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Les cieux étaient toujours aussi sombres tandis que les vagues ne cessaient de se déchaîner sur les côtes. Le vent soufflait fort. Presque comme si une catastrophe surviendrait dans les heures qui arrivaient.

Persée s'occupait d'Andromède. L'héritière du trône, bien que son titre soit contesté de par le fait qu'elle n'était qu'une fille et donc indigne de régner sur le royaume selon certaines personnes. Propos qui horripilaient au plus haut point la domestique.

Les deux filles se trouvaient dans une des salles d'entraînement, qui en temps normal était réservée aux soldats ou aux hommes qui souhaitent se perfectionner aux combats. Les demoiselles n'avaient aucune autorisation pour s'y rendre et s'exercer. D'ailleurs Persée n'oserait imaginer la tête d'un seul homme s'il lui prendrait l'envie de venir à cette heure-ci. Ou pire encore, celle de la reine Cassiopée, qui ne permettrait jamais ce genre d'activité pour sa fille chérie.

— Prête ?
— Toujours pour te mettre la pâté Persée !
— C'est ce qu'on verra votre altesse !

Les deux se saluèrent avant d'entamer leur combat à l'épée. Andromède maitrisait bien son arme, cependant ce n'était pas assez pour déboussoler Persée qui esquivait facilement les coups de la princesse avec quelques facilités. Toutes ses attaques se firent parer, pourtant, elle ne baissa jamais sa garde, continuant de se défendre face aux contre-attaques de sa professeure. Ses appuis étaient bien ancrés, elle se déplaçait bien, ses mouvements étaient fluides. Tout était parfait. Elle avait juste moins d'expérience, mais au lieu de se décourager, la princesse redoubla d'effort pour ne serait-ce que désarmée Persée qui arrivait facilement à anticiper les coups.

— Je croyais que vous deviez me battre ? blagua la châtain tout en reprenant son souffle après les efforts.
— Un jour, promis, je te surpasserai et ensuite on pourra reconnaître que je ne suis pas qu'une simple héritière qui sert juste à enfanter.
— Je suis certaine qu'un jour, le monde changera, et que tu seras acclamé à ta juste valeur Andromède. Mais pour le moment, il vaut mieux que t'aille te passer sous l'eau avant que ta mère ou ton père ne te voit ici et me fasse bannir du palais.
— Ah non ! Je suis contre, tu es bien la seule personne qui ne me voit pas comme une simple fille et qui m'apprend à me battre !

Persée ne put s'empêcher de laisser un sourire transparaître sur son visage transpirant suite au combat. La fougue d'Andromède qui allait à l'encontre de l'idée de ce que ses parents attendaient d'elle lui plaisait. La châtain n'avait jamais compris et ne comprendrai jamais pourquoi les femmes ne signifiaient rien pour les hommes. A partir de quel moment étions-nous inférieurs se questionna-t-elle intérieurement ? Après tout, Athéna était la déesse de la sagesse et de la guerre. Chose qui devrait prouver que les femmes pouvaient tout aussi bien être l'égal des hommes.

— Allez, dépêche-toi avant que ta mère ne découvre que tu te trouves ici !

Andromède acquiesça et sans oublier les quelques affaires qu'elle avait amené, elle salua Persée, qu'elle considérait plus comme une amie, une confidente qu'une simple esclave, et rejoignit ses appartements personnels. Persée, quant à elle, s'était laissé retomber sur le sol, soufflant un bon coup. Pour l'instant, elle était libre de toute occupation : le repas étant apporté et ayant surveillé Andromède pendant que la reine Cassiopée prenne du temps pour elle-même.

— Que faites-vous ici ?

La châtain sursauta en entendant la voix sévère de l'homme qui venait de rentrer dans la salle d'entraînement. Il l'observait d'un œil sévère, tandis qu'elle baragouinait des phrases incompréhensibles pour expliquer sa présence en ce lieu. Elle avait gardé la tête haute face à la personne qu'elle devina faire partie de l'armée du roi au vu de son uniforme. Cependant, il se trouvait là, seul, chose inhabituel. Elle connaissait plus ou moins les horaires des soldats dans ces salles et savait aussi qu'ils ne venaient jamais seul. Pourtant, il lui faisait face et aucune autre personne ne semblait surgir derrière pour lui réclamer d'avancer afin de commencer l'entraînement. L'homme détailla l'état dans lequel se trouvait la jeune femme, qui se trouvait encore un peu essoufflé de son affrontement avec la princesse. Il aperçut également l'épée qui traînait par terre que Persée s'empressa de cacher, ne voulant pas qu'il voie l'arme et fasse le lien avec Andromède.

— Savez-vous que vous ne devriez pas utiliser une arme ? Vous n'êtes pas habilité à vous battre ? formula l'homme.
— J'aimerai bien connaître l'identité de la personne qui décréta que nous ne pouvions pas nous battre car nous sommes des femmes, contesta Persée courroucée d'être prise une nouvelle fois de bonne à rien.
— Prouvez moi le contraire dans ce cas. Essayez de me désarmer et peut-être que je reconnaîtrai que vous pouvez vous trouver ici. En cas contraire, je serai forcé de dire au roi qu'une de ses domestiques s'amusent durant son temps de travail à sa battre à l'épée, comme si elle souhaitait faire un coup d'état, suggéra-t-il.

Persée ne savait pas si cette proposition était correcte. Hésitante, elle réfléchissait aux divers points, positifs comme négatifs, qui l'attendaient à la suite de ce combat. Elle avait confiance en ces capacités. C'était certain, elle possédait un bon niveau pour se défendre que ce soit avec une arme ou dans un corps-à-corps. Cependant, ses chances n'étaient pas de cent pour cent face à un soldat surentraîné, elles étaient même pratiquement nulles d'autant plus qu'elle s'était bien dépensée quelques instants auparavant. Toutefois, elle se devait d'accepter. En aucun cas elle ne pouvait risquer sa place au palais, pour une histoire aussi futile et fausse. Pourquoi s'amuserait-elle à renverser le pouvoir actuel ? Certes, elle voulait que les choses changent pour les femmes mais de là à s'en prendre ouvertement au roi et seule, c'était du suicide.

— J'accepte votre proposition.

Se mettant en position, le combat pouvait débuter.

— Vous vous débrouilliez bien, je dois l'avouer, articula le soldat alors qu'il para une nouvelle fois une offensive de la demoiselle.

Bien que Persée n'aie jamais réussi à désarmer son adversaire, elle avait réussi à le surprendre plus d'une fois, le faisant reculer à de nombreuses reprises afin d'éviter ses attaques. Elle était d'ailleurs assez fière d'elle-même. Il reconnaissait qu'elle savait se défendre et ça c'était une grande victoire pour la jeune fille. Reprenant avec quelque difficulté son souffle, elle continua ses attaques tout en esquivant celles du soldats. Aucun des deux ne prenaient l'avantage sur l'autre. Certes, l'homme avait plus d'expérience, ce qui aurait dû lui permettre de clore l'affrontement rapidement. Néanmoins, la châtain ne se laissait pas démotiver et analysant l'environnement, elle arrivait à s'en sortir aisément.

— Où avez-vous appris à vous battre ? questionna l'homme.
— Toute seule, en vous observant lors de vos entraînements ou lors des tournois, je n'ai jamais cessé d'apprendre pour être la meilleure, confia Persée.
— Pour quelles raisons ? Vous n'avez guère besoin de prouver quoi que ce soit ! nota-t-il.
— C'est bien pour les personnes comme vous que je m'entraîne, afin de leur montrer que justement une femme peut aussi se rendre sur le champ de bataille sans pour autant être démunie ! rectifia-t-elle.

Le soldat ne trouva rien à répliquer de plus. Elle venait de lui prouver qu'elle savait se battre sans avoir reçu aucun entraînement spécifique. Juste par elle-même et en les observant. C'était juste incroyable. Il lâcha son épée, la laissant pour le moins perplexe, alors qu'elle se repositionnait pour continuer le combat. Elle ne l'avait pas désarmé, certes, mais elle avait réussi à lui poser plus de problème que prévu et même s'il choisissait de continuer, l'homme se doutait que le résultat resterait inchangé. Aucun des deux ne prendrait réellement le dessus sur l'autre.

— Je reconnais que vous pouvez vous battre, il s'interrompit un instant, mais essayer à l'avenir de ne pas rester trop longtemps ici. D'autres soldats seraient moins cléments à votre sujet.

Persée acquiesça. Evidemment, elle se rendait compte de la chance qu'elle venait d'avoir, d'autant plus qu'elle n'avait pas vraiment réussi le défi qu'il lui avait donné. Cependant, au fond d'elle, elle le remercia. Elle commençait à fatiguer et elle ne savait pas combien de temps encore elle aurait tenu s'il avait prolongé le combat.

Persée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant