1. Apprendre à tourner la page

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Consigne : Imaginer la première phrase d'un roman puis la transmettre à son camarade qui en écrira la suite.

La valse des amants de saison était le titre d'un poème anonyme, alors pourquoi Guillaume avait-il l'impression de voir se dérouler, devant ses yeux, le récit connu d'une vie pas si étrangère ? Le destin avait l'air de bien se moquer de lui ces derniers temps. Le monde entier semblait vouloir lui rappeler cette histoire. Arriverait-il un jour à passer à autre chose ? A penser à autre chose ? Cinq longues années s'étaient écoulées, et pourtant, tout ça le hantait toujours. Il soupira et referma ce maudit recueil d'un coup sec, attirant tous les regards des personnes présentes sur lui. Il se leva en marmonnant des excuses puis il prit son sac et s'enfuit d'un pas rapide de la bibliothèque.

Écouteurs sur les oreilles, Guillaume marchait dans les rues de Paris, encore bondées malgré l'heure déjà bien avancée. Ces dernières étaient très joliment décorées de guirlandes lumineuses, signe que les fêtes de fin d'année approchaient à grands pas. Il détestait cette période de l'année. D'une part car il passait ces fêtes seul, la plupart du temps, d'une autre parce que cette période faisait remonter beaucoup de souvenirs à la surface. Souvenirs qu'il préférerait oublier.

Au détour d'un coin de rue, il passa devant un café littéraire, bondé de monde. Par curiosité, il s'arrêta devant la vitrine de celui-ci, voulant voir ce qu'il s'y tramait. Et c'est là qu'il comprit tous les signes que le destin semblait vouloir lui envoyer ces derniers temps, parce qu'il l'a vit. Elle était assise sur un tabouret, accompagnée de ses amies, un verre à la main, riant à gorge déployée. Vêtue d'un simple jean bleue et d'un pull basique en laine blanc, Guillaume ne pouvait s'empêcher de la trouver encore plus magnifique que dans ses souvenirs. Elle semblait rayonnante. En réalité, elle illuminait la pièce entière.

Mais Guillaume eut l'impression de recevoir un coup de massue sur la tête lorsqu'il vit un homme, arriver derrière elle, et embrasser le haut de son crâne. Emilia se retourna vers lui, son sourire s'agrandissant à la vue de ce parfait inconnu (aux yeux de Guillaume). Ce dernier n'était pas au bout de ses peines, puisque Emilia rapprocha son visage de celui du grand brun pour venir poser ses lèvres sur les siennes. Guillaume manqua de défaillir. Le monde autour de lui semblait ralentir, le temps de cet instant, qui lui brisait le cœur un peu plus que ce dernier ne l'était déjà. Emilia semblait plus heureuse que jamais alors que lui n'arrivait pas à passer à autre chose, même après cinq ans.

Sa gorge se noua, et rapidement, ses yeux s'embuèrent de larmes. Voir Emilia avec un autre homme lui brisait le cœur plus que de raison. Mais peut-être était-ce l'ultime signe, l'ultime sommation de la part du destin pour lui dire qu'il était temps de tourner la page, de commencer un nouveau chapitre de sa vie sans elle, même s'il éprouvait de grandes difficultés à imaginer cela possible. Et c'était compréhensible, il n'avait jamais connu personne d'autre qu'Emilia depuis qu'il avait dix-sept ans, aujourd'hui il en avait trente-deux. Dix ans de sa vie se résumait à Emilia. Dix longues années durant lesquelles il avait grandi et apprit à ses cotés. Dix années durant lesquelles elle avait toujours été là pour lui, dans les bons comme dans les mauvais moments. Et Dieu sait à quel point il étaient nombreux, ces mauvais moments.

Guillaume prit une grande inspiration et regarda une dernière fois l'amour de sa vie à travers la vitre. Elle ne l'avait pas remarqué et c'était tant mieux. Il murmura cette dernière phrase, signifiant qu'il était temps désormais :

- Au revoir Emilia.


Des maux et des motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant