Ô, Ange venu du Soleil, tu éclaires des mille teintes de l'aube, tu m'offres les sourires les plus resplendissants de la terre, tu me fais perdre les mots et la tête; la poésie n'est qu'une pâle mélodie, avec toi elle devient une symphonie. Je suis un tournesol ébloui par tes rayons, j'admire avec fascination le tracé de tes crayons; alors que tu dessines, concentré sur tes paysages de contes de fée, je rêve tes ailes blanches et ton aura angélique. Mes textes perdent leur rythme pour prendre le tien, chaotiquement emballé; que donnerai-je pour que tu sois mien? L'Amour qui éclot est fantaisiste; c'est une rose écarlate qui en fin d'été persiste; l'Amour qui me fait voguer sur les flots des rêves éveillés, l'Amour qui me donne envie de t'aimer plus que de raison, l'Amour doux d'une belle floraison. Je m'enfonce dans les draps blancs, rosés d'un amour incertain, non réciproque sûrement. Je suis cet homme dont personne ne parle, tu es le héros de l'histoire. Je me dissimule au travers des pages, je suis l'écrivain et tu es ma muse; je pourrais écrire des histoires entières sur tes péripéties; j'écoute et je bois tes paroles pour les transformer en mots que d'autres dévoreront. L'encre de ma plume est le moyen par lequel je t'exprime mes sentiments. Sentiments que tu ne liras jamais, car mon cœur enfermé refuse de croire en l'Amour des contes; il ne croirait en l'Amour que s'il portait ton visage; or, ce n'est pas le cas. Ton visage porte bien des choses, mais pas d'Amour à mon égard. Mes espoirs sont irréels et s'effritent aussitôt construits; malgré tout, le son de ta voix et ton rire les ramènent à la vie minute après minute, jour après jour, et mon cœur ne se lasse pas de cette boucle qui va bientôt me rendre fou. Mon esprit contredit mon âme dans ses délires, je tiens debout par la seule force de ma tête.
Je vois le bleu de tes prunelles même au travers de mes paupières closes; j'entends le son de tes pas, de ta voix, de ton rire même en étant sourd. Tu es là depuis moins d'un mois, mais tu te fais une place dans mon cœur à la force de ta voix. Je n'ai pas le choix: te laisser sur le pas de la porte ce jour-là n'était pas de mes capacités, et la pluie vient balayer mes mots et mon encre; je suis tout là-haut pendant que tu dors. La Lune me regarde m'éparpiller, et je jure voir son air amusé briller dans la nuit. On dit que la nuit est une amie; c'est la vérité, tant que vous ne la fuyez pas avec une lanterne. Repoussez la nuit, elle devient votre ennemie: je sais que tu le crois. Un jour, j'espère monter avec toi sur la côte, écouter les plaintes de la mer, nature des archanges*, écouter ses ballades mélancoliques à la Lune, amantes séparées par la Terre; je veux rêver avec toi des romances interdites, imaginer les esprits des entre-temps écoutant nos histoires fantaisistes; je veux plus que je peux avoir, ainsi maudit que je suis.
La Lune me dit d'aller trouver le repos, mais comment sombrer dans le pays des songes alors que tu traces ton chemin dans les méandres de mon esprit d'écrivain?
*Anne's House of Dreams, Lucy Maud Montgomery, 1917
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Au temps des Tournesols
Poesia-- Les mots se lassent des choses banales; pourtant ils s'effacent quand les sentiments prennent place...