14. Anniversaires

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7h56 , Cimetière de Stowe    États-Unis

Le soleil est étincelant. Toutes les fleurs déposées il y a peu sur les tombes sont gelées. De la buée sort de mon nez lorsque je respire tant il fait froid. Je frotte mes mains entre elles dans l'espoir de les réchauffer. Le froid de décembre s'installe très vite.

Je parcoure les allées pour arriver sur la tombe d'Erwan. Cinq années qu'il est mort mais c'est toujours aussi dur d'y aller. Je m'agenouille sur le sol dur. Sa tombe, entretenue par ses parents, est
vraiment belle. Sur une plaque est gravée : « la mort a éteint ton humanité mais pas la flamme de notre amour pour toi »

Je me rappelle du jour où j'ai proposé cette citation à ses parents. Ils avaient pleurés et avaient décrétés que cette phrase sera exposée sur la tombe de leur fils. La première année après son décès, je venais le voir chaque semaine. C'était bien quasiment ma seule sortie autre que d'aller au lycée. Je déposais des fleurs et lui parlais. C'était ma façon de faire mon deuil. Du jour au lendemain j'ai arrêté de venir au cimetière. J'évitais a tout prix l'endroit et n'y ai pas mis les pieds pendant deux longues années. Je m'en suis tellement voulue.

Maintenant, j'essaye de venir au moins une fois par mois. Avoir perdu mon premier amour à quinze ans a été une des pires douleurs. Mes proches ont découvert la réalité sur notre relation et certains ont été très clair par rapport à cela: Erwan n'avait pas à sortir avec une jeune fille de quinze ans alors qu'il en avait dix-huit. Ils n'ont pas compris ma douleur et ont préféré en rajouter davantage.

La peur de tomber amoureuse encore une fois et de voir cette personne mourir me terrifie.

Je suis assise devant la tombe d'Erwan sous un soleil radieux, ce qui le correspond parfaitement. Il était « un soleil » pour tout le monde et il était d'une beauté autant intérieure qu'extérieure à couper le souffle. Une larme roule sur ma joue alors que je me rappelle quelques souvenirs heureux en sa présence.

Il aurait vingts-trois ans. Esther fête ses cinq ans aujourd'hui. Le quinze décembre deux-mille-dix-sept a été un des pire jour de ma vie mais aussi l'un des meilleur. On a emmené ma mère à l'hôpital pour accoucher une heure après l'annonce de son décès. Tout le monde criait dans la maison.

Je dépose un bouquet de roses blanches, couleur de paix car j'espère qu'il l'a trouvée.

- Déjà 5 années, mon ange.

J'enfouis mon visages dans mes mains rougies par le froid et je ne peux m'empêcher réprimer un sanglot. Erwan me répétait toujours: « pleurer n'est pas signe de faiblesse, au contraire. Soit fière de pleurer pour revenir encore plus forte »

Il avait raison, comme toujours.

A quelques allées de moi, je remarque un homme vêtu d'une veste en cuire et d'un pantalon noir, accroupis devant une tombe. Je n'arrive pas à distinguer son visage ni à le reconnaître de si loin. Il tient une lettre dans ses mains. Ses épaules sont secouées par de longs sanglots.

De longues minutes passent mais mes larmes ne sèchent pas. Je les essuie grâce à la manche de mon manteau. Je me lève au même moment que l'homme. Nos regards se croisent et nous nous arrêtons net.

Helyo me fixe sans savoir quoi faire. Ce type n'est vraiment pas une personne fréquentable mais qu'est-ce qu'il est mignon quand il enlève enfin son masque d'homme trop sûr de lui.

C'est grave, j'avais prévu de ne plus rien faire pour le voir- vraiment cette fois- et voilà que nous nous croisons dans un cimetière.

Helyo baisse les yeux et avance en direction de la sorti qui se trouve, justement, vers ma position. Il marche de façon incertaine, comme si le ciel allait bientôt lui tomber sur la tête.

Je t'offrirai les étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant