Du début à la fin (tome 1)

Chapitre - 4

Quelque mois plus tard, Luce plongea dans la musique. Elle ne faisait pas qu'écouter, elle composait aussi beaucoup. Elle jouait du piano, de la guitare et un peu de batterie. Elle était très douée dans ce qu'elle faisait. Elle vivait la mort de son père d'une tout autre façon que le reste de la famille puisqu'elle n'avait jamais été très proche de lui. L'accident l'avait très peu affectée, voire même pas du tout. Elle restait indifférente à chaque fois que quelqu'un lui parlait de son père. Elle lui en voulait terriblement d'avoir abandonné le si peu de personnes qui lui restait malgré son absence qui était permanente. Il avait été égoïste une fois de plus, comme il l'avait toujours été. Même lorsqu'elle et Noémie étaient enfants, il était incapable de venir les chercher à l'heure à la sortie de l'école. Il trouvait toujours une excuse pour jouer le papa modèle, mais personne n'a jamais vraiment su pourquoi il avait toujours du retard. Il tentait peut-être de s'inventer des occupations pour fuir ce rôle de père qui n'était définitivement pas fait pour lui. Il se tuait au travail pour pouvoir avoir cet argument d'avoir fait ce qu'il fallait pour mettre ses enfants et sa femme à l'abris financièrement. Il prétendait avoir toujours été là pour sa famille alors que la seule chose qu'il ramenait à la maison c'était de l'argent et encore plus de travail qu'il n'avait déjà. Or la seule chose que Luce voulait, c'était de l'amour et la présence d'un père. L'argent l'importait peu du moment qu'elle pouvait raconter son weekend de complicité avec son père à la maîtresse comme le faisait les autres enfants de sa classe. Mais elle n'a jamais pu le faire, ni elle, ni sa sœur, ni son frère.

Noémie, elle, avait trouvé un tout autre moyen pour évacuer toute la haine qui la composait, elle avait commencé la course à pieds un mois et demi après l'enterrement de Christophe. Elle courait de jour comme de nuit, qu'il y ait un soleil radieux, qu'il pleuve ou bien qu'il vente, elle courait quand l'envie lui en prenait. La plupart du temps elle allait courir en forêt, loin de toutes distractions. Il lui arrivait même parfois de s'arrêter en plein milieu de sa course pour crier à pleins poumons. Elle libérait le rage qui s'était installée en elle suite à l'accident. Mais après qu'elle se soit donnée à fond dans chacune de ses courses, après qu'elle ait poussé l'intégralité de ses muscles à bout, elle ne réussissait plus à tenir debout, et s'effondrait au sol. Ce qui lui valait beaucoup de visites à l'hôpital. Sa mère s'inquiétait beaucoup. Combien de fois lui avait elle demandé d'arrêter ? Ô combien de fois avait elle supplié sa fille de se canaliser d'une autre façon ? 

Magalie était à bout de force, elle était désespérée du comportement de sa fille. Elle devenait de plus en plus insupportable, invivable. Un climat de tension s'était installé sous leur toit, tout était propice à devenir un sujet de dispute, chaque conversation devenait conflictuelle si Magalie et Luce en faisaient partie. Elles redoutaient toutes les deux le moment où elles pourraient se croiser. Elle s'évitaient un maximum, car les conflits n'étaient pas un plaisir.

Basile grandissait et comprenait de plus en plus l'histoire de son père. Luce lui donnait son point de vue malgré le désaccord de sa mère, Noémie restait le plus neutre possible pour éviter que quoi que ce soit ne lui retombe dessus. Magalie expliquait à son fils que son père était parti sans le vouloir, qu'il ne fallait pas lui en vouloir comme si elle préparait le terrain par rapport aux paroles de Luce. Mais il était jeune certes, mais pas stupide. Il comprenait parfaitement que son père était mort mais que ce n'était pas une grande perte. Il avait encore quelques souvenirs de sa petite enfance qui n'était pas si tendre que ça. L'homme qui lui servait de géniteur était régulièrement chargé de garder le garçon, ce qui était visiblement impossible pour lui. Entre alcool et travail, son fils n'était apparemment pas sa priorité.