L'Empire d'Erèbe [Mafia Romance]

Chapitre 4 - Fuite

JUILLET

En écoute : Nina Simone - Don't Let Me Be Misunderstood

Sienna

- Toutes les personnes qui t'ont un jour dit que le rouge vif t'allait bien t'ont menti. Vraiment sans exception.

Sa sœur avait raison. Sienna retira son pull cerise dont les motifs blancs s'étaient détendus jusqu'à en devenir indéchiffrables.

- C'est toi qui m'as demandé si j'avais des affaires de montagne ! Voilà, c'est tout ce que j'ai.

- Que tu n'as plus, rectifia sa sœur en balançant le pull miteux à la poubelle. C'est pas grave Sissi, tu en achèteras là-bas. A ce stade tu feras meilleure impression en te ramenant sans rien, que s'ils te voient sortir cette horreur de tes bagages.

Sienna rit de bon cœur et s'assit sur sa valise pour réussir à la fermer.

- Je ne me sens pas coupable que tu te maries avec lui à ma place.

Sienna releva la tête. Sa sœur s'était figée et la regardait avec intensité.

- Voilà c'est dit. Je ne me sens pas coupable parce que tu as tellement insisté auprès de Papa que j'ai fini par avoir l'impression que tu le voulais vraiment. Que ce n'était pas juste pour me protéger. Et puis tu savais en lui demandant de prendre ma place que je m'inquièterais énormément pour toi quand tu serais là-bas. Echanger avec moi c'était me protéger d'un mal pour le remplacer par un autre. Donc je ne me sens pas coupable.

Sienna sourit à sa grande sœur et s'assit sur le lit à côté d'elle pour la prendre dans ses bras.

- Tu vas me manquer Romy, souffla Sienna en embrassant la joue de sa sœur qui réprimait ses larmes.

- Tu vas me manquer aussi.

Elles ne se verraient plus avant un moment. Sienna serait occupée par sa nouvelle vie chez les D'Arborée, et Romy partait chez des cousins aux États-Unis, pour leur prêter main forte. Les tensions entre les États de la côte Est et le centre du pays redoublaient, et l'instabilité politique engendrait à son tour une instabilité économique sans précédent qui faisait beaucoup de mal au business familial.

Romy renifla.

- Mais j'aimerais que tu me dises pourquoi tu tenais autant à prendre ma place. Je sais que je viens de te faire une jolie tirade, mais j'ai quand même besoin que tu me rassures, Sissi. Je ne comprends pas ce qui te motive et j'ai peur de le découvrir un jour, et que ce soit trop tard, et de m'en vouloir toute ma vie et de ne pas p...pou-voir...

Romy pleurait maintenant à chaudes larmes, dévorée par l'inquiétude et la culpabilité.

- Non, oh non ! Roro ça n'a rien à voir avec toi. Je savais que tu ne tenais pas particulièrement à ce mariage et que tu ne te formaliserais pas si je me dévouais, et je ...

Sienna souffla.

- J'ai vraiment besoin de partir Romy. Je ne trouve pas ma place ici, ni dans le réseau, et je vous serai d'une plus grande utilité ailleurs. Si je reste ici, je vais devenir folle. Ou droguée. Ou les deux.

Cette remarque réussit à faire sortir un petit rire de la gorge nouée de sa sœur, qui commença à sécher ses larmes.

- Je te crois pour cette fois mais attends-toi à ce que je te repose la question la semaine prochaine. Tout est allé si vite.

Les deux jeunes femmes avaient effectivement eu un mois très occupé.

Leur père avait, un soir de mai, convoqué ses trois enfants pour leur faire part d'une idée d'alliance avec le Piémont (le frère de Sienna s'était vite désintéressé du sujet pour des raisons évidentes). Bloqués par les grosses familles mafieuses en France, ils n'arrivaient pas à développer leurs activités sans se faire d'ennemis trop entreprenants, et l'année avait été marqué par une succession de mini échecs, où ils avaient dû renoncer à leurs projets une fois lancés, en raison des trop grandes menaces qui déferlaient sur eux dès qu'ils tentaient de produire autre chose que des armes.