2 : L'homme au costume

22 0 0
                                    

Une nuit, par un temps pluvieux, un homme rentra cette nuit-là dans l'hôtel. Il était deux heures du matin... Il était vêtu d'un beau costume, un cliché sur pattes penserez-vous. Et bien non, il était frêle et pourtant très charismatique. Il était trempé et semblait fatigué, des cernes orageuses couvraient le dessous de ses yeux et ses cheveux humides couleur terre lui assombrissait d'autant plus le visage. Il se racla la gorge avant d'engager la conversation.

- Bonsoir Madame, excusez mon entrée quelque peu fracassante, dit-il en soufflant du nez.

Habituée à ce genre d'entrée brusque, Louïse prit une clé et lui répondit que cette chambre avec lit double était encore disponible. L'air dubitatif, il regarda la clé avant de lui demander :

- Hum, excusez-moi mais vous n'auriez pas plutôt une chambre avec un lit simple ?

Louise écarquilla ses yeux verts émeraudes.

- Vraiment navrée, je pensais que... bégaya t'elle.

- Pas de souci, vous devez en voir souvent des comme moi accompagnés de jolies demoiselles, malheureusement tout le monde n'a pas cette chance, je prendrai donc le lit simple, rétorqua-t'il en rigolant.

- Bien sûr, sans souci ! Elle essuya sa gêne, pris son nom et lui tendit - cette fois-ci, - la bonne clé.

Il l'a remercia, parti vers sa chambre avec un sourire charmeur mais Louïse semblait trop occupée pour s'en apercevoir. Elle replongea aussitôt dans son film avant de s'assoupir.

Le lendemain à six heures et demi, elle se fit réveiller par sa collègue, elle prit ses affaires et se rendit vers sa petite maison perdue dans une ruelle de cette cambrousse. Elle bâilla un bon coup et s'écroula pour de bon sur son canapé. Sans surprise, elle se fit de nouveau réveiller quatre heures après par une personne tambourinant à sa porte. Encore engourdie par la fatigue, elle prit son temps pour ouvrir. C'était sa voisine, énervée pour on ne sait quelle raison, c'était son habitude de venir déverser sa haine sur Louïse. Elle n'en avait que faire maintenant, elle attendait la fin de son monologue avant de trouver une excuse et de refermer la porte.

Elle s'habilla ensuite avant de sortir prendre l'air. Elle marcha dans tout son petit village, saluant les vieilles personnes attachantes du coin. Elle cherchait son banc préféré, face au parc. Le rire des enfants la plongeait dans ses plus beaux souvenirs... En marchant en direction du fameux banc, elle cru apercevoir l'homme de la veille. Elle n'en était point sûre, il était de dos et assez loin d'elle. Elle n'y prêta pas plus attention et s'assit. Le parc était vide aujourd'hui, elle en était quelque peu déçue. Ennuyée, elle tournait la tête dans l'espoir de trouver une âme errante acceptant de discuter un peu avec elle; mais rien, même pas un chat. Les papis et mamies étaient déjà retourner vaquer à leurs occupations.

Alors qu'elle prit son téléphone pour demander des nouvelles de ses amis, une personne s'assit à côté d'elle, soupirant et bâillant. Elle ne jeta que furtivement un coup d'œil aux pieds de cette personne. Il portait une paire de Richelieu bien cirées avec l'ourlet de son pantalon de costume parfaitement tombant. Etonnée de voir quelqu'un vêtu de la sorte dans cette petite commune modeste, elle se rappela alors du jeune homme de la veille et leva rapidement la tête : C'était bien lui, il n'avait cependant pas l'air de l'avoir reconnue. Elle se pencha légèrement en avant afin de mieux voir son visage et le salua. Premièrement confus, le visage de l'homme s'égaya quand il remarqua la jeune femme, il s'excusa de ne pas l'avoir vue de suite. Ils papotèrent ensuite un peu, de choses futiles. Elle apprit que l'homme, nommé Emile, vivait en réalité assez loin de là, il était ici pour le travail et pour potentiellement s'installer dans la région. Il rêvait de devenir directeur d'une agence comptable et il était épuisé à force de travailler sans relâche. C'était un gentil bonhomme, souriant. Le temps ne pouvant être stoppé, ils échangèrent leurs numéros afin de se retrouver le soir-même avant le service de Louïse. Contente de cette nouvelle rencontre, elle ne voyait tout de même aucune ambiguïté entre eux, elle ne pouvait s'empêcher de continuer de penser à Anselme.

Suite à ça, la journée suivit son cours. Elle rentra chez elle manger un peu, lire, et regarder les nouvelles photos de l'homme qu'elle aimait tant. L'après-midi passa, un peu trop vite. N'ayant pas vu le temps passer, elle se retrouva donc à se préparer dans la précipitation.

Ils s'étaient donné rendez-vous au bar du village, elle arriva à l'heure malgré tout tandis que lui était déjà là depuis une bonne dizaine de minutes. Un bouquet bon marché à la main, il accueilla Louïse avec un grand sourire, les fleurs qui commençaient à faner la faisait rire.

Ils s'installèrent sur la terrasse déserte, ils prirent tous les deux la même chose, un classique "Sex on the beach", les saveurs du cocktail les faisaient voyager hors du patelin terne. Ils parlaient de tout et n'importe quoi, bien que n'importe quoi ne l'était pas pour eux. Ils donnaient l'impression de se connaître depuis toujours, des meilleurs amis de longue date. Ils étaient restés là à rire et débattre pendant au moins trois bonnes heures.

L'heure venue, il accompagna Louïse jusqu'à l'hôtel en déclarant être le premier client de son service car il reprenait sa chambre, simple. Elle ria suite à son allusion, lui redonna la clé et lui souhaita une bonne nuit. Elle mit les fleurs - du moins ce qu'il en restait - dans un verre d'eau en espérant les voir fleurir à nouveau avant de s'installer sur sa chaise grinçante.

Fin d'automneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant