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Le trajet se faisait dans le silence. Un silence calme et tranquille qui permettait aux deux de se retrouver seul dans leur pensée afin d'imaginer divers scénarios pour la suite des événements.

— Tu crois qu'on est encore loin ? questionna Eleon.
— Je sais pas trop..., la carte dit que nous sommes plus très loin pourtant j'ai l'impression qu'on est pas prêts d'arriver, souffla Persée.

Eleon se retint de rire face à la mine découragée de la châtain.

— Je t'ai connu plus enthousiaste et plus déterminée !

Pour réponse, elle se contenta de répéter la phrase en grimaçant sans quitter des yeux la carte, espérant trouver un indice avant qu'elle n'insulte Zeus de lui avoir offerte.

— Tu penses que c'est vrai qu'elle lise l'avenir ? se demanda le soldat.
— Je sais pas trop. C'est un peu gros de lire l'avenir, tu trouves pas ?
— Hum... peut-être.
— En tout cas, je suis certaine que je ne leur demanderai pas le mien. Je veux juste le repère de Méduse qu'on en finisse vite avec cette histoire.

Eleon ne rajouta rien, continuant la marche au côté de sa nouvelle camarade. Les deux avaient pu se rapprocher au cours de ces derniers jours de marches, se liant ainsi d'amitié. Le chemin devenait de plus en plus difficile d'accès, ce qui ne surprenait en rien les deux personnes. Effectivement, les trois sœurs restaient bien cachées aux yeux des passants. Seuls les méritants pouvaient accéder devant elles et découvrir les réponses à leur question.

— J'espère en tout cas qu'elles seront sympas, se hasarda Eleon.
— Ne compte pas trop dessus, avertit la châtain.

Il haussa les épaules, continuant le chemin tandis que Persée le suivait de près, bien qu'elle eût un peu plus de difficultés, n'ayant pas une aussi bonne endurance que le soldat.

— Allez, courage ! On y es presque Persée ! l'encouragea-t-il.

En guise de remerciement, elle lui offrit un sourire tout en dégageant quelques mèches rebelles qui se collaient à son front. Elle laissa échapper un long soupire avant de reprendre son souffle et de continuer, tentant tant bien que mal de suivre la cadence. Elle n'avait qu'une hâte : trouver les Grées et en finir au plus vite avec Méduse. Mais évidemment, ça ne pouvait pas être aussi facile.

— Regarde, je vois au loin quelqu'un, on pourra lui demander des renseignements !

Relevant la tête, regagnant un soupçon d'espoir, Persée plissa ses yeux pour mieux déterminer les contours de la personne dont parlait le soldat. Loin d'être un humain, il était beaucoup plus grand, elle supposa qu'il devait s'agir d'une créature divine, mais elle fut incapable de remettre un nom dessus. Accompagné de Eleon, tout deux accélérèrent l'allure, pressés de lui poser quelques questions, espérant en leur for intérieur qu'il acceptera d'y répondre. Arrivés non loin, Persée qui semblait s'y connaître le plus dans les mythes concernant les divinités, crut reconnaître Atlas à sa carrure. Géant, il les dépassait facilement, dominant les lieux.

— Bonjour, heu, excusez-moi, saviez-vous où nous pourrions trouver les Grées ?

Atlas les toisa, ne répondant rien. Il n'avait pas l'air enthousiaste, surtout en voyant Persée, qui se tenait non loin du soldat. Le titan lui lança un regard noir, comme pour lui signifier qu'il était au courant pour son père. Ce père qui l'avait condamné ici, suite à la défaite des Titans face aux Dieux.

— Pourquoi aiderai-je la progéniture de celui qui m'a contraint à porte le monde pour l'éternité ? questionna-t-il.

Persée n'osa le regarder en face. Elle ne devrait pas s'en vouloir des actes de son père, d'autant plus qu'elle l'avait appris récemment. Pourtant, elle ne pouvait pas s'empêcher de compatir pour Atlas, mais également toutes les personnes qui souffraient très certainement du courroux de Zeus.

— J'en conclu que vous nous n'indiquerez pas le chemin ? se hasarda tout de même Eleon avec un mince espoir.
— Tu comprends vite petit homme, maintenant passer votre chemin si vous ne voulez pas que je me venge de Zeus.

Les deux s'exécutèrent rapidement, pas plus avancée qu'auparavant. Toujours perdu, au milieu d'un endroit qui leur était inconnu, Persée avança, tenant la carte censée les guider vers les Grées. Selon celle-ci, ils devaient continuer encore tout droit et ils finiraient par arriver. Pourtant, la jeune fille ne semblait pas entièrement convaincue à l'inverse de son compagnon de route qui s'y fiait, faisant confiance au cadeau de Zeus.

— Regarde, on y est cette fois-ci et j'en suis sûr !

Eleon avait dit cette phrase avec une grande conviction tout en pointant du doigt un lieu fortifié par un rempart de rocher. Elles se trouvent forcément ici, il n'y avait pas d'autre solution. Ou alors, c'était le repère de Méduse. Chose qui cependant semblait fort peu probable. Persée ne se sentait pas en sécurité en franchissant les rochers aidée par son ami. Lui aussi semblait percevoir les ondes négatives qui s'émanaient du repère.

— Nous vous attendions, fille de Zeus, déclara une voix caverneuse.

Persée sentit tout son corps se raidir en l'entendant, comme si la personne pouvait transpercer son âme d'une simple phrase. Les deux amis s'approchèrent tout de même, contre leur grès, sous l'invitation des trois sœurs qui les attendaient en arc de cercle. Elles se disputaient l'unique œil afin de voir les invités.

— Savez-vous où se trouve Méduse ? demanda sur ses gardes Persée tandis que Eleon était prêt à dégainer son épée au moindre geste d'attaque.
— Pourquoi nous vous révèlerions l'antre de nos petites sœur ? Qu'avions-nous à y gagner ?
— La reconnaissance d'avoir sauvé la princesse Andromède ? tenta Eleon.
— Une vie contre une autre, voilà ce que vous aurez pour votre réponse. Il n'y a pas d'aveu sans sacrifice, vous devriez le savoir demi-déesse, expliqua la sœur qui possédait l'œil, ignorant la remarque du soldat.

Persée refusa. Il devait certainement y avoir un autre moyen de négocier avec les filles de Phorcys et Ceto. Se sacrifier pour une réponse comme si des vies n'étaient déjà pas assez en jeu actuellement.

Persée, leur œil, récupère-le, il te permettra de négocier.

Elle se trouvait être seule en compagnie de Eleon, pourtant elle perçut cette voix, différente de celle de son père. Plus féminine, plus douce. Elle se demandait même si elle n'appartenait pas à Athéna en personne, la déesse de la sagesse et de la guerre. Cependant, c'était vrai. L'œil était son unique solution pour avoir ses réponses. Les trois sœurs continuaient de se chamailler. Les analysant bien, la châtain attendit le meilleur moment avant de leur voler leur objet le plus précieux.

— Notre œil, sale voleuse, rend-le nous ! s'exclamèrent les Grées.
— Pas avant que vous nous ayez donné le repère de Méduse, répliqua-t-elle, une lueur de défi dans les yeux.
— Nous te l'avons dit, il faut le sacrifice d'une personne, sans ça tu n'auras aucune réponse et vous ne trouverez jamais le chemin sans notre aide.
— Bien, dans ce cas, si je jette l'œil c'est pas très grave ?

Comme elle s'en doutait, les sœurs ne mirent pas plus longtemps à coopérer. L'œil leur était si important qu'elles ne pouvaient le laisser disparaitre à jamais dans ces terres inhabitées. Elles étaient très proche de Eleon tout en décrivant la route à suivre, comme si elles s'apprêtaient à le garder, l'emprisonnant pour en faire leur futur repas.

— Attention fille de Zeus, si vous ne vous dépêchez pas, Poséidon lâchera ses monstres et détruira tout sur son passage. Jusqu'à présent, il a été très patient, mais même chez un dieu, elle a sa limite.

Tout en leur lançant l'œil, Persée s'empressa de tirer sur le bras d'Eleon afin qu'ils partent le plus vite possible de ce repère, reprenant ainsi leur route afin de rallier la grotte où réside Méduse et ses sœurs.

Persée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant