10. Savoir dire stop

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J'ai besoin de prendre l'air, de quitter cet endroit, de m'éloigner d'Anthony, d'évacuer cette colère. Je n'en peux plus, je suis fatiguée, et j'ai l'impression d'étouffer.

– C'est bon, j'abandonne. Je me casse.

Je passe devant lui, furibonde, pour rejoindre les escaliers et aller chercher mon sac d'affaires dans sa chambre. Anthony est sur mes talons, scandant mon prénom. Je prends mon sac et fais le tour de la chambre pour réunir mes affaires. Il apparaît dans l'encadrement de la porte.

– Repose ça s'il te plaît, me demande-t-il d'un un ton calme.

Je ne réponds pas, continuant à faire ce que j'ai à faire. Une fois que j'ai tout, je le bouscule pour sortir de la chambre et je me rends dans la salle de bain pour réunir les affaires que j'avais installées un peu partout. Encore une fois, Anthony me suit.

– Cassie ça suffit ! s'exclame soudainement Anthony, se rapprochant de moi.

Il attrape mon sac et ma trousse de toilette, qu'il balance dans le couloir.

– Non mais ça va pas la tête !? je hurle, en le regardant droit dans les yeux.

– Au moins, j'ai ton attention. Est-ce qu'on peut discuter, tranquillement ?

– Certainement pas. J'en ai par dessus la tête de tes piteuses excuses. Je ne suis pas un jouet que l'on jette et que l'on reprend quand on en a envie. Et ne me dis pas que ce n'est pas ce que tu fais, parce que c'est faux ! C'est ce que tu fais tout le temps ! J'ai déjà été trop gentille à te pardonner ce genre de comportement, que tu as eus plusieurs fois à mon égard. Aujourd'hui, c'est la goutte de trop !

Je le bouscule une nouvelle fois pour récupérer ma trousse que je mets dans mon sac, puis je redescends les escaliers. Je traverse le salon, puis la cuisine, pour me retrouver dans la véranda. Bien évidemment, je ne parviens pas à mettre la main sur mes chaussures, qui ne sont pas à l'endroit où je les avais laissées. Cette perte de temps permet à Anthony de me rattraper, alors que de mon côté, je fouille dans le placard pour chercher ces fichus chaussures et mon manteau.

– Ton problème Cassie, c'est que dès que quelque chose ne va pas dans ton sens, tu te braques et tu fuis, plutôt que de discuter du problème !

– Ne commence même pas à rejeter l'entièreté de la faute sur moi, tu as ta part de responsabilité dans cette situation !

– Je ne dis pas le contraire ! Je sais que j'ai agi comme un abruti, mais je veux arranger les choses !

– C'est ce que tu me dis à chaque fois ! C'est toujours la même chose Anthony, on tourne en rond ! Tu fais une connerie, je le découvre, on se dispute, tu veux arranger les choses, les choses s'arrangent et, quelques temps plus tard, tu recommences !

Je mets enfin la main sur mes chaussures et mon manteau que j'enfile. Je fais demi-tour et chausse mes bottines, mais Anthony se poste devant la porte d'entrée, m'empêchant de passer.

– Je refuse que tu partes et qu'on laisse les choses en plan comme ça.

– Et moi je refuse de rester une minute de plus ici en ta présence, au risque de dire des choses que je ne pense pas, sous le coup de la colère.

Anthony soupire et me fixe, il semble tirailler.

– Quand reviens-tu ? il demande, inquiet.

– Je ne sais pas.

– Ce soir ?

– Non.

– Demain ?

– J'ai cours.

– Je peux passer te chercher en sortant ?

– Je bosse après.

– Je passe te chercher à la sortie du boulot alors, et tu dors ici ?

– Anthony, j'ai besoin de souffler.

– Pendant combien de temps ?

– Je n'en sais rien ! Quand je le sentirai !

Anthony baisse la tête et ses épaules s'affaissent. Après quelques secondes, il se redresse mais ne se décale pas du passage pour autant. Ses yeux s'ancrent aux miens, et il prend la parole avec une profonde sincérité qui me touche.

– Je ne veux pas te perdre.

Mon cœur se serre. Il est en train d'abattre sa dernière carte, il essaye de m'attendrir. Et je sais que s'il continue, je vais craquer.

– Alors réfléchis à tes actes et fais en sorte que cela ne se reproduise plus pendant ce laps de temps, s'il te plaît.

– C'est promis, il hoche la tête et tente un rapprochement.

Sa main droite agrippe ma hanche pour me rapprocher de lui. Je me laisse faire, sans pour autant répondre à son geste. Il finit par entourer ma taille de ses deux bras, son front se pose contre le mien, ne lâchant pas mon regard.

– Je t'aime Cassie.

Je ne réponds pas, je hoche juste la tête, sentant mes barrières commencer à tomber une à une.

– Il faut que j'y aille, je l'interromps.

– D'accord... il me lâche, à contre cœur.

J'attrape mon sac et mes clefs de voiture, puis je fais un pas vers la porte. Anthony se décale lentement, ne me lâchant toujours pas du regard, je peux l'entendre me supplier silencieusement de ne pas franchir le pas de cette porte et de rester. On peut lire et comprendre tellement de choses en un regard.

– Envoie-moi un message quand tu es arrivée s'il te plaît.

Je hoche la tête et la baisse avant de passer le pas de la porte pour me diriger rapidement vers ma voiture, de peur de changer d'avis et de rester dans ses bras. Je pose mes affaires côté passager et en fais le tour de la voiture pour aller côté conducteur. Avant d'ouvrir la portière, je relève la tête et jette un coup d'œil en direction d'Anthony, qui se tient les bras croisés contre l'encadrement de la porte. Nos regards s'entrechoquent, je lis dans le sien à quel point il est désolé. Je secoue la tête et monte dans ma voiture, puis je démarre et quitte le plus vite possible son allée.

Sur la route, ma playlist de chansons déprimantes me rend, sans surprise, encore plus triste. D'autant plus que le morceau qui se joue actuellement est celui de Taylor Swift, All too well, parlant d'une histoire d'amour entre deux personnes ayant plusieurs années d'écarts, et qui finissent, inévitablement, par se séparer. Je chante les paroles à tue-tête, en pleurant. J'ai l'air pathétique mais je n'en ai rien à faire. Crier les paroles de cette chanson, à laquelle je m'identifie énormément, est un moyen d'évacuer toute cette colère et cette tristesse en moi, et ça fait un bien fou.


Des maux et des motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant