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«Ne crains rien, car je suis avec toi; Ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu; Je te fortifie, je viens à ton secours, Je te soutiens de ma droite triomphante.»

***

Je n'avais jamais vécu d'enterrement avant ce jour.

Je ne mettais jamais retrouvé face à un cercueil auparavant.

Voir de mes propres yeux un corps sans vie m'horrifiais. La personne face à moi ne respirait plus, son teint était terne, son corps était maigre et ses yeux fermés.

Je ferma mes yeux à mon tour afin de me rappeler de sa voix. Sa voix qui me berçait lorsque j'avais peur étant petite. Sa voix qui me chantait des louanges la nuit avant de dormir.

Cependant, cette voix, je ne l'entendrais plus jamais de toute de ma vie car mon père était mort.

Son corps inerte reposait devant moi.

Quelqu'un près de moi se mit à pleurer à chaudes larmes, c'était ma mère.
Elle venait de perdre son mari, son compagnon, son meilleur ami. Elle souffrait et je souffrais avec elle.

Nos cœurs suppliaient à notre créateur de nous le rendre. Je n'arrivais à pas comprendre comment Dieu pouvait nous laisser souffrir autant.

Pourquoi lui ?

Pourquoi maintenant ?

La voix du pasteur me fit sortir de mes pensées. Il chantait "je te donne tout"  une des louanges préférées de mon père. 

Les pleures de ma mère s'intensifia tandis que mes yeux s'embrumèrent. Mon frère se rapprocha de nous, puis entoura ses bras autour du corps de notre mère. Elle déposa sa tête sur ses épaules et continua de pleurer en silence.

Moi, je regardais la scène sans aucun mot.
La musique chantée par les chantres me berçait. Je n'avais pas la force de les rejoindre. Je n'avais aucun mot pour les consoler, pour apaiser notre souffrance.

Je n'arrivais plus à communiquer, à parler avec eux depuis la mort de mon père. Mon frère et moi étions en froid à cause de ça d'ailleurs. Il trouvait que je n'étais pas assez présente pour soutenir la peine et le deuil de notre mère.

Cependant, je faisais aussi mon deuil à ma manière.

Il voulait que j'exprime ma douleur, que je lui parle, qu'on communique. Mais c'était impossible pour moi. Je n'y arrivais pas.

Une voix m'appela mais je continua à penser à mon père jusqu'à ce que ma petite cousine tape sur mon épaule.

- Jemima, le pasteur te parle depuis tout à l'heure me dit-elle. Il te demande de venir devant pour lire ton texte.

- Oh, dis-je en relevant la tête. Je...je ne sais pas si j'y arriverai. Je n'en ai pas la force.

- Ne t'en fais pas, si tu n'y arrive pas je le lirais à ta place, déclara-t-elle simplement, ce qui me fit chaud au cœur.

Je me mis à regarder le pasteur qui me souriait. Son sourire était rassurant, ça me mît en confiance. Je me leva de mon siège de manière incertaine et me dirigea vers le pasteur.

Je sentais les regards sur mon dos, sûrement à cause du temps que j'avais mis avant de constater que le pasteur m'avait appelé.

Je monta les trois marches qui permettaient d'être surélevée par rapport aux autres.

Ma gorge se serra et je vis le pasteur ouvrir ses bras afin de m'accueillir à l'intérieur. Je posa ma tête sur ses épaules pendant un court instant.

Ce geste réchauffa tout mon corps. Les larmes montèrent une nouvelle fois sans tomber pour autant.

Je leva ma tête et vis ma famille paternel, quelques amis de mon père ainsi que certains de ses collègues.

Je racla ma gorge avant de baisser mes yeux sur le papier que je venais de sortir de ma poche. Ma gorge se noua avant de commencer à lire le texte que j'avais préparer quelques jours auparavant.

- Papa, tu...tu étais mon meilleur ami. Tu étais mon confident. Tu étais mon exemple. Tu as toujours été là pour moi dans les bons comme dans les mauvais moments. Tu avais toujours les bons mots, les bonnes paroles pour me rassurer. Les souvenirs se bousculent dans ma tête depuis que j'ai appris ta mort. Je me rappelle les soirées de mon enfance lorsque j'avais peur à cause de mes cauchemars, tu me rassurais comme tu le pouvais. Tu me chantonnais des louanges avec ta voix grave:

« Si la mer se déchaîne
Si le vent souffle fort
Si la barque t'entraîne
N'aie pas peur de la mort »

Je me souviens des versets que je ne comprenais pas et que tu m'expliquais à chaque fois qu'on lisait la bible ensemble.
Je me souviens des soirées films qu'on passait ensemble. On se goinfrait de tes bonbons préférés, les Haribo Miami et de chocolat fourré au caramel.
Je me souviens de tellement de chose que je ne pourrais pas tout énumérer.
Tu me manques, tu me manques beaucoup papa.

Je releva mes yeux vers ceux qui étaient en train de m'écouter. Ma gorge se serra et une bouffée de chaleur encercla tout mon corps.

- Je...je n'arrive pas à croire que tu ne soit plus là dis-je les yeux humides de larmes. Je n'imagine pas ma vie sans toi. Mes yeux se baissèrent sur le visage de mon père qui était installé dans son cercueil. Sache que mon amour pour toi sera éternel. Que tu étais... que tu es mon père et que je t'aime pour toujours.

Je vis pendant une demi seconde le visage de mon père s'illuminer et un sourire étirer ses lèvres. Je savais que je venais de m'imaginer cette scène mais elle me procura un immense bonheur.

J'avais comme l'impression que ce sourire était un message. Comme si il m'annonçait qu'il me surveillait là où il était. Qu'il serait toujours là pour moi.

Je sentis quelques choses de froid couler sur mes joues chaudes à cause des bouffées de chaleurs que je ressentais depuis que je lisais mon texte.

C'était des larmes.

Oui, des larmes.

Je pleurais. Depuis le début de l'enterrement j'évitais de pleurer. Cependant, voir cette scène avait fait frémir mon corps entier.

Une, deux puis trois coulèrent. Je sentis une marre descendre le long de mes deux joues. Je n'essayais pas de les stopper. Je voulais juste extérioriser mes émotions pour une fois.

Le pasteur s'approcha de moi, je le vis soupirer de tristesse avant de me reprendre dans ses bras pendant un instant.

Je descendis l'estrade qui nous séparait du public avant de me diriger vers mon siège. Mes mains essuyaient mes joues vélocement à plusieurs reprises.

Le pasteur parlait mais je n'écoutais pas un mot de ce qu'il disait. Il était sûrement en train de conclure la «cérémonie».  Mon regard était lointain. Je repensais à mon père et à la scène que je venais de voir quelques secondes avant.

Il me manquait terriblement et ce n'était que le début.

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Voilà mon premier chapitre ! J'espère qu'il vous a plu. Vous comprendrez mieux les relations entre les personnages plus tard. Ça ne sera pas toujours aussi triste.
I Hope !
En attendant, God bless you.

Ésaie 41.10

Jemima - des ténèbres à la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant