~ Chapitre 1 ~

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Je n'ai pas besoin d'ouvrir les yeux pour savoir que l'aube est sur le point de se lever. J'ignore comment mon corps fonctionne, mais depuis que je suis gamin, je me réveille toujours avant que les rayons ne pointent le bout de leur nez. Je me souviens que ça rendait ma mère folle, parce que je les rejoignais toujours, elle et mon père, dans leur lit parce que je m'ennuyais. Au fil des années, j'ai trouvé d'autres choses à faire et lorsque j'ai eu mon appart, ça n'a plus gêné personne. Sauf, bien sûr, mes colocs, Romance et Jop, mais bon, depuis que ce dernier est maqué, il ne reste plus que le poète et moi. J'aime bien le faire chier avec ce surnom, parce que clairement, Ronald Mance est tout sauf ça. C'est un connard avec les filles, mais il est toujours honnête.

Enfin bref, je balaie mon pote de mon cerveau pour me concentrer sur le corps chaud qui se trouve à mes côtés.

Fais chier !

La nana que je me suis tapée hier soir est encore dans mon pieux. J'ai horreur quand ça arrive, parce qu'après, Mance n'arrête pas de me faire chier. Donc, afin d'éviter que mon pote me tombe dessus, je quitte silencieusement mon lit et file vers la douche pour me décrasser. Je frotte mon corps pour retirer le parfum de la fille et l'odeur de sexe qui me colle à la peau. Une fois propre, je constate que mon coup d'un soir n'est toujours pas réveillé, alors je décide de me barrer sans un regard en arrière.

Muni de mon casque, je me dirige vers ma moto, une Harley Street 750. Une véritable beauté avec son réservoir peint en vert forêt et personnalisé avec l'emblème des Nyx's Sinners. J'en ai chié pour l'avoir cette bécane, mais chaque goutte de sueur en valait la peine. La preuve, presque cinq ans plus tard, elle est toujours là et n'arbore aucune égratignure. Celle-là, c'est mon bébé et celui qui y touche, je le démonte. Règle numéro un...ne jamais toucher à ma bécane.

Installé derrière le guidon, je fais ronronner le moteur avant de me mettre en route pour le club. Aujourd'hui, nous avons une messe et je n'ai pas intérêt à être en retard. Le Prez déteste ça, tout comme mon vieux, d'ailleurs. Campbell Harris est le Tail Gunner des Sinners depuis qu'il a quitté l'armée, il y a de ça, presque trente ans, et il est toujours fidèle au poste. C'est un exemple pour moi et j'espère réellement qu'un jour, j'aurais la même vie que lui, mais en attendant, je n'en suis pas là. Je me gare sur le parking du MC et salue Arcas et Cécrops qui sont déjà debout... ou pas encore couché, on ne sait jamais avec ces deux-là. Ils sont comme cul et chemise et il est assez rare de les voir séparés. Ils ont beau avoir des régulières et des gosses, je ne pense pas qu'ils en aient réellement quelque chose à faire. Certains, ne sont juste pas fait pour la famille, ça arrive.

Je me dirige vers la cuisine, où je suis certain de découvrir mon petit frère en compagnie de sa meuf et de Hendrix. Ces trois-là, ce sont de véritables mousquetaires, même s'il y a eu des hauts et des bas. Aujourd'hui, tout ça semble être derrière eux et s'ils sont heureux comme ça, tant mieux pour eux. Comme je l'avais prévu, je découvre mon cadet derrière les fourneaux, les écouteurs vissés dans les oreilles. On a beau se ressembler, lui et moi avons quelques différences, notamment en ce qui concerne nos yeux. Si mon cadet à hériter des iris ambrés de mon père, quant à moi, j'ai eu le droit à un parfait mélange de mes deux parents. J'avoue qu'avoir les yeux vairons à certains avantages, notamment celui de charmer les nanas et de ne pas rentrer seul le soir.

Je m'approche de mon frangin et frotte son crâne jusqu'à ce qu'il gronde et m'insulte.

— Putain, Nox, tu fais chier ! jure-t-il en massant son cuir chevelu.

— Où sont tes acolytes ? demandé-je en piquant une pomme pour mordre dedans.

— Ils dorment.

— Dure soirée ?

— On peut dire ça, Hendrix était en crise.

Drix est le petit dernier de Rule, l'ancien sergent d'armes, et de sa régulière, Presley. Il est atteint de bipolarité, ce qui fait qu'il est régulièrement sujet à des accès de colère ou d'abandon total. Je ne compte plus le nombre de fois où mon frère a dû faire le mur pour aller le chercher je-ne-sais-où. Heureusement, les crises semblent s'être un peu calmées depuis qu'Ellie est de retour dans leur vie.

— Merde, et ça va ? questionné-je, soucieux.

Il hausse les épaules en déposant un énième pancake dans l'assiette. Cuisiner l'a toujours apaisé, donc je ne suis pas surpris qu'il y ait une tonne de bouffe déjà prête sur le plan de travail.

Comme je sais qu'il ne dira rien de plus, je fais bifurquer la discussion sur les résultats sportifs du football. Nous ne sommes pas à fond dessus, mais c'est un sujet de conversation sans risque.

Le MC se réveille doucement, nous sommes rejoints par divers membres, mais ce qui me surprend le plus c'est de découvrir Callie débarquer dans la cuisine. Calliope est la fille unique de Ax et il fut un temps où je croyais être tombé sous son charme, mais bon, j'avais douze piges, donc rien de bien sérieux. D'ailleurs, à l'époque, j'avais les hormones en ébullitions et je bandais pour n'importe quelle nana. Pas très classe, je sais, mais bon, je ne me referai pas et puis, maintenant, je la considère plus comme petite sœur. Même si techniquement, elle est plus vieille que moi.

Pour en revenir à sa présence au club, c'est assez rare de la voir dans le coin. Elle bosse au musée de Paléontologie de Provo, au sud-est de Salt Lake City. Je crois même qu'aux dernières nouvelles, elle était en couple avec l'un de ses pinces-culs avec lesquels elle travaille, mais vu ses yeux rougis, ça ne semble plus être d'actualité.

— Elle est arrivée, hier soir, déclare mon frère qui a suivi mon regard jusqu'à la fille du Prez.

— Tu sais pourquoi elle est là ?

— Nope, ce ne sont pas mes affaires, j'ai bien assez de trucs à régler.

Pas faux.

Je termine ma pomme et jette le trognon dans le bac à déchets vert. Le recyclage, ce n'est vraiment pas mon truc, mais si ma mère me voit le mettre dans la poubelle normale, j'en ai pour deux heures de sermons. Et je n'ai pas le temps pour ça. Je quitte la cuisine pour rejoindre l'extérieur du bâtiment et m'installe sur une chaise en plastique avant de sortir ma cigarette électronique. Je la coince entre mes lèvres et vapote tranquillement, avant de me laisser aller contre le dossier. Les yeux clos, je fume en silence jusqu'à ce qu'un raclement de gorge me pousse à ouvrir les paupières.

— Je croyais que tu avais arrêté, me sermonne mon père en s'installant à côté de moi.

— J'arrêterai quand tu arrêteras, contré-je.

Les épaules de mon vieux se secouent quand il ricane.

— Pas faux, gamin.

— Où est maman ?

— Avec tes tantes, dit-il en me piquant ma vapote.

— Pour Callie ?

— Tu es au courant ?

— Non, mais je l'ai vue dans la cuisine, tout à l'heure. Qu'est-ce qui se passe ?

— À ton avis, j'ai dû retenir Ax pour qu'il n'aille pas exploser le nez de ce petit con.

C'est à mon tour de rire en imaginant clairement la tronche du Prez quand il a découvert la tête de sa fille. C'est son joyau et personne ne lui fait de mal impunément. Du coup, je ne serais pas surpris si, avec Jop, on est de corvée pour aller rendre une petite visite au pince-cul. Généralement, il nous envoie, parce qu'on est doué pour l'intimidation. Enfin surtout Jop et sa gueule de tueur. Il suffit d'un regard dans sa direction pour que les plus téméraires plient les genoux et se pissent dessus. Les coups, c'est assez rare avec Jop, mais ça n'empêche pas que les fois où c'est arrivé, Calliope tirait une sacrée gueule. Elle était tellement en colère qu'elle a refusé de nous parler pendant un mois, et ce, même si c'était les ordres de son père. 

Nyx's Sinners - 6 - Lennox [SOUS CONTRAT D'ÉDITION] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant