15-Vie à deux

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Vitali

J'ai la clé de la maison de Fana et je dors presque tout le temps chez lui, malheureusement il n'est pas très disponible. Il est patient comme un ange, il ne me demande rien à part de la discrétion. Il est mon merveilleux secret.

Je nie être gay et il me regarde désespéré par mon négationnisme.

Je sais bien qu'en réalité je le suis ou bi, mais la barre est très très haute, en fait il n'y a que Fana. Je veux bien le reconnaitre, il m'est indispensable. Il m'apaise, et moi aussi je l'ai surnommé Sérénité sans qu'il comprenne la blague.

En privé, nous grimpons au rideau ensemble et en façade nous faisons semblant de ne pas nous connaitre. J'adore le voir à la fac à la cafète. Parfois il vient dans les gradins assister à mes entrainements et mes copains n'y voit que du feu.

Cheryl s'est manifestée, odieuse, décidée à me faire chanter. J'ai prévenu les avocats de ma mère. On ne peut pas lui reprocher cela : elle comprend vite... et se dépêche de partir.

Il ne dit rien ce qui m'énerve quand même.

─ Tu n'es pas jaloux ?

─ Non, nous deux cela ne va pas durer, donc je m'attends toujours à ce que tu partes avec quelqu'un d'autre.

─ Tu peux me tromper si tu veux !

─ Je n'en ai pas envie. ...Et si cela arrivait, je pense que je ne voudrai plus coucher avec toi. Je suis assez fidèle dans mon genre.

─ Tu n'as pas envie de sexe ?

─ Tu me suffis largement.

J'apprécie surtout de ne plus faire la une de potins. Personne ne parle plus de ma sexualité à la fac et j'apprécie vraiment. Mes copains réclament à la rencontrer.

─ Tu nous la présente quand ?

─ Jamais !

Nous avons une petite tradition tous les trois, nous organisons parfois des tournois de poker. J'ai vaguement songé à les inviter chez Fana, avant de me raviser et leur donne rendez-vous chez moi ou je vais de moins en moins souvent.

Nous sommes une dizaine. Will et les autres débarquent avec des caisses de bière.

Nous nous installons dans le salon au sol, dehors la pluie tambourine.

─ C'est poussiéreux, se moque Will. Il faudrait rentrer chez toi un peu plus souvent.

Je lui balancer un slip sale sur la tête, ça lui apprendra.

─ Bon on joue.

Notre soirée casino improvisé commence. Pour le plaisir et challenger les choses, nous organisons des paris avec de l'argent ou des défis sportifs. Lou est nerveux.

─ Dis mon gars, ne va pas faire une carrière ou tu dois faire du bluff ou de choses risqués tu vas développer un ulcère.

Il est deux heures du matin et ils sont tous partis, il ne reste que Will et Zian, nous nous lançons des challenges plus costauds.

─ Tu sais qu'on t'a surnommé l'homme invisible.

Je lève un sourcil surpris et enchérit de mille. L'enjeu est de faire trois cents pompes ou un saut en parachute. Il essaye de me déconcentrer.

─ Arrête moi si je me trompe, mais tu n'es plus visible nulle part tu vas en cours et tu disparais et quand on va chez toi il n'y a personne.

─ Arrête de me fliquer !

Quel commère ce mec et il a l'œil quand même.

Soudain mon téléphone sonne, normalement je ne décroche pour personne quand je joue, mais c'est Fana.

─ Tu n'es pas à la maison ? Il a une voix étranglée.

─ Non je suis chez moi.

Le ton triste m'alerte.

─ Pourquoi tu m'appelles ?

─ Je me sens horriblement mal et j'avais envie de te voir. Excuse-moi de t'avoir dérangé.

─ Viens chez moi, je t'attends.

En parlant, je regarde mes deux potes qui n'en perdent pas une miette. Fana ne dit rien alors je me décide et insiste.

─ Viens ! Tu me raconteras ce qui t'arrive !

Je raccroche, il va être temps de mettre mes proches dans la confidence et ce sera une grosse première.

Comment vont ils réagir ? Ils ont compris que quelqu'un allait venir, Sérénité et que c'était spécial pour moi. Ils n'attendent pas un mec.

─ Ta chérie vient ? demande Will, imitant une voix de crécelle d'une de mes anciennes conquêtes.

─ Oui.

─ Tu veux qu'on parte ? propose Zian.

Will secoue la tête, pas du tout d'accord.

─ Je ne vais la présenter qu'à vous deux. Allez ! On joue concentrez-vous sinon ça va vous couter cher.

En jouant je réalise que c'est la première fois que Fana m'appelle.

Plus tard, je vais ouvrir à Fana qui blêmit en réalisant que je ne suis pas seul.

─ Je n'ai pas du comprendre... je ne voulais pas ...

─ Rentre ! Je le coupe et voyant qu'il n'obéit pas, je le tire jusqu'au salon et le fait asseoir en face des deux autres qui ne disent plus un mot.

─ Vous connaissez Fana ?

Ils hochent la tête éberluée.

─ Tu ....tu ... ils n'arrivent pas à le dire.

─ Je couche avec lui oui. C'est Sérénité.

─ Ben mon cochon, ricane Will.

─ Pas un mot ! Vous êtes dans la confidence, il n'y a que vous deux.

Fana a l'air désespéré.

─ Qu'est ce qu'il t'arrive ? Je demande un peu plus brusquement que je n'aurai voulu.

Il s'appuie contre moi en pleurant. Je le laisse faire renonçant à dire aux autres de ne pas nous charrier. Ils sont silencieux et laissent Fana se calmer.

─ Je vais chercher à boire, propose Zian.

Fana a interrompu notre partie, nous attendons qu'il aille mieux avant de reprendre.

On se met à bavarder de tout et de rien en attendant qu'il se calme.

─ Continuez de jouer je vais partir.

─ Reste !

Il s'essuie les yeux.

─ J'ai l'impression d'être ...il y a une petite fille qu'on a soigné aux urgences pour maltraitance. ... Son père est venu la réclamer.... elle ne voulait pas aller avec lui, elle m'a supplié...

Je devine la suite, ils l'ont confié à son géniteur.

Je ne sais que dire pour le soulager. Mon père est procureur et parfois il revient comme cela impuissant et désesperé. Je le serre dans mes bras.

─ Tu veux jouer avec nous ?

─ Non je n'aime pas les jeux de carte.

─ Une vraie fille ! ricane Will.

Je lui balance des chips. Fana reste contre moi essayant de chasser sans doute les images horribles. Il s'endort sur mon épaule. Je sens leurs regards perplexes sur nous deux. Je le réveille alors que Zian jette les cartes, il vient de gagner tout content mais il a eu chaud aux fesses.

─ Fana, on va dormir ici ce soir, tu peux aller au lit si tu veux.

─ Tes amis ?

─ Ils vont bientôt dégager cette bande de pique-assiette on fait juste la belle et on s'arrête.

─ Pas si vite mon gars, je veux te plumer ! proteste Will, faisant sourire Fana.

Mon prince [BL]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant