1. Aspen: Les plus forts d'entre nous

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Cinq ans et sept mois avant Cami.

Je frissonne, ce n'est pas ma première venue dans le camp caché dans les montagnes, mais je reconnais que cette année le froid est particulièrement poignant. Je remercie ma génétique de me permettre un long pelage épais qui me tient chaud par une température pareille. Quand je vois les futurs héritiers venant des meutes des vallons ou de la rive qui frôle les limites du sud, grelottant et incapable de se battre correctement, je me dis que j'ai de la chance. Les pauvres ne quittent pas les abris qui les protègent du vent. Le vieux loup solitaire qui surveille le camp accueille les bourrasques de neige et la morsure du vent comme une bénédiction.

On dit que son clan en entier a été éradiqué et qu'il ne reste que lui. Personne n'a cependant osé lui demander si cela était vrai. On le voit souvent le matin médité à la limite d'une falaise entourant le camp ou à la recherche de racines dont on ignore les vertus. Plusieurs l'appellent le vieux fou, mais au fond, la folie n'est qu'une des nombreuses formes du génie. À moins bien sûr qu'il ne soit complètement sénile...

— Héritière des plaines, à vous ! 

Jace s'est exprimé suffisamment fort, la louve en question serre les paupières en entendant son titre. Elle regarde autour d'elle en espérant que le bras droit de mon père sera clément et choisira un autre loup pour braver le froid. Je connais suffisamment cet homme pour dire qu'il n'a aucune intention de la ménager, elle ou qui que ce soit d'autre. Jace est le bêta de ma meute qui a été choisi pour diriger le camp. Il a été reconnu comme l'un des meilleurs combattants des territoires nordiques et de ce fait a eu les honneurs de former au combat les futurs dirigeants des meutes nordistes. Ce loup est l'un des plus redoutables de ma connaissance et ne recule devant rien. Je ne suis nullement surpris de le voir se tenir bien droit au milieu de l'arène de glace ne laissant rien paraître du froid alors que d'autres se sont réfugiés à l'entrée de la grotte où le vent est beaucoup moins violent.

Normalement, lorsque la température devient difficile, nous nous entraînons dans les cavernes des montagnes, mais semble-t-il que nous avons été trop gâtés. Nos mentors ont cru bon corser les choses en nous forçant à nous battre au froid sur un sol glissant, probablement pour nous punir d'avoir pris nos dernières leçons à la légère. Le bêta de mon clan s'impatiente.

— Maintenant !

L'héritière des plaines soupire avant de laisser tomber derrière elle, la lourde couverture qui la protégeait du froid. Elle avance en se frottant les bras. Le clan des plaines se trouve au milieu d'une vallée et le climat y est beaucoup moins capricieux contrairement au territoire de la meute polaire ou des montagnes. Oria entre autres s'est très bien débrouillée lors de son combat. Sa mère peut être très fière de ses accomplissements et je compte bien faire encore mieux.

À peine met-elle les pieds sur la glace qu'elle perd l'équilibre et manque de peu de s'écraser au sol. Quelques-uns de mes compères s'esclaffent alors que d'autres qui ont déjà combattu secouent la tête. Elle n'est pas la première à perdre l'équilibre, mais je crois avoir une petite idée pour prendre le dessus. Oria, l'héritière des montagnes se penche vers moi.

— La glace est un coup bas même venant d'eux.

Au même moment, le combat débute. Jace et la jeune alpha prennent leur forme animale. La petite taille de la louve se montre un désavantage évident avec les bourrasques de vent qui la pousse lentement sur la glace. Elle charge en premier et me confirme ce que je savais déjà, la glace rend tout assaut hautement difficile. Jace s'écrase sur le ventre et la louve dérape dans son atterrissage sur la glace et se cogne brutalement contre une pierre sur le côté de l'arène. Elle secoue la tête visiblement sonnée du coup. Jace attend patiemment et son expression ennuyée fait rager l'héritière qui grogne. Elle adopte une nouvelle stratégie pour atteindre le bêta. Elle se campe sur ses hanches pour être plus stable et fonce sur Jace à un rythme plus lent qui lui permet de maintenir son équilibre sur ses pattes. Oria avait adopté cette posture un peu plus tôt et cela lui avait procuré un certain équilibre. Je lui souris avant de m'adresser à ma voisine.

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