𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐄 𝐐𝐔𝐀𝐓𝐑𝐄

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Deiji


La nuit est noire, dehors. Le lampadaire, à ma fenêtre peine à rester éclairé, l'ampoule prête à exploser. Près de moi, je perçois la respiration délicate de Hayun, qui s'est endormie lourdement, alors qu'elle me berçait dans son étreinte. Mon regard se perd sur elle, dont l'illumination agit tel un stroboscope sur sa peau claire. Ses paupières sont paisibles, sa respiration sifflant légèrement entre ses fines lèvres, toujours rosées.

Mes jambes recroquevillées contre ma poitrine, je laisse tomber ma tempe contre le mur, mes iris comptant les étoiles dans le ciel foncé. L'une d'elle est Deiru, probablement la plus brillante. Je la trouve, sa lumière radie intensément. Si fort qu'elle semble se rapprocher de moi, incapable de détacher mes yeux de ses rayonnements. Tu me manques, Deiru. Mon soupir est discret, presque silencieux.

Je sursaute doucement de sentir Hayun s'agiter calmement sous les draps. Elle bascule sur son flanc droit, plongeant ses mains sous sa tête, plissant adorablement son nez. Son regard papillonne, puis elle l'ouvre sur moi, des cernes jonchant ses yeux foncés. Dans un murmure, elle s'excuse de s'être endormie. Mes sourcils se froncent, et je secoue la tête silencieusement. Mes lèvres se courbent, avant de lui dire de se rendormir, qu' une nouvelle rude journée l'attend, dans quelques heures. Mais, elle se redresse, bâillant doucement. Elle replace sa crinière brune sur son crâne, réprimant un nouveau bâillement. Une glace ? Mes yeux s'arrondissent, et je pince mes lèvres. Ça fait longtemps qu'on n'a pas ennuyé Min, la nuit. Son sourire est espiègle, et elle semble sérieuse dans ses intentions.

Min est le responsable de notre glacier favoris, à Hayun, Deiru et moi. Sa boutique est l'unique endroit où j'ai été capable de me rendre, malgré la disparition de mon frère. La mélodie de son rire a été comme emprisonnée dans les murs, et j'aime l'entendre. Peu importe à quel point mon cœur se serre de ressentir le manque que son absence provoque, je voudrais pouvoir entendre le rire de Deiru pour toujours, tant il est apaisant, soignant tous mes maux.

Hayun dessine une moue, afin de me faire céder, ses grandes iris chocolats brillantes. Je replace ses cheveux derrière son oreille, avant de lover son visage dans mes paumes. Je lui rappelle qu'elle travaille bientôt, et qu'elle sera épuisée, mais elle s'extirpe de la couverture, dans son gros pull à capuche. Un long soupir m'échappe, je lui cède, alors qu'elle réprime son euphorie, son regard pétillant la trahissant.

Je passe un pull en laine, noir, large, son grand col roulé galbant ma mâchoire. Mes chaussettes blanches, remontées sur mes chevilles, maintiennent mon leggings sombre. J'enfile mes Converses jaunes, dont chaque pointe est décorée d'une pâquerette souriante, que Deiru a dessiné lorsque l'on a fait du glacier de Min notre sortie nocturne favorite. Elles sont la paire pour manger une glace, elles ne quittent jamais leur emplacement, si ce n'est pas pour qu'elles m'accompagnent déguster les crèmes glacées – et divines– de Min.


Hayun noue ses doigts aux miens, dehors, alors que l'on arpente la rue difficilement éclairée. Nos pas son synchrones, toujours en osmose l'une avec l'autre. Elle répète ses pas, les mélodies sur lesquelles elle danse, pour Xcalibur, gracieuse sur le trottoir, dont les lampadaires semblent jouer de sa présence. Ou c'est elle, qui joue avec leur lumière.

Hayun est belle. Pas seulement physiquement. Lorsqu'elle danse. Elle possède une délicatesse, intense, que Deiru et moi n'avons jamais eu. Nous, tout a toujours été fougueux, franc, brut, violent. Comme si on dansait pour la dernière fois à chaque chorégraphie. Hayun, elle, fait vibrer son auditoire dans une douceur enivrante, contant son histoire dans la grâce de ses mouvements, chaque mot a chaque pas.

𝘙𝘖𝘔𝘈𝘕 - 𝐒𝐌𝐈𝐋𝐄 𝐅𝐋𝐎𝐖𝐄𝐑Où les histoires vivent. Découvrez maintenant