Chapitre 5 - Rose

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Après encore une heure de route, nous nous garons enfin devant un grand manoir, dans le sud de l'Italie. Impossible pour moi de donner le lieu exact où nous nous trouvons ; j'en sais foutre rien. La bâtisse ne ressemble en rien à celle dans laquelle j'ai dormi la nuit dernière ; elle a un style beaucoup plus classique.

Milos m'a prévenue que les lieux sont habités par un proche de la famille, une sorte d'oncle, si j'ai bien compris. J'ai aussi compris qu'il ne faisait pas confiance à cette personne. Il est censé ne passer qu'une soirée avec nous avant de partir en voyage d'affaires, donc, pour ne pas lui révéler ma récente arrivée dans la famille, ce soir je serais dans l'obligation de répondre sous le nom de Julia Rodriguez. Il n'a bien sûr pas manqué de me menacer : si je tente de révéler ma réelle identité ou si j'essaye de fuir, j'en paierai les conséquences. Et que si cela ne suffit pas à m'en dissuader, il a promis de les faire payer à Luis aussi.

Oui, il a bien utilisé le début d'attachement que j'ai développé pour son ami pour me dissuader de toute action, et le pire ? Ça a très bien fonctionné. Je ne ferai rien pour compromettre son plan pour les quarante-huit prochaines heures, au péril de Luis. Il me reste un mois avant la date fatidique de mes vingt-cinq ans ; j'ai encore un mois pour agir. Perdre une soirée ne changera rien.

Quand je pose enfin un pied dehors de la voiture, Milos m'attrape par le bras pour me tirer vers la grande entrée, où il ne prend bien sûr pas le temps de sonner. La décoration intérieure est très épurée, mais quelque chose me fait me sentir mal à l'aise ici. La maison dégage une aura malsaine, quelque chose de dangereux. La main qui se pose dans mon dos me fait lâcher un petit cri de peur et un sursaut me plaque contre Milos, qui, sans s'en préoccuper, se tourne vers l'étranger.

— Milos, mon neveu ! Tu ne m'as pas prévenu que tu amenais une si belle créature avec toi...

— Oncle Oscar, je te présente Julia, ma fiancée.

La pression qu'il exerce sur mon bras coupe toute envie de le contredire. Ok, j'ai compris, je la ferme.

— Ravie de faire votre connaissance. Il prend ma main et y dépose un baiser baveux sur le dos. Ce mec a un truc qui tourne pas rond chez lui, je le sens et je n'aime pas ça.

— Vous êtes vraiment ravissante. Je ne savais pas que mon neveu avait si bon goût en termes de femmes...

Je déglutis bruyamment quand la poigne du blond me fait reculer d'un pas, me libérant de l'emprise de son oncle.

— Oscar, nous allons dans notre chambre.

— Très bien ! Très bonne idée ! Mais soyez prêts pour dix-neuf heures, des amis à moi viennent participer au jeu. J'espère que tu en es, Milos.

— Bien évidemment, mais je serais seul. Julia est fatiguée, elle restera à l'étage.

— C'est hors de question, elle pourrait s'avérer être utile pour toi, mon enfant.

Je suis une nouvelle fois tirée en arrière par la poigne de Milos, celle-ci s'étant resserrée à l'évocation de ce jeu.

**

La chambre face à moi est magnifique, dans des tons très clairs, beaucoup plus que le reste de la maison. Mais la chose qui me crispe instantanément est le seul lit placé au centre de la pièce. C'est HORS DE QUESTION que je dorme dans le même lit que lui.

— Où vas-tu dormir ? Pour toute réponse, il désigne le côté droit du lit. Ok, très bien, mais moi ? Où est-ce que je dors alors ?

J'hésite une seconde à lui poser la question, surtout en le voyant si concentré à écrire son message, mais je me souviens ensuite que mon intervention le fera très probablement chier, donc mon hésitation disparaît très vite.

Ta part d'ombre | T.1 ( Réécriture )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant