Chapitre final

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Axel pénétra dans la salle d'interrogatoire avec autorité. Numéro 7 était assis sur une chaise, la main droite menottée à une excroissance de tuyaux de plomberie boulonnée sur la table. La petite pièce ressemblait à celle que l'on voit régulièrement dans les séries américaines, excepté le miroir sans teint. Axel resta planté debout devant lui, une feuille de papier à la main dans une attitude de domination évidente.

- Monsieur Sonkko Jaro ? Commença Axel. L'homme assis, leva les yeux sur le policier et acquiesça d'un signe de tête. Vous êtes né le 29 septembre 1982 à Banjul, capitale de la Gambie. Vous êtes marié, vous avez deux enfants et vous travaillez comme technicien en engins de travaux publics pour la société BTPS maintenance. Vous confirmez ?

- C'est exact, mais je ne sais toujours pas ce que je fais ici. Personne ne me dit rien, objecta Jaro.

Axel vérifia que la diode rouge au dessus de la porte était bien allumée. La diode qui indique que la pièce est sous enregistrement audio et vidéo. Il prit le temps de s'asseoir en face de Jaro Sonkko.

- On ne met pas les gens en garde à vue par hasard continua Axel. La partie est terminée monsieur Sonkko. Les analyses ADN ne mentiront pas. On vous a vu et on vous a reconnu. Je vous conseille d'être coopératif et je vous assure que nous ne manquerons pas de le signaler au juge.

- Mais c'est n'importe quoi ! Personne ne m'a vu. Y avait personne, s'agaça Jaro. C'est pas moi qui l'ai tuée. Je les connais vos techniques, ça ne marche pas avec moi ! Le visage d'Axel s'anima d'un discret rictus de satisfaction. C'était un stratège redoutable.

- « Personne n'a pu vous voir car il n'y avait personne ». Donc vous étiez présent pour le constater!  Monsieur Sonkko, continua doucement Axel, je ne vous ai jamais parlé de meurtre ? Je vous l'ai déjà dit Jaro, c'est Game Over. Axel reposa son dos sur le dossier de sa chaise pour apprécier l'effet sur le technicien qui avait déjà baissé la tête en signe de résignation. Axel jeta un coup d'oeil à la caméra dans le coin de la pièce. Les policiers derrière leurs écrans devaient apprécier. La tête basse, Jaro se livra.

- C'était un accident. Je ne voulais pas la tuer. Je voulais juste qu'elle me file son fric, mais elle s'est pas laissé faire. J'aurais dû lâcher l'affaire, mais c'est clair qu'on avait trop abusé ce soir là. On avait picolé et fumé  comme des malades. J'étais défoncé, j'avais une nouvelle fois dilapidé mon salaire. Je savais que cette fois là ça ne passerait pas avec ma femme. Pas cette fois ! Alors j'ai pas lâché et je me suis acharné. Pas question de repartir les mains vides. Je voulais  juste lui montrer ma détermination pour l'effrayer, qu'elle se résigne à me laisser son putain de sac. Elle puait le fric sérieux. Jaro se tenait la tête dans les mains. Il sanglotait. Il commençait à comprendre qu'il ne rentrerait pas chez lui avant longtemps. Axel resta silencieux pour ne pas casser la dynamique de ses aveux. « Et elle est tombée par terre. J'ai compris qu'elle était morte, mais je ne voulais pas la tuer. Je suis pas un assassin, c'était un accident. Vous me croyez quand même ? »

- Ce n'est pas moi qui dois vous croire Jaro. Moi, mon boulot c'est de vous arrêter. Je vais vous laisser avec mes collègues, ils vont vous expliquer ce que vous devez savoir sur votre proche avenir. Une chose est sûre monsieur Sonkko c'est que vous ne dormirez pas chez vous ce soir ! Axel se leva, se dirigea vers la porte.

- Vous m'avez menti tout à l'heure quand vous m'avait dit que quelqu'un m'avait vu ? Car je suis persuadé qu'il n'y avait personne. Je sais aussi qu'il n'y a pas de caméra dans le parking. C'était un mensonge ? Axel se retourna nonchalamment, le regarda avec insistance. Un flash passa brièvement devant ses yeux. L'image d'Enguerrand avec sa canne blanche et ses lunettes de soleil soutenu par Lucie dans le couloir du commissariat.

- Vous avez oublié une chose importante monsieur Sonkko, c'est que les murs ont des oreilles.

 Axel quitta la pièce satisfait.


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