21. Ma vie sans toi

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Consigne : Écrire une nouvelle en reprenant au moins un élément de ce tableau de David Hockney, intitulé Portrait of an Artist (Pool with Two Figures).

Cassie se baladait dans les allées du musée, sans vraiment porter grand intérêt aux œuvres qui s'y trouvaient. Aucune d'elles ne parvenaient à attirer son attention, à l'intriguer. En réalité, elle avait perdu tout intérêt pour quelconque divertissement depuis un bon moment, et elle avait beau se forcer à sortir, à faire des activités, à voir ses amis, rien ne semblait avoir de saveur désormais. Elle se demandait si cela serait définitif, ou si ce n'était que passager. Et si ce n'était que passager, combien de temps cela prendrait-il pour qu'elle guérisse de cette relation qui l'avait complètement dépouillée ? Cassie n'avait plus du tout confiance en elle (déjà qu'avant lui elle n'en avait pas beaucoup, cette dernière était maintenant réduite à néant), plus rien ne l'animait, toute sa joie de vivre avait disparu, elle qui était d'habitude si pétillante.

Soudain, ses yeux furent attirés par un tableau aux couleurs assez vives, elle se figea. C'est d'abord un sentiment de surprise qui la traversa, suivie de l'incompréhension, puis son cœur se serra et elle eut l'impression de manquer d'air. Elle se trouvait en face d'une peinture sur toile d'un certain David Hockney, intitulée Portrait d'un artiste, dont Cassie n'avait jamais entendu parler, autant l'artiste que l'œuvre. Pourtant, elle reconnaissait parfaitement le lieu dépeint. La piscine creusée, le carrelage désuet, ce paysage provençal qu'elle voyait tous les jours, c'était chez elle ! La coïncidence aurait pu s'arrêter là, et cela aurait été suffisant, mais la scène qui se jouait lui donnait une étrange impression de déjà-vu. Ce déjà-vu se transforma en un souvenir, souvenir dont elle ne gardait aucune trace de positif, car ce jour-là, tout son petit monde s'était écroulé alors qu'elle n'avait rien vu venir.

Un an plus tôt, Cassie effectuait des longueurs dans la piscine de ses parents. Il faisait incroyablement beau et chaud ce jour-là, peu étonnant pour une journée de juillet. Ses parents étaient en voyage à l'autre bout du continent, lui laissant la maison pour les deux mois. La jeune femme en était ravie, elle pouvait aller et venir quand cela lui chantait, inviter n'importe qui n'importe quand, c'était le rêve. Évidemment, elle en profitait surtout pour passer du temps avec son copain, Anthony, de dix ans son aîné, qu'elle ne pouvait voir qu'en cachette, car ses parents désapprouvaient leur relation, mais aussi parce que l'homme qu'elle aimait avait déjà quelqu'un dans sa vie.

Ils s'étaient rencontrés il y a quelques mois, dans une librairie. Cassie était venue à la lecture d'un auteur peu connu, et elle s'était retrouvée assise à côté d'Anthony. C'était une activité peu commune pour une jeune fille de dix-neuf ans que d'assister à des lectures, et c'était l'une des choses qui avait intrigué le jeune homme. Il avait tenté une approche à la fin de cette lecture, et ils avaient fini par en discuter pendant des heures autour de plusieurs café latte. Ces rendez-vous étaient devenus de plus en plus réguliers, ils avaient finalement échangé leurs numéros et, une chose en entraînant une autre, les sentiments s'en étaient mêlés. Ils savaient tous les deux que leur relation n'était pas correcte, ne serait-ce que vis-à-vis de la femme d'Anthony, mais ils ne pouvaient pas passer à coter de ce lien qui les unissait, si unique et spécial qu'aucun d'eux n'avaient jamais ressenti auparavant. Cassie aimait penser qu'ils étaient des âmes sœurs, et même si Anthony ne croyait pas à ce genre de chose, une part de lui ne pouvait s'empêcher de se faire la même réflexion.

Alors qu'elle remontait à la surface après une énième longueur, Cassie tomba nez à nez avec Anthony, posté debout au bord de la piscine, penché vers elle. La jeune fille sursauta, mais un sourire apparut sur son visage quand elle reconnut son petit copain.

– Hey, tu m'as fait peur ! lui avoua-t-elle en s'appuyant sur le bord.

– Il faut que je te parle, lui dit-il d'un ton grave.

Des maux et des motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant