02. Femmes fortes

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20h02      Stowe, États-Unis

Deux longues semaines se sont écoulées depuis la dispute entre mon père et ma sœur.

Après le dîner, je décide d'aller me promener
dans la ville.

Arwen est méconnaissable. Elle passe ses soirées dans sa chambre quand elle rentre de la fac. Elle n'a pas adressé la parole à mon père depuis. Quant à moi, elle ne m'a pas non plus beaucoup parlé. Je l'entends seulement pleurer le soir. Je vais souvent la rejoindre pour ne pas la laisser seule. Elle pleurait, la tête sur mes genoux, silencieusement.

Je ne retrouve plus ma sœur dans ses yeux. Elle est devenue une autre personne. Elle a arrêté de mettre du mascara, elle qui en mettait tous les jours auparavant. Arwen ne fait presque plus attention à comment elle s'habille ou se coiffe. Son regard est vide, dépourvu de joie.

Les ravages de l'amour.

C'est la raison pour laquelle j'ai laissé tomber depuis des années. Un infime bonheur pour un éternel chagrin.

L'amour te prend, te donne des sentiments puis quand il en a marre, il te brise, te détruit et t'anéantît.

C'est la deuxième fois que je vois ma soeur dans un tel état. La dernière fois, un de ses meilleurs amis venait de décéder suite à un incendie. Elle avait quinze ans.

Elle faisait des cauchemars et hurlait durant son sommeil. Mes parents étaient même allés l'emmener voir un psy. Je crois qu'Arwen ne s'en ai jamais vraiment remise.  

À cette époque, ma sœur s'était teint les cheveux en rouge et elle se les étaient coupés au carré.

Maintenant, elle a remonté la pente et ses cheveux bouclés lui arrivent au milieu du dos. Ils ne sont plus rouges- ma mère trouvait cela très moche- et ont bel et bien retrouvés leur couleur naturel: châtain. J'avoue que j'aimais bien ses cheveux rouges cerises. Je voulais faire la même teinture mais j'avais bien trop peur d'abimer mes cheveux soyeux.

Je continue à marcher, repensant à tout ce qu'il c'est passé depuis quelques années.

Il fait nuit noire et ma sœur et Stella, ma meilleure, n'aiment pas que je sorte la nuit tombée. Elle disent que les fous courent les rues. Elles se battent toutes les deux contre moi depuis des années pour que je prenne plus de précautions.

Je sais qu'elles ont raison mais je n'ai pas peur. Je ne vais pas m'empêcher de vivre.
Je suis inconsciente, je le sais.

Je mets mes écouteurs sans fil et une musique que j'adore vient de se mettre en marche. Je me mets à danser doucement et à chanter presque silencieusement. Je sens de la pluie fine tomber sur mes vêtements. Je danse plus frénétiquement et prends mon téléphone comme un micro. Je ris tandis que la pluie commence à être de plus en plus forte. Mes cheveux trempés dégoulinent et je suis moi-même trempée jusqu'au os.

Je continue de danser comme si je suis dans ma chambre. Je suis seule alors personne ne peut me voir.

Je ris aux éclats et danse comme une folle, oubliant presque où je me trouve. Je me sens revivre tout d'un coup. Une autre musique se met dans mes écouteurs: « sorry » de Justin Bieber. La hype n'est toujours pas passée pour moi. Je recommence à danser au rythme de la musique.

Un bruit de moteur me fait rapidement revenir à la réalité et je stoppe brusquement tous mes gestes. Un homme vêtu tout de noir vient de monter sur sa moto. Ses yeux croisent les miens et il lâche un rictus, amusé. Je rougis de honte et le regarde patiemment, attendant qu'il parte. Si mes souvenirs sont bons, cela fait plus d'un mois que je le vois ici chaque soir à la même heure.

Je t'offrirai les étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant