Chapitre 4 - Megan

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Lorsque nous arrivons à la place Saint-Pierre après cinq courtes minutes de marche, nous sommes immédiatement assaillies par le bruit de la musique et des nombreuses personnes qui discutent les unes avec les autres. Le printemps étant enfin arrivé, les touristes s'ajoutent aux locaux et forment une foule impressionnante. Aussi, une équipe de police est là, prête à intervenir en cas de débordement.

Nous nous frayons ainsi un passage entre tous pour atteindre le bar et commandons deux bières. Une fois celles-ci récupérées, nous cherchons une place assise à l'une des tables. Je déteste rester debout au milieu du monde, mais je n'aperçois aucune place libre.

— Viens, je connais quelqu'un.

Je hoche la tête et la suis, faisant attention à ne pas renverser la boisson que je tiens dans ma main, même lorsque quelqu'un me bouscule. Je grince des dents à chaque fois qu'un corps se frotte malencontreusement au mien, me retenant cependant de me retourner en grognant tel un chien trop sensible.

— Salut ! s'exclame Rim en arrivant à une table occupée par quatre mecs de notre âge. Vous nous faites une place ?

— Oh, Rim ! Qu'est-ce que tu fais ici ? Et c'est qui, cette jolie demoiselle qui t'accompagne ?

Alors que ma meilleure amie rit, je grimace. J'espère qu'il n'a pas pour but de flirter avec moi, parce qu'il va vite être déçu. Surtout quand mon pied finira en plein dans son entrejambe.

— C'est Megan, ma meilleure amie.

— Ah, oui. La fameuse.

Il tend un bras vers moi, ce qui me fait aussitôt reculer.

— Enchanté, reprend-il en ignorant ma réaction, je m'appelle Thomas, et ces trois têtes de cons, c'est Julian, John et Dylan.

— Salut, disent-ils en choeur.

— Allez, glissez-vous entre nous, ça va le faire !

Je tente de prendre place à côté de Julian – celui qui m'inspire le plus confiance des quatre –, mais Dylan se dégage plus vite et m'invite silencieusement à m'asseoir à sa gauche.

Ses cheveux bruns et sa barbe naissante le rendent sexy, pas étonnant que toutes les femmes présentes paraissent graviter autour de lui. À présent assise à ses côtés, je me fais dévisager par certaines, trop jalouses de ne pas être à ma place, s'imaginant probablement que je suis sa copine.

Lorsqu'il se penche vers moi pour me parler dans l'oreille, je me décale pour l'éviter.

Ne se laissant pas abattre, il chuchote :

— Content de te rencontrer, Megan.

— De même, dis-je par politesse, le ton sec.

— Que fais-tu dans la vie ? me questionne-t-il, ignorant mon air renfrogné.

— Rien qui ne te concerne, grogné-je plus durement pour lui faire comprendre que je n'ai aucune intention de faire connaissance avec lui.

— Très bien. Tu ne veux pas parler, j'ai compris.

Il reporte son regard vers ses potes, ne faisant plus attention à moi.

Parfait.

Je bois une gorgée de ma bière, en écoutant vaguement les discussions passionnées à la table. Lorsque je réalise que les garçons parlent de voiture, je m'intéresse immédiatement à ce qui se dit. Rim savait-elle qu'ils seraient là, ou est-ce un pur hasard ?

— D'ailleurs, Megan a obtenu un contrat de travail, aujourd'hui ! s'exclame justement celle-ci en me pointant du doigt.

— Oui... enfin, c'est pas grand-chose.

— Tu déconnes là ? Ça fait un an que tu cherches un boulot. Elle a été contactée par une nouvelle marque automobile sportive pour être leur ingénieure automobile. C'est littéralement ce qu'elle cherchait, et en plus, elle va pouvoir dessiner les premiers prototypes de la marque elle-même !

Tous se tournent vers moi en me félicitant, tous sauf mon voisin. Celui-ci attend que les autres reprennent la discussion pour se pencher une nouvelle fois vers moi.

— Bravo. J'ai hâte de voir ton travail.

— Qui te dit que tu le verras un jour ? rétorqué-je, mauvaise.

Il hausse les épaules, un sourire au coin des lèvres, l'air de cacher quelque chose. Soudain, il me donne un léger coup dans l'épaule. Immédiatement, je me crispe et le stress m'envahit. Je me force à ne pas m'y plier.

Inspirer.

Expirer.

C'est ce qu'on a travaillé, avec mon psychiatre, pendant nos nombreuses séances thérapeutiques. Inspirer, et expirer. Se répéter que les films que l'on se fait, c'est dans la tête et que le risque que cela arrive vraiment est quasiment inexistant. Recommencer jusqu'à ce que le brouillard se dissipe.

Résister.

Être forte.

— Tout va bien ? me demande Dylan, les sourcils froncés.

— Très bien. Tant que tu ne t'approches pas plus de moi, réponds-je en le repoussant.

Lorsque mes mains se posent sur son épaule, une étrange sensation se forme au creux de mon coeur. Comme s'il était soudain réchauffé. Je les retire au plus vite, et fuis son regard. Lui aussi a senti cette soudaine électricité qui nous a liés le temps d'une seconde. Autour de nous, personne ne fait attention à ce qu'il se passe entre lui et moi. Comme si ce lien nous avait transportés dans un univers parallèle.

Je me lève soudain et rejoins Rim, restant debout à ses côtés par manque de place.

— Tout va bien, mon canard ? me demande-t-elle en me dévisageant. Tu veux rentrer ?

— Oui, ça va. Je voulais aller danser.

C'est la première chose qui m'est venue à l'esprit, et aussitôt l'ai-je formulé que je le regrette amèrement. Danser n'est déjà pas quelque chose que j'apprécie particulièrement, ça l'est encore moins lorsque cela m'oblige à me mélanger à beaucoup trop de monde, et surtout, à des hommes aux mains potentiellement baladeuses.

— Allez, on y va ! s'écrie ma meilleure amie en tapant dans ses mains comme un enfant.

Je lui adresse un sourire faux et la suis jusqu'au milieu de la piste. Déjà, elle commence à se déhancher en me forçant à faire de même. Finalement, j'en viens à regretter ma place assise à côté de ce Dylan. Je ne le connais pas, je n'ai pas envie de le connaître, et pitié que je ne le revois jamais.

Pourtant, quelque chose me dit que mon souhait ne se réalisera malheureusement pas.

Heart Racing [SOUS CONTRAT D'ÉDITION NISHA ET CÆTERA]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant