Chapitre 2: La rencontre

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Des feuilles de divers tons se plaisent dans l'exécution de toute une pluralité de mouvements. Vous les observez, admiratif de tant de beauté. Un tourbillon de feuilles se plait à vous encercler. Vous l'appréciez. Nul de ses pas ne vous échappe. Il se dissipe. Un membre du ballet échoue sur votre front. Cette surprise vous pousse à fermer les yeux momentanément. Vous les ouvrez. Des enfants se mettent à courir et leur énergie vous bouscule. Une dame passe à côté de vous tout en prenant soin de s'excuser avant de vous quitter.

- Les enfants, ne courez pas! l'entendez-vous dire.

Vous l'observez. Votre regard se perd. Vos pensées cheminent en quelques territoires. Un sourire hideux apparait sur votre face. Vous ne demandez pas tant et voilà que tout ceci vous est offert. Vous n'espérez pas tant et voilà qu'on vous offre ce quelque chose inespéré dans de rutilants couverts. Soit, vous ne refuserez pas de si beaux présents. Cela n'est pas d'usage et on vous traitera de grossier personnage. Votre pied gauche est inconfortable. Quelque chose, qui ne devait pas y être, y est. Vous n'y avez pas songé, occupé que vous étiez avec vos pensées. Un garçonnet s'était adressé à vous pendant que vous y demeuriez. Vous le regardez. Il peine à s'exprimer. Semble-t-il que vous l'intimidez. Vous vous abaisser à sa hauteur et lui offrez votre plus ignoble sourire. Il ne sait comment y répondre. Ses genoux se rejoignent. Une femme, celle qui vous avait dit certains mots, vient vous voir. Elle sert d'appui à l'enfant. Il se tient correctement.

- Le garçon voudrait son chapeau, monsieur, exprime-t-elle.

- Son chapeau, quel chapeau? dites-vous.

- Celui qui est sous votre pied, dit-elle tout en indexant de son regard la partie anatomique en question.
Vous répétez son geste. Vous fusillez cet objet qui vous a laissé une vilaine impression.

- Oh celui-là! Exclamez-vous après avoir retiré votre pied. Vous le dépoussiérez, puis tenter de le lui remettre. Il met du temps à réagir. Il a l'air pétrifié. Il vous fixe de son regard innocent. La dame vous débarrasse de l'objet.

- Excusez-le, il a du mal avec les inconnus.

- Oh, comme certains enfants! Puis-je savoir ton prénom, jeune homme?

Décidément, l'enfant n'est pas un grand praticien de l'exercice de la parole.

- Il s'appelle Été, dit la dame.

- Oh Été, comme c'est beau!

Vous lui déclamez votre identité et elle en fait de même.

S'agit-il d'une sortie scolaire?

- Oui... en quelque sorte. En vérité je suis la directrice d'un orphelinat.

- Cela veut-il dire que tous ces enfants qui sont avec vous sont des orphelins?

- Oui, ils le sont.

- Ah, que de tristesse en ce monde!

- Ne pensez pas que ces enfants sont tristes. Ils ont un foyer aimant qui les a accueilli. Certes, il aurait été préférable qu'ils aient un père et une mère qui puissent les soutenir. Toutefois vous savez, il n'y a pas qu'une seule sorte de famille. La famille aujourd'hui se perçoit sous diverses formes. Une femme et ses chats peuvent être une famille, une mère et son fils, un père et sa fille, deux colocataires partageant la même maison, deux sœurs, deux cousins, un orphelinat... La notion de famille est plurielle.

Les yeux de l'homme s'illuminèrent. Il aurait juste fallu qu'il fasse un peu plus nuit pour qu'on le perçoive distinctement.

- Puis-je connaître le nom de votre établissement ?

- L'établissement a pour nom: ''Le passage aux mille couleurs''.

***************

Un homme marche. Sa joie est là, présente. Il marche. Il sourit laidement. Il marche. Il regarde le ciel. Il marche. Il regarde la terre. Il marche. Il regarde à sa gauche. Il marche. Il regarde à sa droite. Il marche. Il regarde devant lui. Il salue un homme. Il sifflote, sifflote, sifflote encore. Il s'arrête. Deux immenses portes lui font face. Il mande qu'on les ouvre. Cela est fait. Il est accueilli par une dame d'un certain âge. Celle-ci le déleste de son manteau et de son chapeau, ensuite le conduit à un bureau. Il est assis. Une corbeille de fruits est sur la table. La porte se signale. Parait-il qu'il est galant homme et a d'agréables manières: il se lève. Une dame le salue. Il se rasseoit.

- Vous en voulez quelques uns? dit-elle.

L'homme regarda ce qu'elle lui avait offert:'' figues, raisins, pommes, poires, kiwis, prunes,'' étaient les mots qui cheminaient en son esprit.

- Vous n'avez pas plutôt une boisson qui réchauffe la gorge?

- Une boisson qui réchauffe la gorge? Il est normal par ce temps de vouloir une boisson réconfortante. Voulez-vous du thé, du café, du lait, du chocolat chaud?

- Non, non, je parle d'une boisson d'adulte.

- Nous n'en avons pas.

- Ah je vois... Alors je vais vous dire l'objet de ma visite: je souhaiterais adopté.

La dame scruta l'homme avec stupeur. Son regard chercha un abri.

- Ma femme et moi n'arrivons pas à concevoir. Cela fait 13 ans que notre union a été scellée et n'a porté aucun fruit, affirma-t-il tout en croquant dans une pomme. Il ne nous manque plus qu'un enfant pour combler notre existence.

- Vous voulez adopté...

- C'est cela.

La dame eut la tête basse. Son teint était devenu pâle. Son sourire avait pris des chemins que peu connaissait.

- Revenez avec votre femme une prochaine fois. Je voudrais la rencontrer, dit-elle maladive. Ses yeux, sans motilité, scrutèrent ceux de l'homme. Une ombre teinta leur dessous. L'homme se leva dans un bond. Il remercia la dame avec dévotion et prit congé d'elle. Celle-ci s'était proposée de l'accompagner. La porte avait déjà tremblé avant que cela ne puisse se faire.
Cependant si la dame avait été suffisamment alerte, elle aurait perçu une de ces choses qu'on refuserait d'avouer.

L'homme continua son entreprise. La gouvernante l'avait vu. Il avait pris en un catapultage ses affaires et était parti. La bouche de cette dernière avait eu l'air de se mouvoir. Néanmoins, aucun son n'en était sorti. Un homme marcha. Sa joie avait disparu. Il marcha. Il a une mine colérique. Il ne regardait pas le ciel. Il est en colère. Il ne regardait pas la terre. Il marcha. Il ne regarde pas à sa gauche. Il marcha. Il ne regarde pas à sa droite. Il marcha. Il ne regarde pas devant lui. Il siffle, siffle, siffle encore. Il percuta un homme. Il marcha. Il s'arrêta. Il ouvrit une porte. Il la claqua. L'endroit, où il se trouvait, était silencieux. Tout était logé au même lieu en son sein. Le ciel qui le couvrait était sombre. Le sol qui l'entourait était recouvert de charbon. L'homme s'était assis sur un matelas dont l'intérieur était garni de pailles. Ses yeux avaient viré au rouge.

La dame n'avait plus quitté son bureau. La gouvernante l'avait rejoint.

- L'homme, madame, l'homme... qu'a-t-il dit? Que lui avez-vous répondu?

La dame posa les yeux sur la gouvernante, puis les retira. Elle se reposa sur le siège dans un affalement.

- Nous sommes bien en un orphelinat, n'est-ce pas?

- Oui, madame...

- Alors pourquoi ai-je été surprise lorsque monsieur Teranoptysus a demandé à adopter?

-Vous êtes attachée aux enfants madame.

- Un peu trop, n'est-ce pas? C'est une chose que je craignais, madame Maintenon. C'est une chose que je craignais.

**************

- Madame, vous ici? L'avez-vous entendu aussi?

- Oui, je l'ai bel et bien entendu. Mais prions qu'il s'agisse d'une hallucination. Cela serait si effroyale, si c'était vrai!

- Il est peu problable que nous perdons l'esprit toutes les deux, madame.

- Espérons-le tout de même!

Leur discours n'avait aucunement empêché leur mouvoir. Leur porte-chandelle jouait bien leur rôle de guide. Quoique leur ample méconnaissance des lieux faisait véritablement défaut.
Leurs mains défirent le mécanisme qui verrouillaient les portes. Cette action laissa paraître une scène d'horreur. Des éclairs déchirèrent le ciel. Une trombe d'eau d'une monstruosité sans semblable s'abattit sur le sol. Le vent souffla de sa puissance la plus folle. Le petit panier-berceau avait été en leur main. La chaleur l'avait bien entouré. Ces cris avaient cessé.

11/02/2023

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