Chapitre 9

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Elle ravala la douleur qu'elle avait à son pied pour commencer une valse avec l'inconnu qui venait de la sauver des griffes de son abominable tante.

— Bonsoir Mademoiselle, je suis Antoine de Maison-Blanche. C'est la première fois que je vous vois à Versailles.

Gabrielle lui sourit avec grâce et le salua.

— Bonsoir Monsieur. Je suis arrivée il y a trois jours à Versailles, c'est mon premier bal ici. Je m'appelle Gabrielle de Saint-Just.

Le jeune homme haussa un sourcil, étonné.

— Mademoiselle de Saint-Just, je suis ravi de faire votre connaissance. J'ai entendu dire que vous alliez arriver sous peu par votre père, mais je ne pensais pas vous rencontrer ici.

— Par mon père ?

Gabrielle crispa sa main sur l'épaule de Monsieur de Maison-Blanche, son pied la faisait atrocement souffrir.

— Mademoiselle ? Vous sentez-vous bien ?

Antoine cessa de danser et lui tendit son bras. Il l'éloigna du parquet réservé aux couples de danseurs pour l'aider à s'installer dans un confortable fauteuil.

— Merci. Je me suis simplement tordu la cheville il y a une heure, ce n'est rien de grave.

Le jeune homme hocha la tête avec un sourire de compassion, les deux jeunes gens se regardèrent quelques secondes. Antoine de Maison-Blanche devait être âgé de vingt ou vingt-cinq ans, sans être particulièrement beau, il avait un charme incroyable auquel Gabrielle ne put rester indifférente. Elle toussota en baissant les yeux et relança la conversation.

— Vous connaissiez donc mon père ?

— Oui, nous nous sommes rencontrés aux Amériques il y a quelques années. J'avais décidé de partir à l'aventure, de quitter la cour de Versailles pour découvrir de nouvelles choses et je suis devenu très ami avec votre père pour qui je travaillais.

— Qu'est-ce qui vous a fait revenir en France ?

Antoine rit légèrement.

— La nécessité de me marier. Je suis fils unique et mon père se fait vieux. En tant qu'héritier de son titre et de son nom, je me dois de trouver une épouse digne de ce nom.

Le mariage, toujours le mariage.

— Vous cherchez donc de potentielles prétendantes en parcourant les salons versaillais ?

— A vrai dire, je venais aujourd'hui pour saluer Mademoiselle du Roscoat, votre cousine si je ne me trompe pas.

— Aliénor ? La connaissez-vous ?

— Oui, nous sommes follement amoureux l'un de l'autre.

Gabrielle resta sceptique quelques secondes. Comment diable un homme aussi sympathique avait-il pu tomber amoureux de cette harpie ? Elle secoua la tête, incrédule.

— Mais Aliénor est fiancée, ne le savez-vous pas ?

— Avec Monsieur de Montauban ? Ce ne sont que des foutaises, il ne l'épousera jamais.

Gabrielle nota mentalement le nom qu'il venait de dire. Maxime de Montauban. C'était donc lui, le prétendu fiancé d'Aliénor. Elle s'embrouillait entre tous les noms qu'elle avait appris depuis le début de la soirée et commençait à être un peu perdue.

— Comment savez-vous que ce sont des foutaises ?

— J'ai rencontré Monsieur du Roscoat, le père d'Aliénor, aux Amériques lui aussi. Il a investi toute sa fortune dans un projet qui n'a pas fonctionné. Il a tout perdu. Aliénor n'a pas de dot et la richesse qu'elle affiche n'est rien d'autre qu'un mensonge. Monsieur de Montauban le sait, et il n'épousera pas Mademoiselle du Roscoat si elle n'a pas de dot.

Encore une valseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant