de culte,

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roses.




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Le feu brûle toujours Maki, et elle a beau commencer à le connaître avec le temps, elle n'est plus sûre de la nature dont il est animé. D'abord douloureuse, la sensation qu'il lui a d'abord fait ressentir se fait désormais plus douce, armée d'une suavité toute aussi dangereuse que la souffrance par laquelle elle a été happée au départ.

Elle sent un sourire se former au plus profond d'elle, comme si les os de sa cage thoracique se réarrangeaient afin de dépeindre un rictus aussi gai que lugubre. Si ses lèvres n'étaient pas aussi insensibles à cause de la chaleur, si sa bouche n'était pas rendue sèche par les flammes qu'elle embrasse sans même le vouloir, elle pourrait exprimer sa joie intense et sa gratitude. Seulement, elle est comme estropiée de ce gouffre aujourd'hui débordant de douleur, dont elle aurait voulu user d'avantage pour prononcer des mots d'amour pur et déposer de tendres baisers sur l'épiderme de l'être chéri.

Le feu brûle toujours Maki, et elle sait maintenant de quelle source il s'écoule. Il vient de ses souvenirs qu'elle n'a plus la force d'enfouir, ceux qu'elle a longtemps considérés comme une faiblesse qu'elle se devait de faire taire.

Le roux de la chevelure qu'elle se remémore n'a pourtant rien de pareil à l'amertume qu'elle est en train d'expérimenter et qui, elle en a la ferme impression, réduit peu à peu son ossature à l'état de cendres. Il n'est pas chaud mais chaleureux, ne la heurte pas contrairement au lit de flammes dans lequel elle se sent dépérir un peu plus à chaque instant.

Bien qu'elle ait le sentiment farouche que l'épilogue de sa vie est en train de s'écrire, bien qu'elle ait le sentiment de devoir faire quelque chose pour sauver sa peau, elle ne parvient à rien faire d'autre que se laisser aller une fois de plus. Qui est-elle pour repousser le souvenir de Nobara de son esprit? Fille forte qui a combattu l'adversité autant qu'elle en a été victime, elle n'a pas le courage de refuser le semblant de bonheur par lequel elle est bénite lorsque ses pensées divaguent et la ramènent dans la cour du lycée, là où elle a connu l'herbe verdoyante, les corolles des cerisiers en fleur et la douceur d'un premier amour.

Si elle pouvait dire quelque chose, briser le crépitement des flammes rien qu'une seconde pour faire s'élever sa propre voix, elle appellerait son nom et lui demanderait comment elle se porte. Elle s'assurerait que sa coquille à elle est intacte et que son cœur est encore disponible, prêt à être baigné dans toute l'affection qu'il mérite.

Si Maki pouvait se relever, elle marcherait jusqu'à trouver Nobara et se déciderait à enfin la chérir de tout son être. Cette simple pensée l'amuse, et son amusement, au lieu d'apaiser sa souffrance, l'amplifie encore un peu plus. Elle a eu le malheur de naître en tant que femme, et en plus de cela, elle n'a même pas la décence de s'intéresser aux hommes qu'elle est censée servir et satisfaire, objet de leurs désirs et ombre de leurs silhouettes.

L'ironie qui réside dans son existence toute entière est le plus grand drame de sa vie, et elle pourrait s'en plaindre des heures durant si cela ne l'avait pas menée à la plus belle des choses. Certes, aux yeux de beaucoup, elle renferme en son être la signification même du mot déception, mais c'est une chose pour laquelle elle s'est blâmée une unique fois avant de tourner la page. Oui, c'est une femme, et non elle n'a pas hérité de la technique familiale, et elle ne compte pas promettre à ses aînés de tenter de la passer à sa descendance en engendrant la progéniture la plus abondante possible pour réparer une faute dont elle n'est en rien responsable.

Mais cela lui importe peu si ça signifie que toutes ces circonstances malheureuses l'ont menée à Nobara. Nobara qui a su voir en elle du potentiel, qui, sous le soleil de juin, lui a un jour avoué avoir pour elle du respect, cette chose qu'elle a dû attendre plus d'une décennie avant de pouvoir y goûter réellement. Le mot roule encore sur sa langue, et elle s'en veut de ne pas s'être servie de ce muscle pour lire à cette fille un peu de poésie, des vers qui rimeraient pour lui conter tout l'amour et la reconnaissance qu'elle lui porte.

𝐋𝐄𝐒 𝐐𝐔𝐀𝐓𝐑𝐄 𝐋𝐈𝐁𝐄𝐑𝐓𝐄𝐒. | maki zeninOù les histoires vivent. Découvrez maintenant