Chapitre 10: Syeon

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Je venais de quitter l'immeuble où résidait Mirae et commençais à imaginer la suite de la nuit. Musique à fond, danser, manger. Pensais je en tapotant sur le volant de ma voiture au rythme de la musique qui passait à la radio. La route n'était pas éclairée mais je la connaissais par cœur. Même après quatre années. Je ne vivais plus chez Min-Ho, mais dans un tout nouvel appartement à une vingtaine de minutes, au tout dernier étage.

J'appuyais sur la touche de l'ascenseur et attendais son arrivée qui commençait à se faire longue. Je n'étais pas patient. Tels père, tels fils ! Me criait ma conscience.

J'étais arrivée sur le toit de l'immeuble, les bras chargés. Je posais un paquet de chips, des bouteilles de soju et mes cookies préférés sur la table en plastique. J'allumais mon enceinte portable et mettais ma playlist préparée à l'avance. J'aurai aimé que Mirae soit présente. On aurait pu s'amuser comme à la bonne époque.

Les secondes, les minutes, les heures passaient jusqu'à l'aube. Je n'avais pas vu le temps passer. Peut-être était ce à cause des litres d'alcool que j'avais ingéré. Je courrais jusqu'à mon appartement, m'habillait et me mettait en route pour l'entreprise.

J'entrais dans mon bureau et m'affalait sur le canapé en cuir, épuisé de n'avoir rien dormit de la nuit. Je ne pouvais en vouloir qu'à moi même d'être dans un état pareil un jour important. Une réunion devait avoir lieu à dix heure, afin de convaincre d'autres entreprises de devenir nos clients. Deux problèmes me frappaient en plein visage. Le premier : je n'avais pas préparé mon speech. Le deuxième : je n'étais pas du tout en état de tenir debout devant une dizaine d'hommes et de femmes à hautes exigences. Je me frottais le visage, désespéré lorsqu'une idée illuminait mon esprit. Je n'est qu'à demander à Eun-Ji de le faire. Je ne pouvais pas définir si cette idée était bonne ou mauvaise mais je me devais de la tenter. Je me jetais sur mon téléphone portable et lui envoyait :

[Salut, je ne pourrais pas assister à la réunion de dix heure et j'apprécierai que tu la fasse à ma place.
Merci.]

Sa réponse ne se faisait pas attendre.

[J'arrive dans cinq minutes. Il me faudra des explications.]

Je sautais de joie et me dirigeais aux toilettes afin de me rincer le visage. Je me regardais dans le miroir et prenais peur en voyant mes cernes prononcées et mes cheveux complètement décoiffés. J'humidifiais mes mains et les passais entre mes cheveux. En quatre ans, j'avais perdu mes reflets bruns et dorés, mes cheveux étaient aussi noirs que les rayures d'un zèbre. Les deux mains appuyées sur le lave-main, j'inspirais profondément avant de me regarder dans le blanc des yeux. Tout se passera bien. J'essayais de me rassurer et retournais m'asseoir sur mon fauteuil en cuir noir.

Un claquement résonnait dans tout le bureau. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait et relevais la tête de la table. Je m'étais endormis tel un enfant. Eun-Ji fronçait les sourcils, les bras croisés.

Son physique avait légèrement changé. Ses cheveux étaient devenue poivre et sel et quelques rides ornaient son visage aux traits froids. Cependant, il n'avait pas perdu sa silhouette forte et imposante qu'aimait tant ma mère. Il portait toujours son vieux costume couleur crème étant sûrement plus vieux que moi. Les boutons ouverts de sa chemise laissaient entrevoir quelques poiles grisonnant décorant sa poitrine. Son caractère, lui aussi, n'avait pas changé depuis mon départ. Maniaque du contrôle, égoïste et sévère. Je me demandais ce qu'avait trouvé ma mère de si spécial en lui au point de supporter ses adultères. Était il différent à l'époque ? Je n'en savais rien.

- Tu es bourré ? Est-ce que tu te rends compte de l'importance de cette entreprise à mes yeux ?

Disait il sur un ton des plus glaciales. J'avais la désagréable sensation de me retrouver quatre ans en arrière. Il passait une main dans ses cheveux avant de la faire claquer une deuxième fois sur le bureau. Je l'observais sans prononcer le moindre mot.

- Ce n'est pas possible...

Marmonnait il dans sa barbe de trois jours. Sa colère se faisait ressentir dans l'atmosphère de la pièce éclairée seulement d'une petite lampe.

- Je pensais t'avoir appris comment se tenir. Comment ne pas tout foutre en l'air ! Tu me décevra toujours.

Il s'approchait de moi d'une démarche déterminée et faisait claquer la paume de sa main, non pas sur le bureau mais sur ma joue. Je me levais bouche bée.

- Je ne veux pas reprendre les reines de tes entreprises. Je ne l'ai jamais voulu et ça ne changera pas en me frappant. Tu m'as forcé à partir une fois mais pas deux. Je ne suis pas un problème que tu peux régler en envoyant à l'autre bout du monde.

J'étais resté calme et sûr de moi. Je ne voulais plus avoir peur de lui où de quinconce. J'étais maître de moi même.

- Je vais annoncer aux employés mon départ et reprendre ma vie en main. Je m'excuse sincèrement de ne pas être comme toi et de froisser ton égaux. Je m'excuse sincèrement de ne pas avoir assez de cran pour supporter tes crises de colère comme le faisait ma mère. Et je m'excuse encore une fois sincèrement de ne pas être un enfoiré.

Je sortais de cette pièce emplie de tension et demandais l'attention de tout le monde. Mon regard croisait celui de Mirae et une bouffée de confiance m'envahissait. C'était maintenant ou jamais. Tu peux le faire.

- Je vous remercie de votre attention. C'est relativement difficile pour moi de vous annoncer cela après si peu de temps passé à vos côtés. Après réflexion, j'ai décidé de démissionner. Je ne souhaite plus être votre supérieur. Merci de m'avoir supporté jusque là.

La porte de l'entreprise venait de se fermer pour ensuite s'ouvrir d'un fin grincement. Ma cigarette fumante, je me tournais afin de faire face à Mirae. Je me fichais d'être ou de ne pas être dans un coin spécial fumeur.

- Tu es certain de ta prendre la bonne décision ? Tu as travaillé si dur pour ça, ce serait dommage. Tu ne crois pas ?

Me demandait Mirae. Ses cheveux étaient comme à leur habitude, emmêlés. Elle portait un pull fin en laine d'un orange pétant. On ne pouvait pas la perdre de vue. Son jean blanc épousait à la perfection ses formes prononcées. Mes yeux étaient sans cesse attirés par ses lèvres qui n'attendaient que d'être embrassés et ses joue rosées naturellement lorsqu'elle mettait les pieds dehors.

- Je ne suis sûr de rien mais je pense que c'était ce que je devais faire pour me sentir bien.

Lui répondais je en écrasant ma cigarette contre le métal d'une poubelle avant de l'insérer dans cette dernière. A l'époque, Mirae détestait me voir fumer mais c'était un plaisir que je ne me sentais pas capable d'abandonner aux périlles de ma santé.

- Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ?

Elle s'asseyait sur le rebord du trottoir et me faisait signe de la rejoindre à ses côtés. Elle savait que je n'étais pas dans mon assiette. J'ai toujours été fasciné du fait qu'elle puisse lire en moi comme dans un livre ouvert.

- Je n'en sais rien. Peut-être que je vais me concentrer sur ma musique. Ou me lancer dans un autre projet.

Je ressortais une autre cigarette de son emballage de carton et lui en proposais une qu'elle prenait à ma grande surprise. Je fumais davantage lorsque j'étais stressé, ça me détendais.

- Tu fumes maintenant ? Je croyais que tu étais totalement contre.

- Rarement. Seulement quand quelqu'un m'en propose une ou en soirée.

Comme quoi, les gens changent. Pensais je en allumant ma cigarette. J'approchais mon visage du sien afin d'allumer la sienne à l'aide de la mienne. Je sentais son souffle s'accélérait de la même façon qu'il y a quatre ans. J'étais fier de voir que je lui faisais toujours autant d'effets.

Elle recrachait sa fumée dans l'air et se levait.

- Ma pause est terminée. Je vais retournée au travail.

Je lui attrapais la main et lui proposais :

- Et si tu me laissais t'emmener quelque part.

Pour toi et seulement toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant