L'Étoile Bleue - Espoir [Auto-édité]

Chapitre 7 (partie 1)

   Je soulève ma robe afin de ne pas la salir. Comme la maison de notre amie n'est que dans la rue à côté de celle de Mathéo, nous avons décidé de nous y rendre à pied. Le sol est sec et le bitume est chaud en raison de la chaleur de ce mois de mai. Pourtant, de petits gravillons se prennent dans ma traîne bleu pâle et la rendent grise. Je l'avais choisie avec ma mère dans un magasin de robe de bal.
Elle m'a tout de suite plu : le haut ne possède pas de manche et de la dentelle bleu marine pend sur le tissu bleu ciel, formant un joli dégradé rappelant l'espace. La jupe est elle aussi décorée d'un dégradé de bleu nuit, avec un jupon blanc en dessous. J'ai choisi de petites chaussures à talons simples de couleur blanche ainsi qu'une jolie ceinture également bleu foncé. Ma mère m'a prêté un ensemble de collier et boucles d'oreilles pendantes argent et bleu. Elle m'a aussi aidée à me coiffer et à me maquiller. Grâce à elle, je me sens parfaite.
Mathéo aussi a choisi ses vêtements avec soin : il y a un mouchoir vert foncé qui pend de la poche haute de sa veste et rappelle la couleur de ses yeux. Mais qu'importe ce qu'il porte, il est toujours bien habillé.
Aujourd'hui, c'est l'anniversaire d'une amie, Victoria. C'est surtout l'amie de Mathéo, mais on s'entend bien tout de même. Et ce soir, son frère a organisé pour elle une fête surprise où presque tous les adolescents de notre âge du collège sont invités. Il y aura aussi les amis de son grand-frère, plus âgé et pour la plupart, majeurs.
Mais je voudrais profiter de celle-ci pour peut-être avancer un peu avec Mathéo... En réalité, c'est absurde... C'est mon ami... Mais... Bref, Lou n'a pas pu venir car son père le lui a interdit. Personne n'en sait la raison, mais son père réagit toujours excessivement et la pauvre en a plus qu'assez. En début de soirée, elle a bien essayé de partir discrètement, comme à son habitude. Mais malheureusement elle s'est fait prendre. Je n'ose pas imaginer les conséquences. Mathéo et moi avons bien sûr tenté de le raisonner, la veille, mais cet homme est plus borné que... Mais au fait, qu'est-ce qui est borné dans la vie ? Ah oui un âne. Il est plus têtu qu’une mule.
Je finissais de me préparer quand la porte sonna. Mon père m'a dit, avec un sourire en coin et un regard malicieux :

— Pour qui te fais-tu si belle ce soir ?

Je lui ai répondu par une grimace et Mathéo est entré...

— Ça va être trop cool ! me dit soudainement Mathéo, qui marche tout près de moi. Il y aura de quoi manger et de la musique, on va pouvoir danser !

Veut-il dire danser ensemble, tous les deux ? Je compte bien faire de cette soirée d'anniversaire une soirée inoubliable. Je vais prendre mon courage à deux mains et je lui dirai tout ce soir. Et pas question de me défiler. Mais s'il me disait que je suis trop bizarre pour lui ?
Et tout à coup, je me sens stupide. Vraiment. Je ne sais pas exactement pourquoi mais j'ai l'impression d'être ridicule et idiote, et ça m'énerve.
Aucun de nous deux ne parle et on n'entend presque aucun bruit. Il y a bien quelques insectes, mais il n'y a pas de vent et encore moins de voiture. Il n'est pourtant que dix-neuf heures. Au loin, le chantier des nouvelles habitations est désert, mais les constructions, impitoyablement grises et imposantes, s’élèvent déjà vers le ciel. Malgré la peur de penser à cela, je me demande si, sur Diaphara, les paysages sont restés intactes. Probablement que non, si sur cette planète, ils sont aussi avancés que nous, alors c’est tout bonnement impossible.
Je réprime un frisson, ces rêves me montent à la tête. Je ne dois pas y penser, tout cela n’est pas réel. Diaphara n'est que le fruit de mon imagination. Enfin, j’espère.
    Cette fois, je me sors toute seule de mes pensées. Il faut vraiment que j’arrête de penser à cela.
Rompant ce silence perturbant, je me lance :

— J'aime bien ton costume. Ce noir profond fait ressortir tes beaux yeux verts. Je veux dire... tes yeux verts tout court, pas beaux. Enfin si, ils sont beaux mais... Bref, tu as compris.