37. Chicago

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Augustin

Je savais les mots que me réservaient mon père. J'aurais même pu les réciter en même temps que lui, assit sur une chaise face à son bureau et à sa mine énervé.

Ça fait des mois que j'entends les mêmes phrases, les mêmes avertissements, qui me hantent jours et nuits, encore plus ces derniers temps et pourtant, je n'arrive toujours pas à les prononcer à voix haute.

Je ferme la porte derrière moi et m'appuie contre le mur, en soupirant. Je savais à quoi je m'exposais en revenant ici, mais ça fait toujours un peu mal.

J'ai laissé Mia rentrer seule à l'hôtel. J'espère qu'elle ne s'est pas perdue. Je ne sais pas si elle est déjà venue ici. J'ai toujours du mal à lui poser des questions. Parce que quand je le fais, elle me regarde différemment. Et ça me rend nerveux.

Mes pensées s'interrompent quand mon téléphone se met à vibrer dans ma poche.

C'est Rhea.

- Oui, allô ?

- Salut, vous êtes bien arrivés à Chicago ?

- Oui. Depuis hier soir, Rhea, je lui rappelle.

- Oui, oui. J'ai oublié de vous appeler.

Je me décide à avancer pour longer le couloir. Jusqu'à arriver à l'ascenseur.

- Tout s'est bien passé ? Tu es avec Mia ?

Bien sûr que non. Sinon elle me tuerait de savoir que j'ai un téléphone alors qu'elle meurt d'envie d'appeler sa famille.

- Elle est à l'hôtel. Papa a demandé à me voir.

- Ah, répond simplement Rhea.

Elle sait ce pour quoi il souhaitait me voir. Elle sait tout, comme pas mal de gens. Et elle sait qu'il ne vaut mieux pas m'interroger à ce sujet.

- Tu as raccompagné Mia à l'hôtel alors ? demande-t-elle pour changer de sujet.

- Je lui ai indiqué le chemin, j'affirme.

- Augustin ! Ce n'est pas sérieux, elle est dans une ville qu'elle ne connaît pas.

Je me pince l'arrête du nez, sans faire attention aux remarques de Rhea. Mia est une grande fille.

J'entre dans l'ascenseur et appuie sur le bouton du rez-de-chaussée.

- Ça ira pour elle, tentais-je pour rassurer Rhea.

- Bon. Et...et tu es passé voir ta mère ?

Je me crispe. Je déteste quand on aborde ce sujet. J'ai l'impression de redevenir ce gamin au centre de l'attention, celui pour qui on avait peur qu'il développe des traumatismes.

Quel malheur ça aurait été pour le petit prodige de Cole Faure.

- J'ai pas le temps.

J'entends Rhea soupirer à l'autre bout du fil. Je m'appuie contre la rambarde et ferme les yeux, en pensant à un endroit où je me sentirai bien. Je les réouvre aussitôt.

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