1 - Le club

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 — Et donc ?

— Et donc, c'est terminé. De toute façon, je m'y attendais. Quand ton amant ne passe même plus pour te baiser, y'a plus grand-chose à espérer.

Lola et moi bûmes de concert. Attablés à l'une des nombreuses tables extérieures de notre pub favori, je lui contai mes derniers déboires sexuels. L'amour, ça n'avait jamais été quelque chose de très sérieux pour moi. Bien sûr, j'avais eu de gros coups de cœur, comme tout un chacun. Mais l'amour avec un grand A, il ne s'était pas encore pointé, et pour tout dire, je n'étais pas pressé qu'il arrive. J'avais toujours aimé flâner. Ma plus longue relation avait duré quelques mois, trois ou quatre, je ne sais plus. Je me lassais vite.

— Tu devrais venir au club un de ces soirs, ça te changerait les idées, me proposa mon amie.

— Et j'y ferais quoi ? J'ai pas envie de m'y retrouver tout seul comme un con.

— C'est clair que c'est mieux de faire la tournée des bars à la recherche d'un cul à prendre ou d'une bite prête à t'empaler.

— T'as tout compris ma belle, me moquai-je.

Elle me sourit, mais je perçus très bien le soupir las qui traversa ses lèvres.

— Tu peux toujours venir regarder une de mes sessions, j'ai des clients qui adorent qu'on les regarde.

— Non merci ! m'exclamai-je. Tu sais que je respecte ce que tu fais, mais vraiment, les délires SM, c'est pas mon truc.

— Qu'est-ce que t'en sais, t'as jamais essayé, murmura-t-elle.

Je lui flanquai un petit coup de pied sous la table et nous bûmes de nouveau en échangeant un sourire. Lola, c'était ma meilleure amie. Je l'avais rencontrée au lycée. Nous nous étions tout de suite bien entendus, elle, la fille intelligente, délurée et moi, l'obsédé de service. Ensemble, nous avions vécu de belles soirées et cuvé des gueules de bois où on avait cru mourir. J'étais là pour lui tenir les cheveux aux WC et elle me retenait de sauter sur le premier venu. Au final, nous n'avions pas tant changé que ça ; elle était souvent bourrée et moi, j'avais eu trop d'amants pour me souvenir de tous. Sauf que, quand j'avais trouvé un travail dans un refuge animalier, elle, était devenue dominatrice.

Elle ne me l'avait pas tout de suite avoué, mais quand j'avais trouvé son « sac de jeu » bien planqué sous son lit, elle avait été obligée de tout me déballer. Au début, j'avais été surpris ; je ne l'imaginais pas du tout dans ce genre de carrière, et pourtant, je devais dire que je la voyais s'épanouir de plus en plus. Les premières années, elle était plutôt réticente au fait que j'entre dans son club, puis un jour, elle m'avait proposé de venir. Curieux, je m'étais laissé guider dans une partie infime de son univers, mais j'avais fui plus vite qu'un lapin qu'on met en joue. Il faut dire que la soirée « Venez comme vous êtes » avait refroidi mes ardeurs. Les tenues en cuir, les gens portant des laisses, les fouets attachés aux ceintures, tout ça m'avait fait extrêmement peur.

Habituellement, je n'étais pas farouche concernant les jeux de mes partenaires. Mais Lola n'était pas ma partenaire, et quand je m'étais retrouvé seul, assis au bar de ce club, je me suis senti bien con et mal à l'aise. À la vérité, toutes ces pratiques ne me dérangeaient pas, c'était juste pas mon délire. Car même si Lola était une professionnelle, nous ne parlions que rarement de ses clients, « secret professionnel », qu'elle disait. Alors, ne trouvant rien pour moi, je n'y étais plus retourné. J'avais eu peur de faire tache et je ne voulais pas incommoder mon amie en faisant une bourde. Depuis, elle me proposait régulièrement qu'on y aille ensemble « pour se faire pardonner et me prouver qu'ils n'étaient pas fous ». Je savais bien que les pratiquants n'étaient pas fous, mais ce n'était pas mon monde.

Safe World [MxM BDSM] [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant