Détruit. Ce mot était beaucoup trop faible, à mon goût, pour illustrer l'état dans lequel j'étais après avoir été informer de ce qui c'était passé. Sophia était morte et elle n'était pas morte dans un rêve. C'était réel.
Elle avait piqué une crise d'asthme dans la nuit. Une crise à laquelle elle ne survit point (...)Je ne présentais, ne serait-ce qu'une once de courage pour aller chez elle, devant sa famille, à son enterrement. Je me sentais lâche et coupable de l'avoir laissé à ses derniers instants de sa vie. Mes amis finissaient par me convaincre, ou du moins, me contraindre d'y aller.
Quand j'arrivais chez elle, c'était comme si le monde s'écroulait sous mes pieds. Je voyais la mère de Sophia, entourée de quelques femmes, couler de chaudes larmes sous le pied de son lit, à travers la porte de sa chambre qui avait été laissée entre ouverte. Ces images constituèrent le noyau même de ce qui m'avait poussé à culpabiliser. Je ne pouvais rester dans cet endroit. Je partis. Pour certains, j'étais beaucoup trop lâche et irresponsable pour assister au deuil de celle qui se présentait être, après tout, ma meilleure amie. Pour d'autres, j'étais juste un petit enfant inconscient qui ne savait pas comment s'y prendre, comment réagir face à ces genres de situations avec lesquelles la vie peut nous surprendre. Toutefois, pour moi, c'était claire dans ma tête, dans ma conscience. J'avais tué Sophia. Les faits étaient là.
Indubitablement, ce que l'on ne fait pas dans la vie a autant d'impact sur notre futur que ce que l'on fait. Sophia m'avait tout donné sans jamais rien recevoir en retour. Comme le disait la romancière Christiane Singer lors d'une émission pour la télévision suisse : « Tant que nous ne sommes pas en amour avec nous-mêmes, nous sommes une fréquentation dangereuse pour les autres puisque nous cherchons sans cesse la compensation à travers l'autre. » Autrement dit, c'est qu'en s'aimant soi même, d'emblée, que l'on pourrait parvenir à entretenir de très bonnes relations avec les autres.
J'étais dans le déni. Je ne parvenais point à me figer une personnalité. Je traversais ainsi une phase de bipolarité extrême. Je vivais les émotions avec une intensité démesurée et parfois, j'avais énormément du mal à les maîtriser. Pendant au moins un mois, j'étais dans une perpétuelle dépression. J'éprouvais une tristesse acharnée. J'occasionnais une importante perte d'intérêt pour les activités scolaires, sociales, familiales et de surcroît, j'étais envahi par un énorme sentiment d'échec et de culpabilité ; Un échec social pourrais-je tenter de dire certes, néanmoins si on y regarde de plus prêt, j'étais moi même le sujet d'un échec personnel. Personne ne m'en voulait, je m'en voulais à moi-même. J'étais en guerre contre moi même, et contre le monde.
Les gens me répétaient continuellement : « accroches toi, ça te passera ». Je me souviens aujourd'hui encore de cette phrase, comme si c'était hier, transperçant mon oreille droite avec un goût métallique telle une balle d'un fusil AK-47. Ce ne sont que des mots, des sons pour mes oreilles, du vent pour mon coeur et une grande insulte pour mon intelligence, mon cerveau, qui ne parvenait guère à sortir Sophia de ma mémoire. Un sage a dit : « il faut perdre une chose, une personne pour connaître sa véritable valeur. » Moi je dis qu'il faut vivre cette phrase pour pouvoir la comprendre.
Dans la seconde moitié des vacances d'été, j'étais encore dans en pleine plongée dans mon deuil. J'étais coincé entre l'amertume, la lâcheté, l'agressivité et l'obligation de reprendre ma vie en main. J'avais connu une grosse perte, j'avais perdu la fille dont j'étais tombé amoureux, celle qui se trouvait être mon premier amour. Ce n'est donc pas un vide compensable du jour au lendemain, et j'en étais conscient. Il n'y avait personne pour comprendre vraiment ce que je pouvais ressentir, ce que je pouvais endurer en ces temps là. La personne la mieux placée pour m'écouter et m'entendre dans des moments comme ça n'était plus. Je repensais encore à ces mots que Sophia me rabâchait quand j'étais dans des galères de la sorte : « si un jour tu vas mal, promets-moi de m'appeler. Il est de mon devoir de t'écouter, de t'aider, d'être là pour toi et de faire de tes problèmes les miens. C'est comme ça que je peux te montrer mon amour. »
J'avais promis. J'avais appelé Sophia des milliers de fois après son départ, attendant désespérément le son de voix à l'autre bout du fil.
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Un fervent Bad boy
AdventureÀ 17ans, Je perdais l'amour de ma vie. Les années qui suivirent je plongeais dans une profonde désillusion. J'enchaînais les filles par dizaines. Je réalisais que l'on ne pouvait combler un vide qu'une personne que l'on a aimé nous a laissé en la re...