Seul [Taekook]

5 - ouverture

Ce soir là il entre vêtu de noir. Ses baskets, sa veste, sa casquette, son jogging large ; on pourrai penser qu'il se cache, semblable à un idol désireux d'éviter les journalistes.

Son côté mystérieux le rend attirant. Mon attention entière s'attache à lui sans qu'elle puisse être perturbée dès le moment où il pénètre dans mon champs de vision, comme me plongeant dans un total état hypnotique.

Je sent les battements lents mais intenses de mon coeur qui résonnent dans ma poitrine, une sensation prenante, qui m'a incitée au pire tant de fois. Je le revois enfin.

Enfin.

Cela fait deux jours que je ne l'ai pas revu depuis que je l'ai suivit jusqu'à l'hôtel, depuis que j'ai appris son nom.

Ce dernier n'a pas arrêté de tourner encore et en encore dans mon esprit, chamboulant toute autre pensée s'imposant, la détruisant alors presque instantanément, ne leur laissant aucune chance, aucun espoir quand à leur importance devenue éphémère.

Son nom s'est répété, encore et encore.

Son visage s'est affiché devant mes yeux, un visage nommé, une envie nommée.

Je le revois désormais et, pour la première fois, il a un nom.

Mes envies ont un nom.

- Eh tu m'entends ?

Je reviens subitement dans le moment présent ; le son environnant atteint subitement mon ouïe jusque là comme inhibée, mon attention jusqu'alors absorbée par cet homme enivrant.

- On manque de serveurs, vas servir en salle.

Mon patron pousse mon épaule pour m'inciter à aller en renfort rapidement.

Il faut bien évidement que ce con m'envoie en salle maintenant qu'il arrive.

Je jette un regard noir à mon interlocuteur puis pose le chiffon jusque là en main pour me diriger à contre coeur vers la cuisine. Je croise un de mes collègues chargé d'assiettes de différents plats joliment dressés. L'odeur de viande caramélisée me monte rapidement au nez.

- Ah Taehyung super, y'a foule ce soir aide moi avec les plats !

Il adresse un rapide coup de tête en direction de la cuisine puis se précipite en salle d'une démarche assurée, zigzaguant de manière agile entre les tables.

Je remonte les manches de ma chemise noire, ajuste le col, rabat de ce geste automatique mes cheveux vers l'arrière puis attrape les assiettes dans la cuisines qui attendent d'être servies.

Je fais mine d'être concentré face à toutes ces personnes qui m'entourent, face à mon patron et mes collègues, mais lorsque je dépose les assiettes sur leurs tables respectives, face à leurs consommateurs, toute mon attention est portée sur Jungkook.

Je veux être près de lui, je veux que son attention soit tournée vers moi, seulement moi. Le fait d'être loin, à l'opposé, en salle alors qu'il est au bar, mais aussi qu'il est été servit par quelqu'un d'autre, tout cela me frustre. C'est l'un de mes collègues qui lui a apporté son habituel Sex on the Beach, c'est à l'un de mes collègues qu'il à adressé la parole, qu'il a porté son regard et auquel il a même peut-être adressé un sourire en étirant ses magnifiques lèvres.

La frustration qui s'empare de moi se transforme petit à petit en haine profonde, je prend de longues respirations discrètes, bataillant pour ne pas laisser percevoir mon agacement aux clients que je sert sur mon visage bien trop expressif.

- Jeune-homme est-ce que tout va bien ?

Et voilà, loupé.

Un homme de la cinquantaine d'année, assis à une table de quatre me regarde les yeux ronds. Je suis en train de le débarrasser de sa coupelle de glace vide sans même m'en rendre compte. Il semble dubitatif, et bien trop curieux à mon gout. Qu'est ce qui m'a trahi ? Ma frustration se fait-elle tant ressentir ? Cela ne m'étonnerai pas.