Chapitre 2 : Complicité et crapaud.

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Matsuzo était confortablement assis sur un des fauteuils bordeau du salon, un petit carnet posé sur les genoux. L'ancien héritier racontait, avec l'aide d'Augusta, leur bref passé commun. En face de lui, la sorcière, une inattendue étincelle de jeunesse dans le regard, profitait de la chaude lumière du feu qui dansait dans la cheminée, tout en lançant quelques commentaires de temps en temps. Au sol, assis sur un tapis monstrueusement laid, Neville écoutait avec attention.

Alors que Matsuzo reprenait son souffle après une longue tirade, Augusta balaya le sujet d'un petit geste sec.

- Mais bon, assez de souvenirs racontés pour aujourd'hui ! Maintenant, j'ai quelques questions à te poser Matsuzo.

- Je t'écoute.

- Quand as-tu trouvé l'objet te rappelant ta mère ? Quel est cet objet ? En quoi te rappelle-t-il ta mère ? Pourquoi venir me voir à propos de cet objet ? Me concerne-il ? débita la vieille sorcière à toute vitesse.

- Alors... L'objet en question, ce petit carnet, a été écrit par ma mère pour savoir comment me parler de la création de l'empire marchand qu'elle construisait. Je l'avais trouvé juste après la mort de mes parents, mais je n'avais eu le temps d'en lire que la première page. Et en vérité, je ne suis pas venu te voir à propos de ce carnet. Mais tu es la seule personne qui me reste pouvant plus ou moins s'apparenter à une famille, et...

- Et ?

- Et je te parlerai plus tard de la deuxième raison.

- Cachotier !

- Non, j'ai dit que j'allais t'en parler !

- Oui, bien sûr ! Comme la fois où tu as dit que tu allais m'expliquer le sort de la page 237 du livre rouge de la quatrième étagère en partant de la droite ?

- ... Tu es rancunière, ce n'est pas croyable ! rit Matsuzo

- Je ne suis pas rancunière ! J'ai bonne mémoire !

- Mais oui, bien sûr, tu as raison.

- Crôa !

- Même Trévor est d'accord ! sourit Neville.

- Au fait, Trévor, qui te l'a offert ?

- Mon grand-oncle, Algie Londubat !

- Algie ? demanda Matsuzo, avant de partir dans un grand éclat de rire.

- En fait, s'expliqua-il devant le regard ahuri du plus jeune des deux Londubat, Algie est un homophone de Algae. Algues, en latin.

- Tu parles couramment latin ? demanda le plus jeune des trois sorciers.

- Oui Neville. Les principales sont latin, anglais, et japonais.

- Mais comment as-tu fais pour apprendre tout ça ?

- J'ai eu le temps ! Et à mon époque, on parlait le japonais dans la famille de mon père. Toutes mes études ont été réalisées à Poudlard ou avec ma mère, en latin. Plus tard, personne ne parlait naturellement les deux langues que je viens de te citer. Donc j'en ai appris d'autres. 

- Ne t'inquiète pas Neville, il est toujours comme ça. On finit par s'y habituer, compatit Augusta en voyant l'air ahuri de son petit-fils.

- Merci, mais je suis toujours là ! s'offusqua faussement Matsuzo

- Ça, j'avais remarqué ! Bon, je vais voir où en est le thé.

- Je n'ai jamais vu grand-mère comme ça, fit Neville une fois que la concernée eut disparu. En fait, elle est toujours beaucoup plus sérieuse. Presque comme si elle était constamment en guerre, reprit-il.

- Peut-être qu'elle l'était vraiment, répondit Matsuzo, sur le même ton. En fait, je pense qu'elle a toujours dû se battre. Pour avoir de l'autonomie et être prise au sérieux. Elle est une battante, mais elle n'a sans doute presque jamais eu de moment où elle pouvait enlever son masque de vieille femme sure d'elle. Entourée comme elle l'est... Tu l'as dit toi-même, tes oncles ne sont pas des plus fiables. Et plus on garde un masque longtemps, plus on a de mal à l'enlever. Quand j'ai connu ta grand-mère, elle était à peine plus âgée que moi, une vingtaine d'année. Et elle avait exactement le même caractère que la Suiko que tu as connue.

Il y eu un petit silence.

- En tout cas, je préfère quand elle est comme Suiko, affirma Neville.

- Moi aussi, sourit Matsuzo.

- Croa ! fit Trévor.

Le rire des deux sorciers emplit la pièce, léger et plein de promesses pour l'avenir.

- Eh bien, on s'amuse bien ici ! fit Augusta en déboulant dans la pièce avec la subtilité d'un chat de gouttière dans un pigeonnier.

- Matsuzo, je te connais depuis assez longtemps pour pouvoir savoir deux ou trois choses sur ta façon de fonctionner, repris la vieille sorcière, très sérieusement, une fois que tous eurent une tasse de thé brûlante coincée dans les mains, et des scones plein la bouche. Alors vas-y, lis-nous donc le journal laissé par ta mère. Et je dois t'avouer que je suis très curieuse de savoir ce qui y est écrit ! termina-t-elle avec enthousiasme.

MatsuzoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant