C'est en enfilant mes gants que j'ai remarqué les bleus qui sont apparus sur mon poignet. Dès que j'en aurais l'occasion, je le tuerai, c'est sûr.
Aujourd'hui, un instituteur est censé venir me "donner une éducation" pour ne pas que je finisse "sotte". Je me suis réveillée un peu tard : il arrivera donc dans quelques minutes, alors que je suis toujours en train de lutter contre mes cheveux. J'ai du casser 3 ou 4 élastiques avant de passer à un ruban bleu. J'avoue que j'aurais préféré une institutrice, les femmes sont plus belles et plus soignées. Mais je préfère ça plutôt que d'être seule tout le temps, alors espérons qu'il ne soit pas comme Duncan. On frappe à ma porte et je vérifie l'horloge : pile à l'heure. Je fais un saut dans la salle de bain pour vérifier que rien ne cloche, vous savez, les sous-vêtements qui dépassent tout ça. Je me hâte vers la porte et l'ouvre aussitôt, et se tient en face de moi un jeune homme assez grand à l'air chaleureux. Il porte un long manteau noir fermé par des boutons dorés, reflétant fortement sa classe sociale, et quelques boucles brunes indomptées lui tombent sur le front. Il affiche un léger sourire.- Bonjour madame Crawford. Il me tend la main et je la serre furtivement. On a dû vous prévenir que je viendrais aujourd'hui ?
- Oui, oui bien sûr. Je marque une pose avant de me rendre compte que ça fait plusieurs minutes que je le laisse sur le pas de la porte. Entrez, excusez-moi.
- Aucun problème. Il me salue de la tête et entre avant de déposer sa mallette sur le bureau. Je propose qu'on s'installe ici, mh ?
Je ne réponds que par un signe de tête et nous commençons à nous installer aussitôt, dans un silence complet. Je suis partagée entre l'envie de rire nerveusement et l'envie de pleurer de gêne. C'est un homme calme et assez distingué. Il n'a jamais l'air embarrassé, je pense que c'est ça qui me gène. Il dispose plusieurs feuilles sur le bureau et lève la tête vers moi, avec un regard curieux.
- J'aimerais vous connaître, avant qu'on fasse classe. J'ai reçu des ordres bien précis de Duncan mais si je l'écoutais nos rendez-vous deviendraient purement sinistres, autant que lui. Il se mit à rire mais je n'arrive à lui rendre qu'un sourire. C'est rare qu'on entende quelqu'un se moquer ouvertement d'un membre royal, c'est audacieux. Il me tend une fiche avec une liste de questions auxquelles je dois répondre, et je tâche de le faire rapidement.
- Je m'appelle Athena, j'ai 18 ans, j'aime la poésie et la peinture, mon plus grand rêve ça serait de voir la mer. Ma première impression de vous est que je m'attendais à quelqu'un de plus vieux, beaucoup plus vieux.
Il rit à nouveau, d'une voix grave sortant du fond de sa poitrine comme l'écho d'une grotte, de la plus charmante des manières.
- Vous insinuez que je pratique un métier de vieux ? Il a un sourire amusé, joueur, et cette fois mon sourire se fait plus large, retenant un rire.
- non ! Enfin oui, un peu. Je veux dire que les instituteurs qui donnent classe dans les palais sont plutôt âgé !
- Et bien sachez que je n'ai que 30 ans. Vous pourrez vous moquer de moi plus tard, disons dans 20 ans. Il se racle la gorge pour calmer son précédent fou rire et termine de noter les informations que je lui ai cité.
- Vous ne m'avez pas dit votre nom, à vous, Dis-je en le scrutant.
- Lysandre. Répond-il aussitôt, en affichant un sourire dévoilant des dents blanches et des canines pointues. N'osez pas dire que c'est un prénom de femme, -il lève les yeux pour me regarder-, je vous vois venir.
Je me met à rire la tête penchée en arrière, et l'atmosphère se dissipe aussitôt, tout de suite plus légère. La tension que je ressentais depuis mon arrivée s'est envolée d'une traite dans l'air avec mes rires. Il se passe la main dans les cheveux, presque gêné.
- c'est un joli prénom ! Je le pense vraiment. Il lève les poings au ciel comme pour crier victoire et se remet à ses papiers. Je suis heureuse qu'il soit agréable, je ne me serais pas vue passer des heures chaque jour avec un vieil homme bêcheur. Je ne m'étais pas sentie à l'aise depuis des jours jusqu'à maintenant. Notre entretien se termine mais il ne part pas tout de suite : il se contente de me scruter pendant de longues secondes, son regard planté dans le mien et je sens quelque chose d'étrange s'installer dans mon estomac. Quelque chose de fort se dégage de lui, quelque chose qui me compresse la poitrine et m'empêche de parler. Je respire plus fort et le feu me monte aux joues et aux oreilles tandis que lui, reste impassible. La manche de sa chemise blanche relevée jusqu'au coude, révélant son poing et les veines irrégulières parcourant son avant-bras. Mes yeux se baladent jusque son torse et il se lève rapidement.
- C'était quoi, ça ? Questionné-je, encore confuse.
Son sourire amusé réapparaît, creusant une fossette sur sa joue droite.
- Rien. Répond-il calmement. Je voulais savoir qui baisserait les yeux en premier, c'est tout.
- Pourquoi ? Insisté-je.
Il ne répond pas et se contente de ranger soigneusement ses affaires, son sourire ne le quittant pas. Je l'observe faire, il faut avouer que c'est un homme intéressant. Dans le sens où lui, n'est pas menaçant, même très convivial. Mais son côté mystérieux et ce qu'il a l'air de cacher, ça c'est effrayant. Il termine jamais ses phrases ! bizarre. Je regarde ses bras tandis qu'il referme la mallette. Sa manche remontée dévoile une partie de quelques tatouages, qui s'apparentent à être 4 petites dagues côte à côte sur son avant-bras. Il ressent mon regard posé sur lui et remonte ma tête alors baissée avec son index et son pouce.
- Concentration. Murmure-t-il.
Je lève les yeux au ciel et il me répond d'un sourire, avant de quitter la chambre et de fermer la porte. Je me dirige directement vers la salle de bain et commence à faire couler de l'eau brûlante dans la baignoire avant de retourner à la chambre pour chercher des vêtements de nuit convenable. J'ôte mon corset et mes sous-vêtements avant d'enlever ma robe, appréciant la sensation de la soie sur ma peau avant de laisser tomber le haut de ma robe à mes hanches. Tandis que je me dirige vers la salle de bain, la porte de la chambre s'ouvre dans un fracas. Je sursaute en remontant immédiatement mes bretelles et me retourne vers cette dernière, et Duncan s'y trouve. Au vue de la violence à laquelle s'est ouverte la porte, on aurait dit quelqu'un de furieux. Mais lorsque je me retourne, Duncan est d'un calme olympien.
- Ça va pas ? Tu pourrais toquer au moins.
Il s'avance dangereusement de moi d'un pas déterminé et s'arrête net devant moi.
- Je n'y avais pas pensé avant, c'est ma faute. Mais qu'une chose soit claire entre nous, je ne veux pas que tu couches avec d'autres hommes.
Un sourire naît sur mon visage et je le regarde quelques secondes.
- Pourquoi ? Tu te sens menacé ?
Il ferme les yeux prêt à s'énerver mais il ne le fait pas, il se contente de les réouvrir et de me fixer en retour.
- Si ça peux te convaincre de ne pas le faire, ouais, c'est ça.
Il quitte la chambre aussitôt me laissant enfin prendre mon bain. Il est sûrement venu me voir en voyant Lysandre sortir de ma chambre en souriant. Je ne le comprendrai sûrement jamais. Je ne sais pas si il est jaloux, ou si c'est juste pour sa réputation. Une chose est sûre, c'est que moi ça m'arrangerait qu'il trouve une maîtresse avec qui procréer. Je touche mon ventre sous l'eau chaude, et pendant un instant j'essaie de l'imaginer rond. Quel cauchemar. Cette image me rappelle que je n'ai toujours rien mit en place pour m'échapper, ou renverser le trône des Crawford. Il faut dire que ce n'est pas une mince affaire, étant donné que je suis seule. Si ces sociétés secrètes existaient ? Ce sont les idéaux qu'ils défendent après tout. Je sors du bain en me vêtant d'un simple peignoir pour récupérer cet article que j'avais conservé et je m'allonge sous les draps froids. Je déplie soigneusement l'article et en ouvrant le dernier pli, un petit bout de papier s'en échappe et tombe sur ma poitrine. Un pic de crainte transperce mon cœur et la lumière de ma lampe de chevet montre indistinctement qu'une note est marquée dans le papier plié. Je le récupère de mes mains méfiante et y trouve seulement une série de chiffres. 2,4,3. Je m'empare à nouveau de l'article et le lis en boucle essayant de trouver quelque chose qui pourrait m'aider. J'ai l'impression de résoudre un casse-tête et je n'ai même pas idée de qui a pu mettre cette note dans mes affaires. Pourquoi ?
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Atlantis
Novela JuvenilJ'aimerais pouvoir réapprécier la beauté des fleurs. J'aimerais remonter le temps, au temps où la mer et les rivières n'étaient pas rares, au temps où les enfants jouaient dehors. Au temps où je ne serai pas forcée de me marier. Le futur et l'évolut...