L'alcool

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L'alcool a détruit ma vie alors même que je n'en ai pas touché une seule goutte.

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J'ai vécu avec des parents alcooliques. Tous les matins, je me réveillais et je déjeunais avec ma mère qui à la place d'un café, buvait un verre de whisky. C'était tous les jours la même chose. Elle n'était pas totalement sous l'emprise de l'alcool à ces moments là, mais l'effet commençait déjà à se faire ressentir.

Ma mère se levait tôt, elle avait déjà le temps d'entamer son verre d'alcool avant même que je me lève.

J'avais entre 13 et 15 ans.

C'était difficile pour moi d'apercevoir ma mère sobre, d'avoir une discussion saine avec elle, de pouvoir faire des choses que toutes les mères font (en principe) avec leur fille.

Dans mon enfance, je n'ai jamais fait de sortie, je n'ai été au cinéma, au restaurant ou même fait les magasins. Je n'ai jamais pu avoir ce type de complicité avec ma mère.

Je me souviens d'une mère tiraillée, d'une mère dépressive qui n'est pas capable de gérer ses émotions autre que par l'alcool.

Mais ma mère c'était tout mon monde, c'était mon repère, je ne pouvais pas lui en vouloir, je ne savais même pas que c'était mal, que ce que je vivais n'était pas normal. J'ai baigné dans cette situation depuis petite, comment voulez vous que je sache que mon environnement est toxique?

Malgré tout, on avait une relation très fusionnelle, les peu de fois où je l'ai connu sobre. Notre complicité n'égalait aucune autre relation, mais elle était rare. Si rare que je n'en ai plus vraiment le souvenir.

Ma mère n'était pas seule à boire.

A mes 2 ans et demi, ma mère, séparée de mon père, s'est installée dans un F5 avec mon actuel beau père.
Lui aussi, il buvait. Je soupçonne même que ce soit lui qui a amené ma mère a boire autant. Ma mère était influençable, fragile et facilement sous emprise. Et il le savait.

En rentrant de l'école, je les entendais se disputer de la rue, au loin. Il y avait l'arrêt de bus juste à côté de la maison, une partie des collégiens du quartier descendait à cet arrêt, et j'avais honte. Si moi je les entendais, eux aussi. J'avais honte de devoir prendre cette porte et leur faire comprendre que c'était mes parents qu'on entendait si fort.

Ces soirs où je restais debout, contre l'évier, à écouter mes parents me rabaisser, durant des heures, 5 ou 6. Ça allait de 18h à 00h, 1h. Je n'avais pas le droit de partir, de m'asseoir, de pleurer ni même de parler sauf pour répondre à leurs reproches. Quand mon beau père me disait « passé à mon bureau » je savais que je ne mangerai pas ce soir là. J'en avais mal aux pieds, à rester debout des heures durant. Je me souviens encore de la douleur.

J'ai donc vécu dans ce climat toxique, où j'ai vécu négligence, insulte, dévalorisation et rejet.

Le rejet, c'est ce qui pourrait caractériser toute mon enfance.

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Je vous poste ceci, que vous ayez un peu le contexte dans lequel j'ai grandi. Ce sont des informations importantes et dont je ne suis pas fière et en ai même un peu honte, mais elles me semblent importantes pour que vous compreniez la suite et ce dont je veux parler à tout prix : la déshumanisation.

Faire cette « autobiographie » aujourd'hui est importante pour moi, car je suis en pleine reconstruction de moi même et j'ai besoin d'exprimer mes ressentis et d'interagir avec les autres.

Merci à vous de m'avoir lue.

AutobiographieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant