Chapitre 5

30 9 4
                                    


Zack


Je remplis mon sac à dos, énumère une dernière fois ma to do list censé me permettre de ne rien oublier. Je n'arrive toujours pas à y croire. J'ai passé les derniers jours à espérer que les menaces de Jean Marie soient vaines. Que ce n'était qu'un énième coup de pression. Mais je dois me rendre à l'évidence : c'est bel et bien réel. Je range le reste de mes affaires avant de m'emparer de l'unique souvenir que j'emporterais avec moi. Sans le vouloir, mes doigts effleurent son visage imprimé pour l'éternité sur le papier. Le froid du cadre se révèle sous leurs pulpes tendres. Je réprime un frisson et me perds dans ma contemplation. Cette photo s'avère la seule importante à mes yeux. Celle qui nous a fait grandir. Son sourire franc, ses fossettes joyeuses, ses iris pétillants se gravent un peu plus loin en moi, tout comme nos soirées passées à refaire le monde et à fantasmer notre avenir. On a toujours su ce que nous désirions tous les trois, Matthieu se rêvait en capitaine de brigade, Alexis se voyait en père de famille comblé, et moi, moi je n'imaginais pas mon existence sans eux. Jusqu'à ce que la vie nous mette des bâtons dans les roues. C'était ma famille, celle que j'avais choisie. Une certitude émerge à cette idée : sans lui, je ne me sentirais chez moi nulle part.

— Les trois mousquetaires, murmuré-je tout en lestant mon sac de son souvenir.

J'interromps ma besogne à la seconde ou la sonnerie de l'entrée retentit.

Jean-Marie affublé de son sempiternel uniforme me toise comme s'il s'agissait de la première fois. Sa démarche assurée lorsqu'il franchit le seuil m'horripile. Mes muscles se tendent. Je claque la porte, incapable de retenir un soupir.

— C'est tout ce que tu emportes ? demande-t-il, fixant mon bagage. 

— À quoi bon s'encombrer, je ne compte pas m'éterniser là-bas.

Il fait volte-face, sa mine renfrognée m'indique qu'il ne s'attendait pas à ça.

— Zack....

Je l'interromps, son ton paternaliste m'agace.

— Pourquoi tu es là ?

— Je... je tenais à te dire au revoir.

Je ricane.

— Ouais et tu voulais t'assurer que je parte bien, pas vrai ?

Pour toute réponse, il fixe le plancher. Je m'en doutais. Il peut se targuer de m'offrir sa confiance, la vérité est tout autre.

— J'ai passé l'âge d'avoir un baby-sitter.

— Je sais... Je m'inquiète c'est tout. Tu ne peux pas m'en vouloir pour ça.

— Bien sûr que si ! Tu es à l'origine de cette situation. Si tu te souciais autant de moi, tu aurais répondu à mes appels de la semaine dernière au lieu de m'ignorer.

— Parce que je savais ce que tu cherchais. Que tu l'admettes ou non, tu as besoin d'aide. Crois-moi, un jour tu t'en rendras compte.

— Comme j'aurais dû le faire après le décès de mon père, raillé-je amer. J'ai conscience que c'est un coup bas, mais c'est plus fort que moi. Tu veux que je te dise, tu te contrefous de ma vie depuis le début ! Continue de te donner de grands airs de mec irréprochable, mais toi et moi savons que tu bluffes.

— Zack je...

— Qu'est-ce qui s'est passé ce jour-là ? Pourquoi mon père n'est jamais rentré à la maison ? Alors que sa garde était terminée depuis longtemps. Vas-y, explique moi par quel miracle ton meilleur ami a pu se retrouve dans ce camion !

Je te retrouverai toujoursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant