Chapitre 4

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Erdem

Je fixe silencieusement les yeux sombres de mon meilleur ami.

- C'est vraiment étrange.

J'ai l'impression que mon cerveau surchauffe et je triture mes doigts en essayant de fouiller dans mes souvenirs.

Neil et moi nous étions retrouvés dans un bar et il m'expliquait où il en était dans ses recherches. Les images avaient bien été prises depuis le téléphone d'Arsène et envoyées à une adresse qui avait été supprimée par la suite.
Le coupable a eu accès à son téléphone et mon colocataire avait toutes les raisons de croire que j'étais le responsable de cette histoire.
Mais au moins, remonter jusqu'au coupable était possible.

Je repris la parole.

- Non, j'ai beau chercher, je ne me souviens pas même du moment qu'Arsène décrit. Je ne me rappelle que des messages sur le forum. Je n'ai aucune piste.

- Tant pis, dit il en soupirant. Je vais bien finir par trouver.

Je me lève.

- Tu veux venir à l'appart, histoire de boire un verre et manger un truc  ?

- C'est pas de refus.

Il me suit et on se dirige vers l'appartement en discutant dans la rue.

- T'es sûr qu'il ne te plaît pas, même un peu ton Arsène ?

Je râle franchement.

- Mais non, arrête avec ça. On se déteste.

- Tu as vraiment un cœur immense de vouloir l'aider alors ?

- Je te l'ai déjà dit ce n'est pas mon but, je veux lui prouver que je ne suis pas le responsable. C'est tout.

- Tu veux beaucoup lui prouver ton innocence, alors que "tu le détestes".

Je chasse d'un mouvement agacé de la main ses paroles plus stupides les unes que les autres et marche plus rapidement.

Une scène juste devant nous, me sort de mes pensées.
Je vois Arsène la tête baissée, bloqué par quelqu'un lui tenant fermement le poignet et qui l'empêchait de partir.

- Mais lâche moi putain.

- Maintenant il donne des ordres la pédale ?

Je n'ai pas le temps d'analyser la situation, qu'il reçoit un coup de poing au visage. J'écarquille les yeux choqué par la scène et vois Arsène se laisser tomber sur le sol.

Neil passe devant moi et attrape le bras de l'homme, que je reconnais être un ancien élève de notre lycée. Il le plaque violemment au mur et je détourne mon regard pour aller m'agenouiller près d'Arsène.

Je le fais se redresser vers moi pour vérifier qu'il va bien. J'approche ma main de son visage et effleure du bout des doigts sa pommette gonflée et rougie. Il grimace au contact.
Nos regards se croisent et je lis dans ses yeux une panique grandissante. Son souffle et saccadé et rapide, je comprends qu'il est en train de faire une crise d'angoisse. Je prends sa main et la pose délicatement sur mon torse.

- Cale toi sur ma respiration, tout va bien, on va te protéger. Inspire.

Je compte doucement pour l'aider à reprendre un rythme de respiration plus calme.

- Expire.

Ses yeux sont rivés sur sa main. Il se recroqueville sur lui même et je l'enroule de mes bras.

- Tout va bien Arsène. Ne t'inquiète pas. Il ne va plus rien t'arriver.

Je passe lentement ma main dans son dos et je sens son souffle se calmer.

Une main se pose sur mon épaule et je vois mon meilleur ami. On hoche la tête simultanément en signe de compréhension.

- Arsène, il est parti. Il ne te fera plus de mal. Rentrons.

Je le sens acquiescer faiblement dans mes bras. Je l'aide à se relever. Et nous finissons ensemble le chemin vers notre appartement.

Arsène

Erdem déverrouille la porte d'entrée devant moi. Je regarde nos mains jointes me demandant s'il le fait consciemment. Il me tire vers le canapé et me fait m'asseoir. Il sort du salon puis revient et il me tend un gant de toilette rempli de glaçons. Il me fait signe de le mettre sur ma joue blessée et s'installe à côté de moi. Son ami s'assoit sur le fauteuil en face de nous.

Je suis totalement perdu, je ne comprends pas la situation. Je me demande pourquoi il agit soudainement de façon protectrice avec moi. Je me dis qu'il ressent peut être des remords mais je reste surtout méfiant vis à vis de lui.

- Je m'appelle Neil, tu dois être Arsène c'est ça ?

- Euh.. oui.

Je le regarde de façon perplexe.

- Erdem m'a beaucoup parlé de toi !

Je manque de m'étouffer pendant que le brun lui envoie un coussin en plein visage en le fusillant du regard.

- Ne l'écoute pas, il est chelou.

- Honnêtement, là c'est toi que je trouve chelou.

Neil ricane pendant que Erdem se tourne vers moi.

- Bon sans vouloir casser l'ambiance... Qu'est ce qu'il s'est passé.

Je m'écarte de lui pour lui cracher mes mots au visage.

- J'ai vraiment besoin de t'expliquer qu'après ce que t'as fait, j'ai du en subir les conséquences ? J'ai fini seul, j'ai subi ce genre de truc constamment, même venant de mes anciens amis et ma famille. Au final même maintenant ça continue.

Mes yeux me brûlent et des larmes menacent de dévaler mes joues.

- Arsène... Je te promets, que je n'ai jamais fait ça. Je sais qu'on ne s'aime pas mais je ne veux pas participer à ça. Tu ne mérites pas de vivre ça.

Je me détends inconsciemment, ne sachant pas si je dois le croire ou non. Ses yeux verts me détaillent et il passe sa main sur ma joue. Si je ne le détestais pas, je crois que j'admettrais le trouver beau. Neil se racle bruyamment la gorge et nous nous retournons vers lui simultanément.

- Pardon, j'ai cru que vous alliez vous..

Le regard glacial de Erdem le fait taire.

- Ok, ok continuez je vous en prie !

- Continuer quoi ? Demandais-je

- De..

- Neil. La ferme. Bon vous voulez boire quelque chose ?

Je fronce les sourcils à ce changement brusque de conversation.

- Volontiers

Erdem se lève et se dirige vers la cuisine pendant que je scrute Neil.

- Je suis certain qu'il t'aime bien.

- N'importe quoi.

- Je sais que tu le crois coupable mais s'il te plaît essaye de le voir comme il est vraiment. 

Cette journée n'a vraiment aucun sens.





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