Chapitre 48 / Le "chat" de Mme Dubois

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Violette répond rapidement au dernier message envoyé par Gabriel. Alisha ET Alexandre ont décidé de jouer au papa et à la maman ce week-end en acceptant de le garder. Ils ont investi l'appartement dès vendredi soir. Gabriel était ravi. Violette l'avait prévenu en amont bien sûr. Dès qu'elle avait su pour le déplacement professionnel, car il fallait bien au garçon plusieurs jours pour s'habituer à l'idée.

Les courses ont été faites. Rien ne manque. Et comme le temps est à la pluie, ils ne regretteront pas de ne pas pouvoir sortir, car si ses deux amis sont tout à fait capables de gérer Gab dans l'appartement, ils ne le sont pas à l'extérieur si jamais il fait une crise.

— Encore à prendre des nouvelles de votre chat ?

— Oui, monsieur, répond Violette en fermant son téléphone mais sans prendre un ton contrit.

Si elle a envie de prendre des nouvelles de son « chat », elle en a tout à fait le droit. Quant à son « chat », si son patron savait que c'est en fait un garçon de neuf ans, aussi intelligent que lui et dévoré d'une curiosité qui l'empêche de réagir aussi calmement que le commun des mortels en cas de trop forte stimulation, il serait sans doute étonné. Mais Violette ne dira rien. Et certainement pas la vérité.

La jeune fille éteint son téléphone et soupire. Pendant un peu plus d'une heure, elle ne sera pas joignable. Elle appréhende. Elle est plus stressée que prévu. Prendre un avion veut dire ne pas pouvoir rentrer aussi facilement en cas de problème. Elle prend un énorme risque, mais a-t-elle le choix ? Non. Pas vraiment. Elle prend une grande inspiration et suit Duportal qui est déjà passé à autre chose.

En le voyant marcher bille en tête vers la porte d'embarquement, une pensée vient la faire sourire brusquement : finalement ce week-end ne sera pas tellement différent de ceux avec Gabriel. Elle va devoir gérer un autre être humain un peu particulier. La différence tient de l'âge. Est-ce que ce sera plus simple ? Pas sûr. Le plus difficile sera de maintenir le masque en place.

***

L'hôtel est somptueux comme elle s'y attendait. Elle s'occupe de récupérer les clés et de donner les documents demandés. Le regard de Max Duportal est tourné vers un lustre en cristal imposant qui illumine le hall. Elle aurait dû s'y attendre. Entre les piliers, le dallage, le lustre et tout ce qu'elle-même n'envisage pas, il y a de quoi faire pour quelqu'un comme lui.

— M. Duportal ?

Il ne répond pas. Ne bouge pas d'un pouce. Seule sa main lui indique de patienter. Elle s'exécute. Il compte.

— 712.

— Voulez-vous vous atteler au carrelage ? demande Violette le plus sérieusement du monde en fixant les larges dalles noires et or qui pavent le grand hall jusqu'aux ascenseurs.

— Déjà fait. Ils ont juste changé le lustre, dit-il en souriant.

— Ah, se contente de dire Violette.

Elle aurait dû se douter qu'il était déjà venu. D'autant qu'il lui a demandé de lui réserver une chambre bien précise quand il l'a chargée de s'occuper du voyage : la suite nuptiale.

— Nous y allons ? Ou souhaitez-vous aussi compter les cristaux ?

— Non, merci, M. Duportal, je vous fais confiance, dit-elle avec un demi-sourire pincé.

Il s'applique à manier l'ironie, maintenant ?! Rien d'impossible à gérer... Mais elle doit faire comprendre à Max Duportal qu'elle n'est pas Antoine Fournier. Elle ne va pas faire le show pour lui. Il n'y aura pas de bons mots. Il n'y aura pas de connivence. Elle doit rester dans son rôle et ne pas oublier qu'elle est censée être plus âgée que lui, qu'elle est seulement son assistante, et qu'elle est peu accommodante. Elle n'ajoute donc rien et se dirige vers les ascenseurs sans tarder.


Tomber les masquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant