3 - invisible

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Une vibration incessante que je ressens tout d'abord comme venant d'un rêve se forme petit à petit dans le monde réel. Mes yeux s'ouvrent difficilement, les sourcils froncés je grogne, marmonnant dans mon oreiller, souhaitant me rendormir au plus vite. Seulement, la sonnerie résonne encore et encore, me faisant revenir malgré moi à la réalité.

C'est à ce moment là que je comprend que ce bruit vient de mon téléphone de travail ; personne n'essaye jamais de me joindre sur mon portable personnel, et encore moins à une heure pareille.

Je me contraint de me lever, difficilement, le visage crispé, les cheveux en bataille; je n'ai pas le choix. Je voit flou et le seul fait de me diriger jusqu'au salon est une épreuve en elle-même, je marche comme un zombie, menaçant de m'effondrer de sommeil à tout moment, la tête lourde, en me prenant par la même occasion le tissus de mon large pantalon de pyjama dans les pieds.

Cette sensation d'endormissement ne s'est pas faite ressentir en moi depuis bien des années et pour cause, je ne travaille que la nuit, je n'ai aucunement besoin de me lever la journée ; les grasses matinées, si l'on peut appeler ça lorsque l'on se lève à 16h, font parties de mon quotidien. Le fait d'être réveillé par mon téléphone de travail est atypique, c'est pourquoi je ne perd pas plus de temps pour aller décrocher ; il doit y avoir un problème.

Je met un moment avant de l'attraper au fin fond de mon sac, comportant toute sortes de vêtements de sport. Il est dans son accoutumée cachette, accompagné des liasses de billets. Mon argent "sale" précieusement gardé, même si je n'en est aucunement besoin, ils sont comme un trophée, chacun me rappelant les actions réalisées pour les recevoir. Ils sont comme un moyen de voyager dans mon passé rien qu'en les observant, similaires à des photos, mais indéchiffrables pour les autres.

Mon téléphone à touches s'arrête de sonner au moment où je met la main dessus, lorsque je regarde le petit écran je constate un grand nombre d'appels manqués ; c'est mon Gérant lui même qui à essayé de me contacter. Mon corps, chamboulé par cette situation inattendue se réveille instantanément. Je m'empresse sans attendre de le rappeler. Il décroche dans les secondes qui suivent, d'une voix indisposée.

"Allô."

- Bonjour, vous avez essayé de me joindre.

Il ne réagit pas tout de suite, laissant un temps de pause. Je peux entendre du bruit derrière lui laissant supposer qu'il n'est pas seul ; dans un bistrot peut-être, sûrement, il n'est jamais seul.

"Pourquoi n'as tu pas répondu."

Le ton de sa voix se fait détachée, comme si il attendait de voir mon comportement pour adopter une réaction adaptée.

- Je viens de voir maintenant que vous avez essayé de me joindre.

"Je t'appelle depuis hier."

Son ton est grave, plein de reproches. J'inspire silencieusement, camouflant mon agacement.

- Oui, veuillez m'excuser.

"Que ça ne se reproduise plus" enchaîne t-il sèchement.

Je ne lui répond pas, attendant la raison de son appel.

Le fait d'être sous les ordres d'un supérieur hiérarchique dans le milieu illégal est quelque chose de bien plus contraignant que dans le milieu du travail "sain". C'est un supérieur constant, continuellement présent même lorsque je ne travaille pas. Bien que je fasse partie du cercle proche de mon patron, celui-ci n'hésite pas à remettre les points sur les "i" quand il considère qu'il y en a besoin, et il a bien raison, même si je ne supporte pas ça lorsque cela me concerne, même si sa manière de faire n'a rien de juste et passe parfois par une punition physique irréversible, à la limite de la mort. C'est dans ce genre de punitions que j'interviens.

Seul [Taekook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant