Calicef

61 9 30
                                    

Le moment du départ est arrivé. Une houle de chagrin m'étreint la poitrine et je suffoque presque. Je suis accablée à l'idée de ce que je quitte. En réalité, il ne s'agit pas tant de cet appartement ou même de cette ville. Tu n'es plus, tu as perdu la vie il y a maintenant cinq ans. Cependant, tant que je demeurerai entre ces murs, je te percevrai dans chacune des pièces, lors de chaque trajet que j'effectuerai, les jours d'été abrutissants et les maussades soirées d'hiver, au point que je pourrai croire que tu me surveilles, que tu sais tout de moi, chaque émotion qui me traverse.

Je te perçois dans chaque bouleversement d'air, chaque odeur. Je te ressens dans ces ombres qui flattent mes humeurs. Une voix lointaine m'affirme que tu n'es pas mort. Tu reviens. Il ne s'agit que d'un cauchemar. Un matin, je m'éveillerai et tu seras là. Tes yeux noisette me fixeront et tes longs doigts me caresseront. Je sentirai à nouveau ta chaleur, ta peau, la forme parfaite de tes muscles si familière lorsque tu me serres contre toi. Et je serai en vie comme je le fus. Je n'aurai pas à déménager dans un lieu déjà mort où d'autres fragments de moi se faneront centimètre par centimètre, cellule après cellule.
Je scotche les cartons. Dans cet air saturé d'humidité, j'ai presque l'impression que ton haleine me caresse le cou. Je me sens vide, aspirée par le gouffre mais le lourd martèlement de la pluie m'apaise. Je crois que je vais pleurer. La sueur me pique les yeux. Je pourrais fermer la fenêtre mais je veux entendre la pluie parce que c'est la dernière fois que je l'entendrai de cette façon, à cet endroit. Non pour moi, la pluie, ce n'est plus la pluie.
L'éternité n'est pas dans la durée, elle est dans la profondeur.
Demain est un espoir, pas une promesse.

__________________________________________________________

Petit point critique :

Je vais structurer cette critique en trois points : Fond, Forme, Sentiment.

Tout ce que je vais dire sera plus ou moins subjectif, prière de garder dans l'esprit que je n'ai pas la science infuse.

Fond :

Une personne prépare son déménagement et quitte le foyer plein de souvenir qu'elle a partagée avec son amant mort il y a cinq ans.

L'histoire est assez direct, ce qui est très rafraichissant, la nostalgie est omniprésente dans ce texte ce qui est aussi un bon point.

Certaine image du fond me rendent mal à l'aise et j'ai du mal à savoir si cela est fait exprès. On a idéalisation du corps du défunt : Yeux noisettes, doigt long, muscles parfaits... Mais rien sur sa personnalité ce qui est... Curieux.

Ce qui me fait me demander si je ne lis pas le texte tout de travers c'est le "tu me surveille" qui est un terme plutôt inquiétant, dans ce contexte on aurait tendance à écrire "tu veille sur moi", "tu m'accompagne" surveiller est un terme contrôlant et un peu possessif. Mais pour ce point là plus que pour tout les autres ce n'est que ma sensibilité personnelle.

Le faux problème de ce texte, par contre, c'est que tout est TROP direct, le cœur du texte est dans le premier paragraphe, on a le déménagement, la mort de l'être aimé et la notion de "je te sens même dans la mort". On craint ne pas avoir plus dans le reste.

Cela dit ce n'est pas un problème car :

Forme :

Dès le début on a la très bonne image "les jours d'été abrutissants et les maussades soirées d'hivers", déjà car en deuil même les journées pénibles nous manques mais aussi parce que le personnage ne voit pas sa vie s'améliorer. L'été n'est plus chaud mais abrutissant et l'hiver ne peut être que maussade.

On a aussi plusieurs belles phrases parsemée un peu partout. " je te ressens dans les ombres qui flattent mes humeurs" comme si les ténèbres eux mêmes appelaient le personnage à sombrer. "Je serai en vie comme je le fut" que je n'ai pas besoin d'expliciter et bien sûr "demain est un espoir pas une promesse" l'on devine que le personnage  est entièrement mort de l'intérieur et espère chaque jour avoir la force de se lever. C'est une très belle phrase.

La fin est un véritable coup de marteau d'ailleurs, très efficace. Même si j'ai du mal à voir la corrélation entre "l'éternité n'est pas dans la durée, elle est dans la profondeur." avec le reste du poème, surtout que, de part son placement, on pourrait la prendre comme la thèse du texte.

Sentiments :

Là le texte ne fait pas défaut, je pense que tout ceux qui ont perdu un être cher peuvent s'y identifier.

Je n'ai pas grand chose à dire d'autre, j'aime beaucoup la métaphore de la pluie, ce temps de pause, de repos, quand le bruit est si fort qu'on n'arrive plus à penser et l'effroyable réalité que, parfois, ne pas pouvoir penser est un cadeau.

Conclusion :

Je vais être honnête, je n'ai pas bien aimé ce texte. Comme je l'ai dit certaines choses m'ont faites tiquer donc déjà j'avais  une mauvaise image, le premier paragraphe donne l'essentiel des informations donc je me demandais qu'est ce que j'allais découvrir pour trouver une extrapolation de ce qui à déjà été dit. C'est dommage justement car la fin était très belle et ces quelques belles images. La vérité c'est que le texte est très inégale au profit de ces "coups de marteaux". Je l'ai dit et je le redit, je préfère la technique au sentiment, certainement à défaut.

Rappelez vous, ce sont les goûts et les couleurs.

Encore une fois, c'est parfait si vous n'êtes pas d'accords, on est là pour discuter. Et quand je dit "vous" je parle de tout le monde ^^ J'aimerai beaucoup que des personnes autre que l'auteur rajoute leurs propres interprétations, ce serait vachement cool !

MélodoniaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant