Chapitre 1

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Chapitre 1

"Devant lui s'étendait à perte de vue les prairies verdoyantes baignées par le soleil de l'Ouest sauvage, ondulant légèrement au gré des vents tel la marée s'échouant sur la plage. Il se trouvait au beau milieu d'un spectacle de verdure, minuscule face à l'immensité de la nature tout autour de lui. Jamais au cours de ses voyages il... "

Dionor referma doucement son livre avant de fixer son regard au travers de la fenêtre. Au loin, le panneau publicitaire d'une Trade Tower passait inlassablement la bande-annonce du dernier jeu vidéo créé par Global Ocean, illuminant de ses couleurs artificielles les façades grisâtres et tristes du monde de béton aux alentours. Il entendit quelqu'un entrer discrètement dans sa chambre mais ne s'enquit même pas de l'identité de la personne, se contentant d'observer l'aurore matinale en silence, l'une des rares choses qu'il appréciait encore regarder quand tout autour de lui il n'y avait que le paysage urbain, oppressant et angoissant.

-Mr. Verde, le Dr.Greene viendra vous rendre visite d'un moment à l'autre.

Après avoir dit ce qu'on lui avait demandé, l'infirmière resta plus de temps que nécessaire à l'entrée de la chambre du patient, un sourire confiant sur les lèvres. Ça y est, c'était le moment qu'elle attendait depuis des semaines.

Cela faisait un peu plus de deux mois qu'elle était rentrée dans dans le service de soins de cet hôpital renommé, tout juste après avoir réussi à décrocher une recommandation dans son ancien lieu de travail. Et aujourd'hui, c'était la première fois qu'elle avait été autorisée à exercer ses fonctions au quatrième étage de l'édifice qui était pour le moins particulier. En effet celui-ci réunissait les personnalités les plus importantes d'Europe en plus d'excellentes technologies de la médecine contemporaine. Dire qu'elle était heureuse d'être là était un euphémisme, en réalité elle jubilait littéralement. C'allait enfin être son temps de briller.

Toujours le même sourire confiant aux lèvres, elle patienta. Une, deux, cinq minutes s'écoulèrent sans que rien ne se passe. La jeune femme fronça les sourcils, ce n'était pas censé se passer comme ça. Rapidement, elle replaça quelques mèches de ses cheveux clairs avant de se racler doucement la gorge, un sourire factice étirant ses traits.

Et elle attendit de nouveau. Longtemps. Enfin trop longtemps à son goût. Ses joues se pourprèrent d'un rouge prononcé au fil des secondes, la colère se mêlant étrangement à l'humiliation qu'elle continuait de subir. Le jeune homme assit en tailleur sur son lit devant elle ne daignait même pas lui adresser un regard, continuant de l'ignorer superbement en feignant probablement de regarder le paysage.

N'y tenant plus, elle se retourna vivement avant de refermer sèchement la porte derrière elle, le bruit du claquement violent de celle-ci venant accompagner celui frénétique de ses talons hauts contre le sol.

Elle emprunta un ascenseur pour descendre deux étages plus bas puis se dirigea presque de façon instinctive entre les allées et les couloirs d'un blanc ennuyant et monotone, ralentissant son allure et amenuisant inconsciemment le bruit de ses pas lorsqu'elle passait devant les chambres des malades. Assez vite, elle parvint ainsi à la salle de repos du personnel.

Deux de ses collègues discutaient tranquillement, assises autour de l'unique table de la petite salle avec un café et un thé brûlant dans leurs mains respectives. Quand elles la virent arriver, les deux femmes cessèrent de se raconter leurs histoires immédiatement en voyant la mine bouillonnante de rage qu'arborait la plus jeune d'entre elles.

-Alors ? se contenta de demander la plus âgée, les yeux rivés sur la figure tendue de la nouvelle arrivante.

Sans même lui répondre, l'infirmière fila directement vers la bouilloire jaune canari au fond de la pièce, tout juste à côté de la machine à café présentement occupée par la dernière et quatrième personne de la pièce. C'était une femme bien plus grande qu'elle qui l'honorait de sa présence par un dos vêtu d'une blouse blanche ample et avec des cheveux bruns coiffés en un chignon tellement désordonné que cela la fit personnellement grincer des dents. Elle ne s'attarda cependant pas plus que ça sur sa personne pour se concentrer et se contenter de se préparer une bonne tisane qui lui permettrait finalement de calmer ses pulsions meurtrières.

FlowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant