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CHAPITRE 4

Une malédiction sur un cercueil de bois.

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« Non Solaire, je ne garderai pas ce sorcier sur mon navire.

— Je ne comprends pas, Mary, il n'a rien fait de mal !

— Pas encore. »

Solaire, un beau prénom pour un morceau de soleil sur pattes, se dit Peter tandis que le contenant de son estomac se résumant à de l'eau salée, s'extirpe d'entre ses lèvres, la tête projetée par-dessus la rambarde du pont supérieur du Queen's El'Mary. Le sorcier se fait oublier, si on peut dire, en se laissant aller à son mal de mer. Pâle comme un linge, les yeux vitreux, il redresse parfois quelques regards par-dessus ses épaules pour considérer les deux jeunes femmes. De ses yeux noirs comme la barbe de son plus grand ancêtre, Mary Elizabeth accuse le minois boudeur que la rouquine lui adresse. Voilà plusieurs minutes maintenant que le sorcier a été tiré de l'eau et il n'est pas surprit que sa réputation soit remontée jusqu'aux cailloux perdus que sont les Archipels. La capitaine pirate démontre une nette envie de larguer le rescapé à la première île qu'ils croiseront, qu'elle soit sauvage ou non. Par chance pour Peter, l'enfant du Temps prend étonnamment sa défense. Ils ne se connaissent pas, ils ne se sont jamais croisés.

Comme il peut et entre deux remontées gastriques, le sorcier attarde sa prunelle au décorticage de la rouquine.

Elle a les cheveux au vent et aux couleurs du feu, les mains appuyées sur ses hanches. Son sourire est resté perché à ses lèvres depuis que Peter est revenu à lui. Elle a l'air tiré d'un conte de fée. Elle a l'air d'une sirène sans écailles. D'une colombe sans ailes ou bien d'une rose qui attend que ses épines poussent.

Peter vomit, les filles le regardent faire.

« Le garder sur le navire ce serait prendre le risque de s'attirer certains malheurs, soupire Mary en considérant de nouveau la rouquine.

— Au vue de l'état dans lequel il se trouve je suis pas sûre qu'il soit capable de faire quoi que ce soit, tu es superstitieuse, commente Solaire.

— Je vous entend, leur rappelle Peter. »

Lourdement, il se laisse tomber contre le plancher, un bras néanmoins tendu et appuyé contre la barrière pour pouvoir se redresser vivement si un haut-le-coeur l'attaque à nouveau. Il a le souffle aléatoire, le regard qui divague et souffre d'une migraine sûrement due au choc qui a causé sa noyade.

« Tu n'as pas tord, il est plutôt minable, acquiesce finalement la capitaine pirate. Ce n'est pas le portrait que je me faisais de ce sorcier, avoue-t-elle. Au moins, on peut le tenir en joue dans cet état. »

Peter rit jaune en entendant ça, non seulement parce qu'être ainsi méprisé l'insupporte par-dessus son mal de mer qui le brasse dans tous les sens. Tout en même temps, il n'est pas surprit de l'accueil qu'on lui réserve. Les pirates sont comme ça ; superstitieux, plus que la gente populaire des villes du Nouveau Monde. Les pirates connaissent mieux que quiconque la véracité des légendes. Ils y croient et ne font pas les malins avec. Pour des hommes et des femmes qui se jètent au coeur des océans sur des cercueils du bois, être méfiants doit être une habitude à prendre. Et Peter sait qu'il ne dupera pas une capitaine pirate, surtout, il a devant lui la tête la plus dure d'entre tous. Si le sorcier a sa réputation, lui qui aime s'informer, connait par des bruits de couloirs ce qui est dit sur Mary Elizabeth Thatch. Si la tête de cette femme tombe un jour, c'est possiblement tout le règne pirate qui s'effondre avec elle. Sur ses épaules repose toute la sécurité de la piraterie du Nouveau Monde. C'est elle, qui décide, c'est elle qui fait survivre le peuple auquel elle appartient.

LE DERNIER SORCIER LIVRE 1 [STATUT : PUBLIÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant