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Il lui raconta tout. D'une voix fébrile, parfois bien trop tremblante et en se retenant se crier sa haine envers le monde.

Il commença son récit en lui racontant son passé, le harcèlement, les coups de son beau-frère et tous les regards sur lui pour sa sexualité qui ne regardait personne.

Il lui expliqua, le début d'une anxiété sociale invisible, la peur qui irradiait son corps lorsqu'il se retrouvait au milieu de trop de monde, qu'on le regardait en le montrant du doigt, riant parce que : Il est gay.

Il expliqua ses hommes qui avaient obtenu sa confiance, simplement pour l'humilier par la suite. L'appréhension lorsqu'on l'approchait, pensant toujours qu'on allait se moquer de lui, se servir de lui pour rire, pour s'amuser. Il avait toujours fini par baisser ses gardes, par se laisser prendre dans les filets de ses personnes qui n'avaient voulu que son mal. Il avait toujours fini par en ressentir les retombés, par avoir l'impression d'étouffer, seul, perdu dans ce monde sans savoir sur qui compté, sans savoir à qui se confier.

S'en suivit les crises d'angoisses, devant la grille du lycée, incapable de faire un pas, se forçant parfois pour ne pas avoir à justifier des absences aux cours, qu'il n'aurait de toute façon pas pu justifier. Le début de ses absences mentales arriva en même temps. Durant ses nombreuses angoisses scolaires, il avait trouvé le moyen de faire taire sa conscience, d'éteindre son esprit et de le projeter hors de son corps le temps de quelques instants, se laissant du répits, se rendant absent du monde réel pour fuir la peur, l'angoisse, la sensation d'étouffement et les maux de ventre. Avec le temps, cette mécanique était devenue systématique, et il ne contrôlait plus rien. Il était absent tout le temps, lorsqu'il avait peur, lorsqu'il réfléchissait, et dès lors qu'il se mit à analyser le comportement des gens autour de lui.

La peur qu'on se joue de nouveau de lui l'avait forcé à développer cette capacité d'analyse qui lui venait de son père. Un regard, un geste, un rire forcé, un tremblement de la main, un mot prononcé d'une manière différente, plus rien ne lui échappait. Il comprenait tout ce qu'il se passait autour de lui, il captait tous les comportements, se rendait compte que, même là où il pensait qu'on ne le voyait pas, il était montré du doigt pour son comportement étrange.

Toutes ses mécaniques qu'il avait mises en place pour se protéger des autres s'étaient en fait retournées contre lui. Il ne gérait rien, ne contrôlait rien. Sa charge mentale déjà bien trop lourde ne faisait que s'alourdir, et sa santé ne faisait que se dégrader.

Vint les premiers rendez-vous avec des médecins. On soupçonna d'abord un enfant trop fainéant qui ne voulait plus aller à l'école, qui ne voulait pas travailler. On mit ensuite sa détresse sur le dos d'un manque d'attention, de l'absence de son père parti à l'armée. Puis, au bout de plusieurs rendez-vous, on lui prescrit des antidépresseurs ainsi que des somnifères, pensant régler rapidement ses problèmes de sommeil liés à ses angoisses, pensant ne plus le revoir, parce qu'il aurait eu ce qu'il voulait.

Les médicaments n'arrangèrent rien. On lui dit que tout était dans sa tête, qu'il se faisait des films, qu'il psychotait. Sa mère le croyait pourtant, et elle était bien la seule. Ses quelques amis du lycée ne lui prêtaient aucune attention, pensant aussi qu'il en faisait de trop pour attirer l'attention sur lui.

Ils pensèrent de la même façon, le jour où tout était devenu de trop. Le jour où, l'irréparable se produisit.

Orion n'avait jamais voulu inquiéter sa mère, elle se sentait déjà bien trop coupable de se qui arrivait à son fils. Ce jour-là, il ne lui avait parlé de rien, il n'avait pas cherché à lui demandé de ne pas aller en cours le matin, se contentant de sourire en essayant de faire abstraction de la sensation désagréable dans sa poitrine. Il était arrivé au lycée avec la même boule au ventre que chaque jour qui avait précédé celui-là.

TᎯᏦℰ ℳᎽ ℋᎯℕⅅ (ℙℒℰᎯЅℰ...)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant