SUICIDE

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Solène est seule dans son appartement. La lumière est douce, seules quelques quelques lampes sont allumées dans son salon. Elle a un bol de thé à côté d'elle, qu'elle boit régulièrement au fil de la scène. Un chat est allongé à côté d'elle, l'air de dormir. Devant elle, une boite de Doliprane, pleine.

Solène *s'adresse au chat, de dépit* : Bon dis-moi Minou, je fais quoi là ?

Minou *tourne la tête vers Solène* : Mais je sais pas moi. 

Solène *prend peur* : Aaah ! Mais ?? Tu parles ? Je suis folle, ça y est, je suis folle. Ca doit être tout ses antidépresseurs là. 

Minou : Mais non, je parle pas, c'est dans ta tête. Comme un doudou quand t'es enfant, quoi. Mais calme-toi je vais rien te faire de mal. Je suis juste la petite voix que t'entendais il y a quelques mois.

Solène *fronce les sourcils* : Oh, je vois. Faut vraiment que je vois plus régulièrement Fréderic. *prend conscience de ce qu'elle vient de dire* Enfin, Monsieur Maltais, le psy quoi.

Minou *se lèche les pattes* : Ah oui tiens d'ailleurs, fais gaffe, t'es en train de fantasmer sur lui. Ca fait seulement trois séances, t'es de plus en plus rapide dis-donc.

Solène *rougit* : Alors là, pas du tout. Je vois pas où tu vas chercher ça. Je le trouve juste gentil, ça s'arrête là. Et puis... nan mais vraiment, pas du tout.

Minou *lève un sourcil* : Solène, je suis dans ta tête. Je pense tout ce que tu penses. Je vois tout ce que tu vois. Je sens tout ce que tu sens. J'ai les mêmes douleurs que toi. J'ai mal comme tu as mal. Sauf que contrairement à toi, j'ai encore espoir. J'ai espoir que le lendemain soit mieux. J'ai l'espoir que tu rencontres quelqu'un, que tu ailles mieux, que ces fichus antidépresseurs marchent. J'ai l'espoir que tu sourisses, au moins une dernière fois. J'ai espoir que tu arrêtes de pleurer, le soir avant de t'endormir, que tu arrêtes de faire ces cauchemars qui te hantent. *se lève et se place en face de Solène* . Solène, j'ai espoir qu'on aille mieux.

Solène ne répond rien. Une larme coule sur sa joue.

Minou : Alors, s'il te plait, Solène, aime le. Aime le, drague le comme quand tu avais 17 ans, mets des décolletés rien que pour lui, souris pour lui, pleure devant lui pour qu'il te prenne dans ses bras. Solène, je t'en supplie, il faut que tu croies en quelque chose. Et ça peut être l'amour. Au moins une dernière fois. Après, fais ce que tu veux, je te comprendrais si ça ne marche pas.

Solène étouffe des sanglots sur les poils de Minou. Elle le prend dans ses bras, et essuie ses larmes sur son pelage.

Solène *sanglotant* : Minou, si tu savais. Ca fait des années que je me répète ça en boucle. Des années que j'attends de voir le soleil passer à travers les nuages, mais j'étouffe sous la pluie. Le brouillard cache le paysage, et si j'espère apercevoir un rayon de lumière, ce n'est qu'une éclaircie de quelques heures seulement. 

Elle se lève et regarde la ville à travers la fenêtre. Elle fredonne un air de musique qui lui rappelle des souvenirs douloureux. Elle plaque sa main devant sa bouche et ferme les yeux. Les larmes continuent de glisser sur son visage.

Solène *se tourne vers Minou et s'énerve* : Et puis j'en ai marre, Minou ! Encore une nuit, encore une journée, encore une heure. "La journée est bientôt finie." Et si, un jour je ne me réveille pas hein ? Ça changera la vie de qui ? J'en ai plus d'espoir, moi, merde ! Si même toi tu ne comprends pas ce que j'endure, qui le pourra ? Tout est gris, Minou. C'est comme une journée pluvieuse de Janvier, constamment. J'en marre, marre, marre !! On dirait peut être une ado dépressive qui fait sa crise, mais je m'en fous. Je souffre, Minou, vraiment. On dirait peut-être pas, mais je souffre, au plus profond. Et j'ai plus de solutions. J'ai 25 ans Minou, tu te rends compte ? Seulement 25 ans. Et regarde-moi, je ressemble vraiment à jeune femme de 25 ans ?

Minou détourne le regard.

Solène *serre les dents* : Tu vois ? J'ai l'air d'une quarantenaire célibataire qui passe sa vie à écrire des comptes-rendus pour un patron complètement con. Je suis vieille dans l'âme. Et à 25 ans, je suis dépressive. Il me reste combien d'années à vivre, avant de mourir de ma belle mort ? 

Minou et Solène s'affronte du regard. 

Solène *détourne le regard et marche une nouvelle fois vers la fenêtre* : Voilà. Voilà Minou pourquoi cette boite de médicament en face de moi. Voilà pourquoi une lame de cutter à côté de mon lavabo. Voilà pourquoi une corde dans mon placard. Voilà pourquoi j'écris une lettre d'adieu à mes parents. *elle essuie une larme*. Même mes parents ne sont pas là pour moi. Je suis seule. Seule à crever. Et c'est bien ce que je compte faire. Je sors acheter de quoi manger. A tout à l'heure.

Minou ne répond rien. La porte claque.


DOLIPRANEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant