Prologue

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La voilà.

À l'heure, comme tous les jours. Shôta tira une latte sur sa clope à demi consumée en tapant du pied avec impatience devant la façade de l'épicerie. Son corps se redressa, comme attiré par son petit soleil. Sa lumière, celle qui éclairait ses ténèbres et qui l'empêchait d'y sombrer complètement.

Il ne la connaissait pas.

Elle ne le connaissait pas.

En réalité, elle ne savait même pas qu'il existait.

Il vivait dans son ombre depuis des mois. La première fois qu'il l'avait vue, il avait cru qu'un ange était tombé du ciel. Bordel, il avait eu l'impression que son souffle s'était bloqué dans sa gorge, que l'air s'était raréfié autour de lui.

Elle, si jolie. Si... innocente. Apparue comme un putain de miracle alors qu'il tentait d'oublier les litres de sang qu'il venait de verser sur ses mains.

Encore.

Quand son regard s'était arrêté sur elle pour la première fois, il pleuvait des cordes. Rien d'étonnant pour Tokyo, mais elle... Elle revenait du lycée, dans son uniforme à carreau si sexy. Rien que d'y penser, il savait qu'il en aurait la trique pendant des heures. Elle marchait vite, ses cahiers sur la tête pour se protéger des trombes d'eau que déversait le ciel.

Et elle était tombée. En réalité, elle s'était carrément viandée. Et lui, il n'était pas arrivé à la quitter des yeux.

C'était une gaijin, une étrangère, tout le montrait : de ses cheveux blonds si longs qu'ils lui frôlaient le haut du cul, à sa peau blanche, laiteuse.

Si soyeuse.

Shôta s'était attendu à ce qu'elle se mette à chialer, comme toutes les gamines de son âge.

Mais elle avait ri. Elle avait éclaté de rire, alors qu'elle ressemblait à un chaton trempé, le visage levé vers le ciel, les paumes écartées comme pour essayer de recueillir l'eau dans ses petites mains.

C'est à ce moment-là qu'il avait su.

Qu'il n'y aurait plus qu'elle.

Ce n'était pas de l'amour, non. Il ne connaissait pas ce mot. Dans ce monde, dans son monde, mieux valait éviter de le prononcer.

C'était bien pire que ça.

Parce que depuis des mois, elle était devenue son Obsession.

Son petit soleil.

Yakuza, la bête d'ObiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant