas qu'il ne fonctionne pas ?

Bordel ferme là...

La rage ; la rage menace.

Rien ne peux te venir en aide, tu es seul ; un cas désespéré.

Mon sang bouillonne, mes muscles se contractent.

- JE T'AI DIS DE FERMER TA PUTAIN DE GUEULE !

Quelque chose vole à travers la pièce, un bruit sourd raisonne, l'objet se brise, actuellement je n'ai conscience de rien, je ne comprend rien.

Je ne veux pas comprendre.

Ma respiration saccadée me fait mal, la boule au fond de ma gorge m'empêche de respirer convenablement.

Je suis à bout de souffle, je souffre.

Je tente tant bien que mal de m'accrocher à quelque chose sous la menace de m'effondrer sous mon propre poids, étrangement insoutenable.

Ma vue brouillée m'empêche de réaliser des gestes cohérents.

Tout mes sens sont confus, comme mélangés les uns aux autres, créant un désordre ingérable.

Soudain, une sensation froide se pose sur mes lèvres ; une substance liquide demande le passage.

J'ouvre sans attendre la bouche et ingère rapidement, goulument, la totalité du liquide qui m'est proposé.

Je ne réfléchis pas, je veux juste que ça s'arrête.

Je veux que tout s'arrête, désespérément.

Une sensation de fraicheur se crée un passage dans mon oesophage.

Tiens, tu es devenu un gentil garçon ?

Mon crâne se retrouve de nouveau serré entre mes pommes de mains, inlassablement, de plus en plus fort, de plus en plus douloureux.

Je serre les dents, j'halète.

Je serre à m'en rendre fou, si je ne le suis pas déjà.

Allez, je n'en est plus pour beaucoup de temps, courage.

Les goutes de sueur coulent sur mon front, ma peau s'humidifie sur la totalité de mon corps tremblant, totalement affaibli.

Tu ne changera jamais.

Je plaque mes mains contre mes oreilles pour ne plus entendre cette voix qui me hante depuis si longtemps.

Comme si elle venait de l'extérieur.

Alors qu'elle résonne en moi.

Arrête toi, par pitié.

Tu le sais, je ne peux pas, tu ne peux pas.

La voix se fait de plus en plus faible dans mon esprit, comme si elle s'éloignait.

Ça y est, les médicaments font effet.

Pour la faire taire, il faut me faire taire.

Mais pour la tuer, il faut ...

Tu es pathétique.

Mon visage se crispe à m'en faire mal.

Allez, allez plus vite.

Après quelques minutes qui paraissent être une éternité mes muscles finissent par se relâcher, répandant une douleur aigüe suite une contraction trop longtemps prolongée.

La pression sur ma tête diminue, mes paupières s'alourdissent, enfin.

Un souffle s'échappe de ma bouche sans que je ne puisse le contenir, je sens mon corps vriller, attiré par le sol sans que je ne cherche à empêcher ce contact imminent par manque de force, par manque d'envie.

J'ai le temps de me sentir soutenu avant de perdre finalement connaissance.

Et c'est les larmes au yeux que je sombre dans la noirceur de mon âme, laissant aux neuroleptiques la responsabilité de mon être meurtri, laissant à la souffrance une nouvelle victoire et à mon corps, une nouvelle défaite.

















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L'aliéné [Taekook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant