Chapitre 9

700 125 56
                                    



Ce sourire qui comble mon vide

💛💙


Le sourire de Jungkook est imprimé sous mes paupières. Je le vois partout dès que je ferme les yeux. Il me suit, me hante, ce sourire doux et fatigué.

Je n'aurais jamais pensé bien m'entendre avec lui, ni même apprécier autant sa présence. Avec Jungkook, c'est différent d'avec les gars d'IKEA. Tout est plus calme, plus silencieux et reposant (ce qui est assez ironique quand on y songe). Parfois, avec les collègues, j'ai l'impression d'être invisible, ou simplement le pote avec qui on passe du bon temps, celui qu'on aime bien charrier. Yoongi est là, c'est vrai qu'il me soutient un peu plus que les autres mais...

Jungkook, lui, je sens qu'il s'intéresse à ce que je suis profondément, avec sa drôle de manière de le faire. Il me regarde beaucoup, souvent droit dans les yeux, et même si ça me perturbe, je crois que j'aime bien ça. J'aime bien qu'il essaye de lire en moi et de décrypter les paroles que je n'arrive pas à formuler. Il ne parle pas énormément, sans doute qu'il n'a pas l'énergie suffisante pour tenir une conversation d'un bout à l'autre. Et moi, je ne lui parle pas énormément non plus, sans doute aussi parce que je trouve ça agréable de se tenir compagnie sans se saturer le crâne de discours futiles.

Notre après-midi s'est passé comme ça, en un demi-silence. Quelquefois, l'un de nous posait une question et l'autre répondait. Quelquefois, on restait simplement assis, les yeux fermés, à profiter du soleil sur notre peau. Ça peut paraître étrange de se voir pour, finalement, ne pas se dire grand-chose, mais lui comme moi, au fond, on a seulement besoin de ne pas se sentir seul. C'est ce que j'ai compris avec le recul, et j'ai réalisé que ça n'a pas été le cas.

Pas une fois on ne s'est senti seuls.

On s'est senti... à deux.

– Mais Hobi ! Comment peux-tu me faire ça ?

– Ça t'apprendra à tout me voler ! À compter de ce jour, considère ma cuisine comme interdite d'accès.

L'image de Jungkook se brouille jusqu'à disparaître. Je rouvre les yeux à contrecœur et laisse la musique celtique du pub rejoindre mes oreilles. Les lumières tamisées me couvrent la vue. Je regarde mes collègues se chamailler comme à leur habitude, essayant de rattraper les conversations comme je peux.

Hoseok se plaint que Yoongi vienne lui chiper toutes ses parts de tarte aux Daims et qu'il n'en reste plus assez pour les clients. De son côté, Yoongi se plaint que Hoseok lui ferme les portes de son garde-manger. Pour être honnête, je pense surtout qu'il râle parce qu'il n'a plus d'excuse pour voir notre cuistot, et que notre cuistot râle juste pour la forme, car il sait que son voleur préféré est doté d'un esprit de contradiction, qui ne le poussera qu'à venir plus régulièrement encore.

– Moi, j'ai toujours le droit de venir, Hyung ? demande Jimin.

– Toi, tu devrais perdre l'habitude de te goinfrer, intervient Namjoon en le pointant du doigt. Tu vas finir avec des maux de ventre.

Rabroué, Jimin s'affaisse sur sa chaise et plonge le nez dans sa limonade. Nam et Hobi devraient arrêter de le materner comme ça. C'est déjà rare qu'il puisse sortir avec nous le soir, alors c'est bête de gâcher ainsi son plaisir. Je ne peux m'empêcher de me sentir coupable à leur place.

Comme Jimin est à côté de moi, je passe une main sur son épaule pour le réconforter et il me sourit.

Il me sourit, et puis il passe à autre chose.

Släkt・ᵛᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant